mercredi 28 décembre 2016

De quelques repentirs avant le nouvel an




Barcelone,  les santons "cagueurs" une tradition catalane;  tous les "grands" de ce monde sont là

Je l'ai déjà dit, je sais , je le répète, le premier de mes repentirs est d'avoir un peu délaissé ce blog au profit de ma page facebook. Tous les autres en découlent: les livres dont je n'ai rien noté, les photos que j'ai négligées, les films dont je n'ai rien retenu, les musiques qui se sont évanouies dans le silence. En relisant certains de mes billets antérieurs, je suis frappée par le précieux exercice de rétention qu'ils ont accompli. Ainsi l'année 2009 riche de ses 169 billets est-elle en mesure de me restituer une grande partie des coups de cœur, coups de gueule qui m'ont animée. Sans compter que grâce à ma rubrique hebdomadaire le "vent des blogs", je retenais dans mes filets pas mal de jolies perles pêchées dans les bacs de mes congénères. Hélas désormais , lorsque je clique sur les liens, je rencontre souvent le vide, la plupart des blogs ont disparu.
Je peux encore rechercher dans mes propres soutes quelque minerai qui sans prétendre au diamant me semble cependant honorable de clarté.
Ainsi dans la recension du 29 décembre 2009 intitulée "Le nom du bal perdu, festival des oubliés"   
j'avais repris l'extrait d'un texte publié le 1er janvier 2009 "Les noces du Che et de Sainte Utopie" que je ressers aujourd'hui sans en changer une virgule.
La Révolution cubaine avant de s'avachir et s'obscurcir avait suscité dans le monde entier l'espoir que le système mafieux qui est le jumeau de l'ombre du libéralisme, l'exécuteur de tous les coups foireux de l'Empire, allait enfin être ramené à la lumière et comme tout vampire s'y dissoudre. Espoir déçu. Trop de transfusés du démon par morsure insidieuse participent et collaborent.
Pourtant, voilà bien ce qu'il nous faudrait. Une année de dissolution de toutes les camorras et pour commencer balancer dans des bains d'acide toutes les pétoires que nos mâles ornés des fameuses cojones arborent en sautoir sur tous les théâtres du monde. Interdiction absolue des armes. Expurgation totale. A mains nues, les pugilats s'épuiseraient assez vite et auraient l'insigne avantage de laisser les non pugilistes hors champ des gnons.
Sainte Utopie, priez pour nous. Ainsi soit-elle (la nouvelle année). 

 On voit bien que la sainte fait la sourde oreille. Le bruit des bottes et des bombes enfle plus que jamais.
Allez ne soyons pas moroses en cette fin d'année, même si elle a été plutôt rude, inutile que j'énumère ses hauts faits de violence et de mort. 
Je ne vais retenir que les bonnes choses. Mes voyages par exemple cette année Florence, Prague, Essaouira, Montréal, Budapest, Thessalonique, Barcelone, sans compter, une semaine à Royan avec mon frère (occurrence très rare), Besançon (que je ne connaissais pas et retrouvailles avec une amie, Dijon (idem), retour à Avignon, visites des amis en été, bref, une année agréable en dépit de tout ce qui s'est abattu par ailleurs sur le monde et dont on ne peut s'exonérer, le chagrin collectif nous atteint dès lors qu'on a un soupçon d'empathie pour la malheureuse engeance humaine.
Retenir les douceurs. Et seulement les toutes récentes.
Les beaux films : le dernier en date Louise en hiver, un bijou délicat et poétique 





Les livres. Je viens de lire les aventures de Tom Sawyer et de Huckleberry Finn (Mark Twain), un délice qu'on a gouté normalement dans son jeune âge et qui m'était resté inconnu.
La musique, ma fillote m'a offert à Noël un CD de Madeleine Peyroux. mon fiston une place de théâtre musical à venir...
Je nous souhaite une année pleine de ces petits bonheurs et que nous réussissions collectivement à contrer le vent mauvais qui souffle tout de même un peu fort ces derniers temps.
Sainte Utopie, ne priez pas, agissez! 

jeudi 8 décembre 2016

La créativité, c'est l'intelligence qui s'amuse.

