mercredi 2 octobre 2024

Un week-end lumineux

 


Dans ce bel endroit a eu lieu une rencontre initiée par mon vieil ami Phil au prétexte de fêter son anniversaire. J'ai ainsi eu le plaisir de revoir des gens qui m'étaient chers mais que je ne voyais plus ou peu à cause des distances géographiques qui finissent par étirer les liens. Joyeuse compagnie, avec un sujet préférentiel d'échanges, le cinéma, Phil étant lui-même cinéaste / vidéaste et quelques autres itou. Beaucoup d'humour, donc beaucoup de rires. Excellente chère bien arrosée, nous étions en Bourgogne et l'ami est un fin connaisseur des richesses de son patrimoine. Musique bien sûr avec un groupe  Seize cordes (la somme des cordes des trois compères). Jazz, rock et valse manouche. Catherine qui fut chanteuse dans ce groupe fredonnait. Le lendemain, elle nous a estomaqués en entonnant à l'impromptu, a capella, un air de Gabriel Fauré. Elle avait "le besoin de trouver le bon moment" nous a -telle déclaré.  


Photo empruntée à l'agenda local annonçant leur prestation à la fête de la musique


Promenade le long de la Tille avec ceux qu'on n'a pas vu depuis longtemps mais avec qui on partage tout un passé, nous donnant des nouvelles de nos vies ou en apprenant de ceux qu'on découvre.


Phil est un grand archiviste. J'ai pu revoir des documents,  certains me concernant (nous avons réalisé trois documentaires ensemble), dont je n'ai plus trace mais que lui a soigneusement consignés dans un portfolio qui porte l'année de référence. Autant d'années autant de portfolio où cohabitent toutes sortes de documents articles, synopsis, devis de tournages, photos de plateau etc..  J'ai été extasiée du travail accompli et me suis posé la question de me livrer à cette sorte d'archéologie au sein du fouillis de toutes mes archives. Je pense hélas que je ne parviendrai pas à la méticulosité de mon ami, faute d'avoir anticipé pareille entreprise.

Nous avons eu droit à diverses projections dont celle d'une fête antérieure de 30 ans qui a permis à ceux qui en étaient de s'esclaffer tout en vérifiant que le temps "aux plus belles choses se plait à faire un affront". Phil a conclu ce film (qu'il a monté à partir d'une capture faite par un des nôtres) par un hommage "à nos chers disparus" dont Laurent Perrin.
Nous, les présents, étions bien vivants et fiers de l'être, d'avoir réussi à déjouer toutes les chicanes que la faucheuse à semé sur nos parcours. 




Découverte (chez Phil, on découvre toujours) d'un peintre extraordinaire  Jean Deletre un autodidacte dont la profusion  et la force des couleurs évoque une sorte de mélange de Bruegel pour la truculence des situations, Bosh pour l'onirisme et Archimboldo pour la nature intimement mêlée aux personnages. Délit de fuite est son deuxième recueil. 

Lu, avant et après ce délicieux épisode, le dernier ouvrage de Mona Chollet "Résister à la culpabilisation. Sur quelques empêchements d'exister". (que je conseille chaleureusement).
"Nous devons avoir l'obstination d'accepter notre joie dans l'impitoyable fourneau du monde. faire de l'injustice le seul étalon de notre attention, c'est faire l'éloge du diable.  Il est légitime de jouir de la vie, d'honorer de son mieux l'ici et le maintenant, d'utiliser toute la liberté dont nous disposons à l'instant T pour vivre de la manière la plus digne et la plus heureuse possible. Quel sens cela a t-il   de vouloir pour tous et toutes un bonheur que l'on jette aux orties quand on en dispose ?Au contraire, nous pouvons veiller au maillage de beauté, de sens et de générosité qui fait tenir le monde, et le renforcer dans la mesure de nos moyens. Nous pouvons assumer et honorer notre propre vie. (Zones 2024, p 242)

