mercredi 29 décembre 2010

La dispute

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Il y avait longtemps que je n'avais visité "l'autofictif" d' Eric Chevillard.

J’ai coupé en morceaux le corps de ma femme puis j’ai mis ces morceaux dans une valise, elle a fait de même avec le mien, en sorte que nous voilà bien lourdement chargés pour les vacances.


À ne pas confondre, la brute conjugale prompte à cogner, ce crétin violent, inexcusable, ce gorille aux poings haineux, et le paisible bonhomme que sa femme habitée par le démon de l’autodestruction utilise comme gourdin, comme massue, comme couteau, répugnant sans doute à se mettre elle-même en pièces avec les ongles et les dents et préférant, toujours en quête d’un coupable, aller se déchirer sur les moindres aspérités de son compagnon, inévitablement anguleux et contondant par endroits du seul fait qu’il existe et remue, et dont le geste le plus innocent devient malgré lui un coup.

(Elle ne l’écoute plus que quand il ronfle.)

Le dernier est encore le plus terrible à mes yeux.

Illustration La dispute et un petit dernier pour la route avant d'entrer dans une nouvelle année pleine de bonheur et de joie de vivre, c'est le Prez qui vous le dit

dimanche 26 décembre 2010

Exercices de lucidité


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À l'université, mes professeurs me traitaient de dilettante, estimant dommageable pour mon intelligence de cultiver la paresse. Je plaidais coupable. Je n'ai jamais eu d'amour, mais simplement du goût pour la philosophie. Je me suis prêté à elle sans jamais m'y donner. Je potassais les auteurs officiels rarement avec plaisir, mais je me délectais de ces penseurs hors cadre, casseurs d'idéaux et de valeurs, rangés dans la rubrique «littérature », que l'on appelle les «moralistes». Ayant appris très tôt à penser dans leurs livres, je tiens depuis que philosopher ne consiste pas à enseigner à vivre ou à mourir, encore moins à nous consoler de notre finitude, mais à examiner la pertinence de notions tenues pour évidentes, à démystifier des foutaises ronflantes, à mettre un nez rouge aux idoles. En m'adonnant à ces exercices de lucidité, je ne vis pas mieux : je me divertis un peu.

Frédéric Schiffter. Philosophie sentimentale. Flammarion

Illustration : Otto Dix, Newborn Baby on Hands, 1927


lundi 20 décembre 2010

Quand les silences mentent...

Gras Photo : JEA (DR).

Quand les silences mentent
comme des arracheurs d'étoiles

en négatif
les nuits deviennent blanches

puis les aurores saignantes
au bord tranchant des réalités

des nuages épousent les fuites en avant
qui épongent le front de l'horizon

imprégnés de calmants des oiseaux
tombent lentement, calmement

quelques mots tournent en rond
et puis s'en vont sans retour

heureusement aucun arbre
n'accepte de racines carrées

il fait hier, il fait demain
le temps s'est arrêté en chemin

Photo : JEA (DR).

J'ai emprunté à Mosaïques ce poème de JEA. Je pense souvent à lui, espérant que l'icône de son blog va monter tout en haut de la liste, signifiant son retour. Que ce poème soit le prélude à un tel évènement.

samedi 18 décembre 2010

Intimités brinquebalantes


"Les tensions tramant nos fragilités ne renvoient pas qu'à des discordances temporelles, mais également à des déséquilibres dynamiques au cœur de nos désirs : entre stabilités protectrices et instabilités navigatrices, familiarités et découvertes, repères et attrait de l'inaccessible.
(...)
« Rester fidèle à ce qu'on fut, tout reprendre par le début, chacune des deux tâches est immense » Merleau Ponty en 1960 dans Signes. Deux ambitions contradictoires et toutes deux indispensables. En se percutant, nécessairement.
Vivre, penser, assumer des antinomies, une « équilibration des contraires » (...) plutôt que viser «la synthèse » définitivement bouclée.
(...)
Se coltiner des tensions, déplaçables mais non dépassables dans un tout englobant et cotonneux, c'est également tutoyer l'imprévisible.
(...)
« la ferme certitude de l'incertitude », selon les mots de l'incontournable Daniel Bensaïd dans son Pari mélancolique. (...)

Au terme d'un vagabondage lié à l'usurpation faite de son nom dans un mail que j'ai reçu aujourd'hui, je suis allée revoir certains de ses billets sur son blog "Quand l'hippopotame s'emmêle" et j'en ai extrait ces quelques phrases d'un article datant de février 2010. Si vous avez envie de remplacer les (...), cliquez sur le nom de l'auteur ci dessous
Philippe Corcuff

samedi 11 décembre 2010

La Sorcière écrit au Père Noyel.


Père Noyel,
Vieux grigou, une fois encore tu vas nous encombrer d'objets inutiles. Aussi je tiens à t'indiquer quels sont mes envies réelles pour qu'une fois de plus tu ne déposes pas dans mes savates des moulinettes pour faire la vinaigrette. J'en ai UN MILLION!
En revanche, je ne cracherai pas sur une semaine à Budapest.
Tu n'as pas les moyens ? C'est la crise ? Une seule issue : entrer dans une librairie, (pitié pas le Goncourt), un essai tiens, le Dictionnaire amoureux du Rock, de ce cher Antoine. Bien-sûr que les sorcières sont rock and roll ! (Antoine je l'aimais bien aussi dans sa version vichyste).

