Je suis allée voir le seul en scène Marc Arrnaud "La métamorphose des cigognes" un titre à lui seul très drôle puisque l'acteur nous prend à témoin des affres qui le torturent au moment de fournir son sperme pour une FIV (fécondation in vitro), alors que sa femme est sous anesthésie pour subir un prélèvement d'ovule. Pourquoi veut-il un enfant ? Le veut-il vraiment d'ailleurs ? Pourquoi ce procédé humiliant lui est-il échu ? Qu'a-t-il bien pu faire pour en arriver là. ? On rit, mais c'est aussi touchant un homme qui se débat dans ses contradictions. Il est vrai que le plus souvent l'enfant naît d'un accouplement "normal". Est-ce si "normal"? Pendant le temps qui lui est attribué pour accomplir sa mission, il ne parvient pas "s'y mettre" et l'infirmier le rappelle régulièrement pour lui demander où il en est du protocole; Il convoque les figures de son entourage qui le harcèlent, les souvenirs de ses premières expériences sexuelles, les rèves qui lui présentent des situations anxiogènes. Dans l'un d'eux, un enfant lui dit qu'il a failli être un bébé éprouvette,mais ses parents ont finalement eu la bonne idée d'aller à La Martinique dont le climat chaud et humide favoriserait la fertilité.L'acteur accompagne son délire d'éléments scientifiques cohérents avec son sujet. Seul en scène avec un tabouret et un gobelet pour recueillir le précieux liquide séminal. Bel exercice !
Marc Arnaud et son gobelet . |
En cherchant son profil dans wikipédia, j'ai été effarée de la longue liste de ses prestations au thèâtre, au cinéma, à la télévision. Il a obtenu le Molière 2022 du seul en scène. Mérité !
Vu le film "Sur l'Adamant" réalisé par Nicolas Philibert, sorti en 2023 et Ours d'or à la 73 Berlinale.
"À l'Adamant, centre de jour situé Quai de la Rapée dans le 12e arrondissement de Paris, on accueille sur une péniche des adultes souffrant de troubles psychiques. On y pratique la psychiatrie institutionnelle : tournant le dos aux pratiques d'enfermement, cette approche s'appuie sur la dynamique de groupe et la relation entre soignants et soignés. Patients et soignants sont filmés pendant sept mois" (Présentation wikipédia). On reconnaît la délicatesse qu'on avait pu apprécier dans les précédents films de Philibert, pour approcher au plus près mais sans violence les délirants qui viennent sur la péniche pour trouver bienveillance et bonne humeur et s'y ressourcer. Tous les patients sont des fracassés mais leurs propos ne sont pas insensés. Au contraire ils résonnent avec nos terreurs secrètes qu'ils mettent à jour sans filtre. Sur l'Adamant, ils fabriquent, ils créent, accompagnés par des soignants qui ont tombé le costume médical et sont simplement des humains à l'écoute qui les connaissent et accueillent joyeusement leurs saillies tonitruantes, respectent leurs obsessions, encouragent leur vaillance. Hommage mérité !
Ma fille, au nombre de ses multiples engagements se produit actuellement dans un spectacle de marionnettes qui met en scène la vie quotidienne dans un EHPAD
J'étais un peu circonspecte quant au sujet. Vu le spectacle en sortie de résidence c'est à dire à peine rodé. J'ai été émue par ce que ces vieux accompagnés par les trois jeunes femmes qui sont leurs soignantes (et manipulent leurs vieux corps fourbus) expriment de la douleur de vieillir mais aussi rient de leur résistance à encore vivre. Belle performance des comédiennes qui prennent tour à tour les voix chevrotantes de leurs marionnettes et leurs voix de femmes surchargées de travail, harcelées par le quotidien. Pour en savoir plus
Vu à la télévision "Sale race". Tania de Montaigne propose de regarder enfin le mot "Race" en face. Sous forme d'une fausse conférence orchestrée par Stéphane Foenkinos et teintée d'une drôlerie cruelle, "Sale Race" invite à un voyage au coeur des préjugés où s'entrecroisent la petite et la grande Histoire.Un spectacle vivant à la croisée du théâtre et du documentaire, mêlant interaction avec le public, archives et lectures de textes fondateurs par huit invités : Sophia Aram, Hugo Bardin aka Paloma, Théo Curin, Amir Haddad, Lucien Jean-Baptiste, Valérie Karsenti, Paola Locatelli et Liliane Rovère. (présentation France TV)
On (re) découvre les textes publiés il n'y a pas si longtemps qui dépeignent le Noir sous des propos méprisants et méprisables. La majuscule est ce qui crée la frontière entre eux et nous et englobe en une même entité des singularités encamisolées dans le stéréotype et le préjugé. Tania de Montaigne porte un nom qu'on lui refuse comme légitime, ce n'est pas un nom d'Africaine ! Comme si tous les gens de couleur sombre étaient Africains, comme si l'Afrique formait un continent homogène sans distinction de langues, de cutlures, d'histoire. Et comme si être née en France, de parents nés en France n'était pas suffisant pour être admis.e dans la communauté nationale. On examine le cas dess Asiatiques, des Juifs, des Roms qui subissent eux aussi discriminations et rejets. Un mode de mise en scène qui permet d'aborder un sujet grave de façon accessible. A voir en replay sur France TV.
Dernier en date "Le problème lapin" "Une conférence débridée et follement jubilatoire sur l’Anthropocène
(nouvelle ère géologique de la terre) dans une dérive du raisonnement
jusqu’à l’absurde. Absolument réjouissant ! (Présentation Scène nationale d'Albi Tarn)
Drôle, pédagogique, militant et surtout un moment de dilatation des zygomatiques. Un duo Frédéric Ferrer / Hélène Schwartz, excellent.
Vive le théâtre, le spectacle vivant, même quand il est diffusé par le média filmique !
Et ne pas oublier "La voisine" Zoë Lucider, Editions Pelandra. A commander en librairie.