Merci à Phil et à sa compagne Chantal d'avoir veillé à nous mettre en partage ces deux jours de beauté, de sens et de générosité.  

mardi 3 septembre 2024

Sorcière, prend garde à ton derrière

 Aussi, si je ne les aimais pas toutes, je les plaignais avec leur teint cireux, leurs corps si riches de promesses, mais mutilés comme ces arbres que des jardiniers s'efforceraient de nanifier ! Par contraste, nos enfances de petites esclaves pourtant si amères, semblaient lumineuses, éclairées du soleil des jeux, des randonnées, des vagabondages en commun. Nous faisions flotter des radeaux d'écorce de canne à sucre sur les torrents. Nous faisions griller des poissons roses et jaunes sur des croisillons de bois vert. Nous dansions. Et c'était cette pitié contre laquelle je ne pouvais me défendre qui me poussait à les égayer. (Maryse Condé, Moi, Tituba sorcière...Folio p 97)

Tituba, née à la Barbade, est  initiée par sa grand-mère guérisseuse et faiseuse de sort. Exilée pour suivre son mari à Boston comme esclave, elle rencontre et subit l'histoire du procès des sorcières de Salem.

Je n'en dirai pas davantage. Il faut savourer la langue de Maryse Condé et ce qu'elle transmet de l'indignité faite aux Noir.e.s dans ces périodes d'esclavage.

La lecture de ce passage a fait resurgir en moi des souvenirs de mon arrivée à Paris et de ma rencontre avec mes congénères que j'avais si fortement enviés quand ils venaient en vacances au bord de l'océan qui était mon quotidien et que je ne quittais jamais. Sauf une fois, à 9 ans,  pour des vacances à la ferme où mes sœurs et moi avons découvert avec bonheur les animaux dont nous nous amusions à reproduire les cris. Une autre fois (à 12 ans) en colonie de vacances à Servoz, petit village proche de Chamonix où j'avais été éblouie par la beauté du Mont Blanc. En parlant avec mes camarades d'université, je découvrais à quel point leur enfance avait été contenue dans des appartements, des conventions vestimentaires et souvent des parents peu aimants. Au contraire, comme Tituba, j'ai vécu une enfance de sauvageonne. Notre maison était entourée de terrains vagues (ils ne le sont plus depuis longtemps et se vendent désormais à prix d'or). Nous avions tout loisir d'y galoper, de cueillir les mures et les pommes sauvages et surtout de rejoindre la plage pour s'y ébattre follement, y compris à l'adolescence pour les premiers flirts. Et même si la rue était encore à cette époque un lieu ouvert aux enfants, dans les "bonnes familles" on ne laissait pas les enfants "trainer" dans la rue. 




J'ai payé le prix de cette enfance libre quand je me suis aperçue que je n'avais pas les codes de la bonne société, que je ne me "tenais" pas bien et qu'on me le faisait sentir en me snobant ostensiblement. J'ai traversé une période de mimétisme effréné pour tenter de franchir le fossé entre mes origines "roturières" et cette sorte d'aristocratie bourgeoise qui formait la majorité des étudiants. Il n'y avait que 7% d'enfants de prolétaires à l'université à mon époque. Ca n'a guère évolué. D'après le centre d'observation de la société,  la baisse de la part d’enfants d’ouvriers se poursuit (...). Ces derniers forment 10 % des étudiants à l’université, 7 % dans les classes préparatoires aux grandes écoles et 2 % des élèves des écoles normales supérieures (parmi les plus sélectives des grandes écoles).   

Conclusion de l'article 

(...) comme le montrent ces données, notre système est loin de faire ce qu’il devrait pour assurer l’égalité des chances scolaires, essentiellement parce que la compétition y est très tendue, que l’école française laisse peu de place à l’expérience et qu’elle cherche à sélectionner quelques bons élèves plutôt que d’éviter d’en perdre un grand nombre en route.   