Sinon Philosophie sentimentale de Frédéric Schiffter. J'avais apprécié Sur le bla bla et le chi chi des philosophes.(Si ce blog était mieux organisé avec des mots-clé toussa, j'aurais retrouvé le billet où j'en causais). Oui je sais, ce type n'est pas bourré de positive attitude. Justement, j'ai besoin de soutenir mes mauvaises dispositions à l'égard de l'engeance.

Surtout, pas d'électronique steplait, parce qu'après Cancun ça la fout mal tous ces trucs au bilan carbone astronomique. D'ailleurs, nous dans la région on s'est pas dégonflés : un contre-sommet, hop là ! Y'a pas d'mal à s'faire du bien même si ça ne change rien à la couleur du dollar (j'me comprend) et c'est moins nul que les coup de tête du footballeur qui dévisse un peu de la lessiveuse.

Tu peux aussi m'offrir de nouvelles bottes, les miennes ont pris un peu d'âge.

Je te recommande de respecter Huguette Dubois-Famofoiller, ma vénérable cheminée, sinon il t'en cuirait. N'oublie pas que j'ai eu mon diplôme de sorcière rue Mouffetard.

On compte sur toi en 2012 pour nous remplacer le Nain, il commence à faire désordre dans notre beau jardin de France. Evite-nous le SKA, sa tronche ne me revient pas. C'est comme ça, j'ai mes têtes, la sienne est un peu trop de gondole en ce moment, ça me semble plus que louche. Comment ? Tu n'as pas un grand choix ? Débrouille-toi d'ici là pour nous en trouver une (oui j'aimerais bien pour changer) qui fasse l'affaire. Si tu fais ça, j'te promets de croire à ta miraculeuse bienfaisance.

Salut vieille branche et bonne année.

Illustration Le dico des sorcières. Elizabeth Brami, Francis Délivré, Hachette Jeunesse

mercredi 8 décembre 2010

Résister c'est créer





Mon ami Phildo m'annonce la sortie d'un film qu'il vient de réaliser, Le vieil enfant (légende Genet)
un film funéraire, un film sur l'enfance, un film littéraire, un film historique, un film musical, théâtral, poétique, burlesque..... un film de Phildo quoi.

Un autre Phil m'annonce que Les Plasticiens Volants dont il assure l'administration vont déployer leurs créatures insensées ce samedi dans les cieux à quelques lieues de chez moi. Mais d'autres amis sont annoncés en visite, saurais-je mêler toutes ces bonnes figures.


Dimanche dernier, je me suis rendue à une dégustation de vins bio à Gaillac, j'ai goûté et adopté quelques bonnes bouteilles.

Gaillac (81)

Domaine des cailloutis, Causse Marines, Domaine de Cantalauze, Domaine de la Tronque,
des vins bien élevés, qui ne vous envoient pas une giclée de poison en même temps que le plaisir de leurs arômes.

Il y avait en parallèle une exposition d'Emmanuelle Pernet. Matériaux bruts, bois repris à la chaux,
patinés, métal serti, agencés tels des totems. Des formes pures et puissantes propulsées par une jeune femme modeste.

La photo prise avec mon portable n'est pas très bonne, hélas

Ce qui vient au monde pour ne rien troubler, ne mérite ni égards ni patience.
René Char


Illustration : Genet par Giacometti

vendredi 3 décembre 2010

Abstracteurs de quintessence

Je viens de faire un petit tour dans la blogosphère en glissant de lien en lien. De poèmes en vidéos, de dessins en notes de musique, d'humour en humeur, quelle galerie ! Pourquoi se fatiguer désormais? La planète entière s'invite dans notre chambre. Un petit clin de clic, et nous plongeons tel l'aigle royal sur une proie ainsi capturée, consentante et roucoulante. Comme le monde devient aimable ! Tous ces archivistes désintéressés trop heureux de nous inviter à visiter leur royaume, à nous y laisser folâtrer tout à notre aise et nous ne sommes pas même obligés de récompenser le guide ni même de le saluer en entrant ou en sortant. Dommage d'ailleurs, nous aimerions parfois le croiser en chair et en os. Cela, en revanche, ne fait surtout pas partie du programme, surtout pas. Le blogger n'est pas un vulgaire meetic addict. Il ne prétend qu'à la spiritualité de ses œuvres et ne songe, en toute modestie, qu'à fonder une petite clique d'adeptes prêts à faire circuler à leur tour, de clic en clic, une nouvelle quintessence.
Attention cependant, soyons vigilants, prenons garde, le poète nous aura prévenus :
"quel dommage qu'en passant par l'alambic la pensée humaine prenne le chemin contraire à celui de l'eau de roses, et qu'à la troisième ou quatrième épuration elle se dessèche, au lieu de s'exprimer en quintessence. Musset .

Pubié le mercredi 24 décembre 2008 (veille de Noêl) , appelé en renfort pour cause de panne sèche dans un cerveau saturé.

Illustration : alambic à Armagnac