"La créativité, c'est l'intelligence qui s'amuse."Merci au grand Albert Einstein qui a nous  livré cette jolie pépite. Elle m'a servi de mantra ces derniers jours.
Encore une fois, j'étais sur les routes, du rail ou du ciel.
Dijon où se déroulaient « Les journées de l'économie autrement" organisées par le magazine Alternatives économiques". Ma foi, tous les notables étaient présents et se félicitaient du relatif succès des entreprises de l'économie sociale et solidaire. Benoit Hamon en faisait un des éléments clé de son futur programme de campagne si toutefois il parvient à éliminer tous ceux qui se pressent au portillon (le nombre augmente de jour en jour). Sur la même estrade se trouvait un certain Borello, PDG de SOS une entreprise d'insertion pour les services à la personne, artisan de la création du MOUVES, qui regroupe les entrepreneurs sociaux, un cheval d'entreprise, une alouette de solidarité. Enfin bref, je ne vais pas vous parler boutique. Borello s'est déclaré soutien d'Emmanuel Macron, pas une surprise. Une anecdote, j'ai eu l'occasion d'échanger pendant un petit quart d'heure avec Philippe Bertrand, l'animateur de l'émission "Carnets de campagne"  . Cet homme est aussi sympathique qu'il me semblait l'être en l'écoutant à la radio. Et il est le seul à offrir une vraie tribune à "l'économie de l'avenir" un propos plusieurs fois réitéré pendant ces journées.
En clôture Patrick Viveret  a appelé de ses vœux la fin de l'obsession compétitive et l'avènement de la "stratégie érotique mondiale" qui ne signifie pas qu'on se livre à une monumentale orgie libidineuse mais que la "valeur" retourne à son étymologie "force de vie", éros par opposition à Thanatos qui semble étendre son règne morbide sur la planète. Cynthia Fleury  a rappelé que les dominations se fondent sur les états dépressifs de la population, que la réponse à l'angoisse est l'engagement (au sens le plus large) et qu'il nous faut déjouer le triptyque avidité / durcissement des cœurs / dérèglement du langage. Redonner du sens à la langue, voilà qui me parle si je puis dire.

Patrick Viveret, Cynthia Fleury, Guillaume Duval pour la plénière de clôture dans le faste du Palais des Ducs de Dijon
Ensuite Paris. Plaisir d"aller soutenir la jolie troupe du Peuple lié et "Ici les aubes sont plus douces". Comme c'est difficile le spectacle vivant !  Ces jeunes gens talentueux vont avoir joué pour ne quasiment pas se payer. Et pourtant ils ont un vrai talent! Terrible !


Un qui n'a pas de souci de budget, c'est Depardieu. Il peut se permettre de soutenir un jeune réalisateur "non conformiste".  Tour de France  est un film français réalisé par Rachid Djaïdani, rencontre entre un vieil acariâtre raciste et un jeune rappeur qui représente tout ce que le vieil ouvrier exècre. C'est la chronique d'un apprivoisement réciproque qui offre l'occasion d'explorer les clichés et les préjugés qui font écran entre les êtres. Un tour de France par les ports qui m'a donné aussi l'occasion d'en revisiter la plupart. Un film dur et tendre et Gégé émouvant. Le jeune rappeur Sadek lui  tient tête sans faiblir et finit par le retourner. J'ai vu le film au Méliès de Montreuil, dont l'implantation en plein centre est une vraie réussite, en dépit de toutes les polémiques que le projet a suscité.

Rome enfin. J'ai visité deux lieux sympathiques : le Millepiani, un espace de travail coopératif vivant et drôle. Le co-working est un concept qui prend de l'ampleur. Ce lieu était en avance sur son temps. Comme dit l'autre "seul on va plus vite, ensemble on va plus loin". La zone d'accueil des clients est abondamment fourni de bouteilles de bon vin et les agapes communes sont naturelles. Plus de 150 personnes travaillent dans le lieu selon des rythmes propres à chacun.



Dans un ancien bain public restauré, une bibliothèque "Moby Dick où ont lieu des expositions, des conférences. Pas de livre, on les recherche sur l'ensemble du patrimoine des bibliothèques universitaires par le wifi en accès libre, on vient y lire les journaux ou jouer avec ses enfants grâce à la ludothèque. Rien d'extraordinaire mais un établissement authentiquement populaire qui offre un accès libre aux habitants de Garbatella, un quartier aux maisons colorées à l'architecture baroque, que je n'ai pas eu le temps d'explorer comme je l'aurais souhaité 
La bibliothèque Moby Dick
Les temps de transport offrent l'opportunité de lire. Mes dernières lectures Azar Nafisi Mémoires captives, Plon, 2011 et La République de l'Imagination, Jean-Claude Lattès, 2016, la vie difficile des femmes -et des hommes- dans l'Iran de l'époque de Khomeini, quand on a cru à la révolution après avoir été opposants au Shah au point de devoir s'exiler. Revenir et déchanter très vite surtout quand l'Iran se durcit avec la guerre contre l'Irak et repartir, parce que les proches sont en danger ou disparaissent sans qu'on sache où ils se trouvent. Naviguer entre des identités contrastées et forger ses forces grâce à la littérature, américaine en l'occurrence. Je fais une pause, mais "Lire Lolita à Téhéran"  attend son tour. 
Lu également  Leïla Slimani, Dans le jardin de l’ogre. Je n'ai pas vraiment apprécié ce personnage de femme obsédée sexuelle, perdue et dépendante et même si l'écriture sèche et économe remplit son rôle dans une approche clinique du cas de cette femme étrange autodestructrice et ambiguë (elle n'aime pas son mari mais il est son seul point d'attache, son fils même l'encombre dans cette addiction dont elle ne parvient pas à se défaire) je suis restée insensible, voire agacée. Leïla Slimani vient d'obtenir le Goncourt pour un livre qui semble également présenter un personnage pervers. Les bons sentiments ne font pas de la bonne littérature certes, mais la perversité   n'est pas non plus un gage d'excellence.
Cette créativité ne m'amuse décidément pas.