Pour ce qui me concerne, j'avais de bons résultats (sauf en discipline, trop rebelle), j'avais compris que c'était l'issue de secours. Mais je n'ai jamais tout à fait perdu le sentiment d'imposture dont parle Bourdieu qui m'a vraisemblablement bloquée dans mon désir de devenir écrivaine. Je suis très reconnaissante aux transfuges de classe d'avoir un peu entamé le plafond de verre et à Bourdieu d'avoir si bien analysé l'influence du "capital culturel" dans son livre "La distinction". Cela m'a aidé à m'émanciper et à m'inventer mes propres références et mon code de valeurs, notamment en me frottant à d'autres cultures et en me moquant bien de grimper dans une quelconque échelle sociale. 

Ce billet est inspiré de la lecture de Maryse Condé, mais conjoncturellement d'une rentrée des classes qui se fait dans les pires conditions. L'illustration de la couverture est le fameux  "Portrait de Madeleine, réalisé par  Marie-Guillemine Benoist. Il s'est d'abord intitulé portrait d'une négresse et a été débaptisé et rebaptisé pour être désormais exposé au Louvre sous l'intitulé "Portrait d'une femme noire".

 Le titre du billet  reprend le refrain d'une chansonnette tirée d'un conte de Pierre Gripari, la Sorcière du placard aux balais. 

Je rajoute ce jour (04/09) un très beau texte de la Poétesse berbère Taous Ait Mesghat :


"Puisque dévoiler mes jambes cause des tremblements de terre et mes cheveux, cyclones et vents froids.
Puisque un bout de ma gorge fait monter la mer et des terrains glissent au son de ma voix. Puisque mon sein qui allaite provoque famine et misère et que mes bras nus réchauffent le climat. Puisque mon sourire déstabilise l'univers et réveille tous les instincts bas. Puisque je suis derrière toutes les catastrophes naturelles, alors crains moi. Car force divine je suis et le misérable mortel, c'est toi."

jeudi 22 août 2024

L'été en pente douce

 Je me suis aperçue que mon blog me servait parfois à retrouver une date. Comme j'y consigne certains événements ou voyages, je peux m'y reporter quand je souhaite en retrouver certains détails, dont la date. 

Cet été, à la recherche d'une de ces occurrences,  je me suis amusée à revoir certains billets et notamment ceux du temps où les blogs étaient plus en vogue qu'ils ne le sont aujourd'hui. Ainsi beaucoup des liens que je collectais dans mon "Vent des blogs" ne mènent plus nulle part (je ne choisis pas celui-ci par hasard, les commentaires sont aux petits oignons et la plupart des liens restent actifs). Certains des blogueurs ont même été avalés par la grande broyeuse (JEA, Depluloin ) Clopine n'émet plus sur Facebook ce qui me fait augurer le pire. Henri Zerdoun avait cessé également de poster sur FB, il vient de réapparaître après 6 mois d'hospitalisation pour notre plus grand plaisir. 

J'ai alterné journées calfeutrée à l'intérieur pour fuir la canicule et les moustiques. Et quelques sorties. J'ai commencé à passer en revue mes archives, ne prélevant que quelques documents et remplissant des cartons de feuilles destinées au recyclage. Ce faisant, dans une rétrospective de mon activité professionnelle, je constate la variété et la somme de documents accumulés. Etrange de revoir sa vie sous cet angle. 

Pour les festivités, quelques amis en visite, quelques visites chez des amis. Ma fille jouait dans un de ces festivals d'été à Vaour, occasion de revoir des amis qui habitent dans cette région, encore dans le Tarn mais où l'Aveyron coule au sein de très belles gorges qui font le bonheur des adeptes du canoé kayak.

Les guinguettes rencontrent un vrai succès et se sont multipliées ces dernières années. Nous en avons une à proximité immédiate où nous dégustons les produits de la ferme en écoutant des concerts de qualité. 

La Mondine

  

Une visite de Cordes pour en offrir la découverte à un ami, hébergé pour quelques jours, Parisien réfugié pendant l'invasion des JO, (il connaissait en fait) et pour la redécouvrir. Seul problème, la vieille ville se mérite, il faut grimper dans ses rues pavées, un peu éprouvant. Je n'en avais pas gardé ce souvenir, il est vrai que j'avais 40 ans de moins.  

Une ruelle de Cordes 

Un petit tour à Anduze pour les plaisirs de l'amitié, des bons repas et des rires partagés. 

Pendant que nous étions dans le sud un incendie s'est déclaré au dessus du village. Comme nous étions près de l'étang où nous avions pris un bain, nous avons assisté de très près au va-et-vient des canadairs  qui venaient s'approvisionner en eau pour la déverser sur l'incendie dont nous pouvions apprécier l'importance aux volutes de fumée noire. Une chance cette proximité qui a permis de juguler le feu assez rapidement. Cependant plus de 300 hectares dévastés, non seulement les arbres mais la flore et la faune. Nous connaissons bien la Gardiole, mon compagnon est originaire du village. J'avais une pensée mélancolique pour ceux qui ne bénéficie à proximité du désastre d'une source d'eau aussi abondante et des appareils pour y puiser

Cliquer pour agrandir. Au fond le Mont Saint Clair de Sète

Et enfin, confitures de reine-claude et coulis de tomates dont le jardin regorge.

Et lectures bien sûr. 

C'est presque la fin de l'été. Je vais conclure ce mois d'août par un stage de chant. Dans une jolie chapelle.

"Il fallait que je prenne garde à ne plus passer à côté des choses importantes, celles qui rehaussent la vie vers la joie pure, mais c'est une entreprise d'être attentif à tout lorsqu'on slalome entre les jours, entre contraintes, assurance et oubli, et je défie qui que ce soit de soutenir que notre trajectoire est une ligne droite plutôt qu'une errance, j'en détiens la preuve." Valérie Zenatti, Qui-vive, Ed de l'Olivier 2024 (p 16)

Le titre est emprunté au film réalisé par Gérard Krawczyk, sortie 1987, Pauline Lafont, Jean Pierre Bacri, Jacques Villeret, Guy Marchand, Jean Bouise.

mardi 30 juillet 2024

Comme un air de vacances


La tension entre le besoin de tranquillité et le désir de contact, entre l’amour du quant-à-soi et la curiosité pour les autres, n’est jamais résolue définitivement. La taupinière assiégée Les introvertis et la promo. Blog de Mona Chollet  

Petite expédition à Royan à l'occasion d'un minuscule salon du livre, prétexte à retrouvailles avec mes terres d'enfance. Le salon un peu décevant. A ma droite, une écrivaine vendait des romans policiers à tour de bras. A ma gauche, une dame charmante et mal voyante proposait  l'histoire de son chien guide. L'une comme l'autre asséchaient les finances de ceux qui auraient pu s'intéresser à ma prose  Il faut dire que je suis une piètre attachée de presse de moi-même. C'est un exercice où je suis très mal à l'aise. Voir ce qu'en dit Mona Chollet en cliquant sur le lien ci-dessus


J'ai eu le plaisir de retrouver une amie de lycée après une longue éclipse. Elle m'a donné des nouvelles de certaines de mes connaissances. C'était très agréable. Nous nous sommes promis de renouer un lien pour le moins distendu.

Promenade le long de la côte, odeurs anciennes, je constate avec plaisir que les algues qui avaient presque disparu sont de retour. Un signe de meilleure santé de l'océan? 

Parties de scrabble avec ma sœur, seules occasions pour moi de jouer. Je gagne avec seulement quelques points d'écart.

Repas de langoustines, de moules, de seiche et visite du marché avec ses langoustes et ses homards  attendant dans leurs aquariums la main fatidique qui va les peser, les emballer avant qu'on les ébouillante ou les grille.




Visite de Mornac, un des villages courus des touristes que j'ai souvent fréquenté hors saison parce que j'aime me promener le long des cabanes d'ostréiculteurs. Cette fois, il était un peu envahi mais j'ai regardé avec amusement un gamin plonger dans la Seudre suivi immédiatement de son chien, remontant de concert jusqu'à la rive pour plonger à nouveau.






En dépit du vent froid et des nuages lâchant par moments de courtes averses, j'ai réussi à me baigner. Bonheur de se laisser porter par les vagues. En revanche, un jour, la mer bastonnait et je ne suis plus suffisamment à l'aise avec la violence du flux et reflux dont nous nous amusions tant avec mes copines. Si j'aime encore la plage, je n'y reste plus très longtemps comme je le faisais avec un livre ou en compagnie d'un.e ami.e.



Retour, visite de mon fils pour me sauver d'une arnaque de hacker et reprise en main du jardin avant dépérissement, faute d'arrosage. Nous abordons des temps de canicule.  36° aujourd'hui et cela devrait durer.

Alors, un peu de temps pour écrire tous stores baissés, en compagnie d'Ibrahim Malouf que j'ai eu le plaisir d'écouter en concert à Lisle sur Tarn, le village où j'ai habité pendant une année de transition      

 



Ajouté en dernière minute, requiem pour Charles Juliet " Lambeaux," considéré à juste titre comme son chef d'œuvre

mardi 16 juillet 2024

Comment dire ?

Soulagement bien-sûr. Et maintenant ? On est à nouveau dans les chamailleries. Il faut reconnaître que l'exercice n'est pas simple. Chacun veut être représenté à la "hauteur" qu'il pense être celle de son parti (et de ses propres ambitions personnelles. Il y a d'anciennes guerres qui resurgissent. LFI subit une hémorragie de représentants et non des moindres. Il y a ceux qui ont été exclus avant le vote et ceux qui partent pour incompatibilité avec une gouvernance jugée non démocratique. Pendant ce temps de latence, la droite tente de se récupérer pour constituer un groupe "plus gros" à opposer à ceux qui par leur nombre ont gagné les élections.

  


  • UG Union de la gauche (le Nouveau Front populaire) : 178 sièges
  • ENS Ensemble! (camp présidentiel) : 150 sièges
  • RN Rassemblement national et ses alliés : 143 sièges
  • LR Les Républicains : 39 députés
  • DVD Divers droite : 27 sièges
  • DVG Divers gauche : 12 sièges
  • REG Régionaliste : 9 sièges
  • HOR Horizons : 6 sièges
  • DVC Divers centre : 6 sièges
  • UDI Union des Démocrates et indépendants : 3 sièges
  • SOC Parti socialiste : 2 sièges
  • DIV Divers : 1 siège
  • ECO Écologistes : 1 siège

La politique partisane est, de mon point de vue, obsolète. La gauche ne devrait pas oublier que c'est la société civile qui a animé un grand mouvement de mobilisation pour soutenir le front républicain. Les uns comme les autres ne devraient pas oublier non plus qu'ils doivent leur mandat aux électeurs de l'autre camp. Ni que le RN, attend tranquillement la prochaine échéance qu'il devrait gagner si un ressaisissement ne s'opère pour évacuer tout ce cirque et organiser de vrais débats dont l'issue ne serait pas faussée par la perspective de la Présidentielle mais réellement focalisée sur le sauvetage d'un pays dont la dette est de 110% du PIB, le déficit à 5,5% ,  les services publics en capilotade et la société plus fracturée que jamais. Pendant que la gauche s'écharpe, Attal, ministre démissionnaire, président nouvellement élu du groupe Renaissance, manoeuvre pour apparaître le sauveur de la situation.  

En attendant, je vais aller au Salon du livre de Royan. L'occasion pour moi de revenir sur mes terres d'enfance 

Peut être une image de texte

 J'espérais y revoir une amie d'enfance. Hélas, j'ai appris qu'elle vient de mourir le premier juillet. Triste.

Mais j'ai rendez-vous avec une amie commune, nous évoquerons sa mémoire en dégustant un verre dans ce café du bord de mer qui fait partie des incontournables quand je vais à Royan, ou plutôt Pontaillac.




vendredi 28 juin 2024

« S’opposer sans se massacrer »

Cette formule est la proposition de Mauss,  citée dans un intéressant article de Philippe Chanial dédié à la situation actuelle en France où nous sommes au bord du volcan.

Réinventer un narratif, voilà tout l'enjeu. Eviter de rabâcher les mêmes antiennes qui n'ont abouti qu'à la désillusion. Cesser de faire croire qu'on peut  sortir du chapeau des milliards compensatoires à toutes les frustrations, les indignités, les désolations qu'un système résolument dissolu a engendré. Mais plutôt rétablir les solidarités anciennes qui se sont dissoutes dans l'absurde impératif de compétition. Cesser de faire rimer décroissance et frustrations, sobriété énergétique et retour à la bougie. Pour contrecarrer les dégâts de l'hubris qui a débouché sur un gâchis des ressources et des humains, revoir quels sont les besoins élémentaires que tout Etat doit garantir - car c'est son seul rôle légitime-. Supprimer la cheffaillerie et encourager la créativité et l'autonomie tout en soutenant la coopération des êtres entre eux. Mais bien-sûr nos grands prédateurs ne sont pas prêts à lacher prise et sont  à la manoeuvre avec les médias qu'ils possèdent majoritairement. Les égos sont sur les starting blocks et "le gendre idéal" se pavanne sans vergogne, il s'y croit comme on dit. Allons-nous pouvoir conjurer cette calamité ? Examiner la carte du vote aux européennes n'est pas très encourageant. La propagande honteuse du camp de la droite ( l'antisémitisme supposé de LFI) et le tapis rouge déroulé sous les pieds du jeune coq non plus. 

Trouvé sur le net, une illustration humoristique d'une ineptie répétée comme un mantra

Je viens de lire le dernier livre de Jean Paul Dubois, "L'origine des larmes". Un homme tire deux balles dans la tête de son père alors qu'il est déjà mort. Ce meurtre qui n'en est pas un est sanctionné par une obligation de suivi psychiatrique. Le livre est construit sur les séances (autant de chapitres ) qui nous font entrer dans le passé de Paul  Sorensen et les légitimes raisons de sa détestation du père, un vrai pourri. Il y a la maestria de l'écriture de JPD et ses formules sarcastiques. Le personnage est un homme qui n'a jamais commencé à vivre, dont l'élan vital a été broyé par un père odieux. Paul est à la tête d'une entreprise de housses mortuaires héritage de sa mère d'adoption (sa mère biologique est morte à sa naissance en même temps que son frère jumeau) qu'elle a réussi à préserver de la prédation du père. Paul fait commerce de la mort, ça nous vaut quelques belles pages sur l'industrie en question. Il est lui-même un peu tenté de s'y rendre mais au final il se trouve une porte de sortie que je ne saurais dévoiler ici. L'ironie et la mélancolie de JPD à son plus haut degré.  

 


J'ai eu envie de relire à la suite "Une vie française ". Le père est au contraire un être doux et la mélancolie est son tempo de fond après la mort du premier fils qui manque aussi terriblement au second. J'aime retrouver des références que je partage avec JPD, nous sommes de la même génération. Et avons visiblement les mêmes goûts et dégoûts, ces derniers notamment des grimaces de la scène sociale, de l'arrogance des petis princes et du mauvais sort fait à ceux qui ne cherchent pas à briller à tout prix . Je ne sais pas ce qui relève de l'autobiographie dans ce roman, il dit lui-même que toute écriture est nourrie de l'expérience de l'écrivain quelle qu'en soit la transfiguration, mais il se raconte des années 50 (date de sa naissance)  au 21ème siècle en découpant son livre au rythme de la succession des présidents de la 5ème République. Cette fois, Paul est amoureux puis marié, puis père, avec une femme hyperactive tandis que lui se coule sans  déplaisir dans les tâches du quotidien (qu'il valorise au passage). Il devient soudainement célèbre et riche sans l'avoir recherché accédant ainsi au luxe, non des possessions -sa femme se charge de le prier d'investir dans une maison luxueuse- mais de ce vrai luxe qu'est le temps disponible, libre. Jean Paul Dubois dans une interview revendique un droit à la paresse, l'oisiveté heureuse -ou pas - mais débarrassé des l'assignation à produire   On suit ses démélés avec l'inéluctable du couple qui se délite par divergence d'aspirations et de points de vue.  Une vie parmi d'autres incroyablement banale et cependant empreinte de toutes les fluctuations d'esprit et de corps d'un humain qui s'affronte à la difficile affaire de durer. 

J'aime l'homme et j'aime l'écrivain. Il était présent au Marathon des mots ce mercredi et je n'ai pu obtenir une place pour aller à sa rencontre. Grosse frustration.      

Quelques bribes sur mes récentes pérégrinations.

Metz où j'ai découvert les vitraux extraordinaires de la cathédrale  Saint Etienne  6500 metres carrés de surface vitrée, dont ceux conçus par Chagall.

 

Metz a son Beaubourg dont l'architecture est visible de l'intérieur


Sa gare est particulièrement riche du fait de son passé allemand, l'empereur aimait y séjourner et est intervenu dans la réalisation à divers moments de sa construction. Une architecture controversée mais dont la générosité est inattendue dans une gare 


 


En 2021 une statue grandeur nature de Charles De Gaulle a parachevé la reprise en main de la gare, marquée par son antéroiorité dans l'empire rhénan, avec gravée sur son socle « Metz a été martyrisée, torturée, déchirée. Mais pas une minute, Metz n'a renoncé à la France », visite du à Metz »

En mai la Moselle était en crue. Les étudiants de cette ville bénéficient d'un campus très agréable et rejoignent leur université grâce à une navette fluviale, qui ne circulait plus depuis quelques temps, la rivière n'étant plus navigable.

 

A Genève, en juin, on pouvait se baigner dans le Rhône. Je ne m'y suis pas risquée, mais nos collègues de l'Est se sont empressés de prendre un peu de temps pour le faire. Il faut dire que la clarté des eaux y invitait


Nous avons visité MACO une recyclerie qui comportait plusieurs ateliers, un entrepot dédié à la récupération de matériaux de toute sorte, notamment les décors de tournage de cinéma et la démolition de batiments,  un fab lab, un lieu de location d'objets de la vie quotidienne, de troc de vêtements, etc. Le principe : ne rien envoyer à la déchetterie, revaloriser tout ce qui peut l'être.




Il y avait le 14 juin une mobilisation commémorative de la plus grande grève générale  des femmes en juin 1991. A 15h 24, chacune est invitée à pousser le cri de l'égalité. Ce timing est calculé comme étant le moment où les femmes commencent à travailler gratuitement. En France on compte en mois, c'est à partir du 6 novembre. Illustration de l'inégalité salariale 

 

Nous avons fièrement accepté de brandir une des banderoles

 Nous étions accueillis dans un espace collaboratif,
une coopérative d'habitants où se sont déroulées nos séances de travail.


Et bien sûr nous ne manquons jamais les temps de bonne chère, favorisant  indiscutablement bonne humeur et liens d'amitié


 Et nous en avons bien besoin!


 

samedi 18 mai 2024

Comment sortir du Labyrinthe des égarés

 

« Ce qui importe pour un citoyen, c’est son comportement dans la cité, pas ses préférences métaphysiques. » Confucius 

J'ai retenu cette pensée pour introduire mon propos au cours d'une intervention dans l'ESCA (European Space for alternatives un regroupement de plusieurs organismes activistes pour la paix.

 Hébergé au sein de la Friche de mai, cependant éclaté dans plusieurs lieux, j'ai eu du mal à évaluer sa fréquentation.

En revanche, une occasion de revoir Marseille et d'entendre la suite des évènements de  la rue d'Aubagne, par un de celleux qui se bagarrent pour que les habitant.e.s soient relogé.e.s dignement et que les immeubles dangereux soient réhabilités sans être vendus à l'encan comme cela s'est beaucoup produit  Le dossier est loin d'être refermé, plus de cinq ans après l'effondrement des immeubles,  alors qu'un nouvel accident s'est produit le 9 avril dernier à  0h46, au 17 rue de Tivoli. Il semblerait que ce ne soit pas la vétusté qui soit en cause mais une explosion au gaz.

 A Marseille la pluie était dissuasive pour la promenade mais j'ai pu faire une petite visite au MUCEM sans avoir le temps de faire mieux que contempler la mer au travers des claustras 

 

 

Le texte en exergue est cité par Amin Malouf dans son livre formidable, Le labyrinthe des égarés : l'Occident et ses adversaires*essentiel récapitulatif des événements politiques qui ont conduit le monde à l'état dangereusement explosif où il se trouve actuellement. Il retraçe "l'itinéraire de quatre grandes nations : d'abord le Japon de l'ère Meiji, qui fut le premier pays d'Asie à défier la suprématie des nations « blanches », et dont la modernisation accélérée fascina l'humanité entière, notamment les autres pays d'Orient, qui tous rêvèrent de l'imiter ; puis la Russie soviétique, qui constitua, pendant trois-quarts de siècle, une formidable menace pour l'Occident, son système et ses valeurs, avant de s'effondrer ; ensuite la Chine, qui représente en ce vingt-et-unième siècle, par son développement économique, par son poids démographique et par l'idéologie de ses dirigeants, le principal défi à la suprématie de l'Occident ; et enfin les Etats-Unis, qui ont tenu tête à chacun des trois « challengers », et qui sont devenus, au fil des guerres, le chef suprême de l'Occident et la première superpuissance planétaire.  

 Le labyrinthe des égarés : l'Occident et ses adversaires

Puissante réflexion adossée à une connaissance impressionnante de l'histoire politique du dernier siècle. 

A la suite j'ai lu "Nos frères inattendus "un roman sous forme de dystopie à la fois effrayant et amusant, du moins le sujet est-il inquiétant et le traitement ironique et plutôt joyeux même si le fond du propos est la menace nucléaire.  La couverture est d'ailleurs dans l'esprit du livre. 

Nos frères inattendus

Je n'avais pas encore évoqué le livre de Chloé Delaume ou plutôt le livre collectif "Sororité", terme réintroduit après un long purgatoire pour désigner la faternité conjuguée au féminin, un rapport de femme à femme, indéfectible et solidaire. Rabelais l'avait exhumé de son emploi religieux au XVIè siècle  mais il est resté relégué par le patriarcat jusqu'à sa réhabilitation dans les années 70 puis sa disparition à nouveau. Il semble qu'il prenne enfin toute sa dimension. Il aura fallu toutes ces années pour que les femmes découvrent qu'on occultait le terme au prétexte qu'il était impensable de prêter aux femmes une quelconque capacité à entretenir avec d'autres femmes une relation dénuée de rivalité. Peu à peu le système de domination est mis à nu avec des termes qui nous viennent d'outre atlantique  "manterrupting"le fait qu'un homme coupe la parole sans raison à une femme, "mansplaining" le fait qu'un homme explique à une femme ce qu'elle sait mieux que lui, "manspreading" le fait qu'un homme écarte les jambes dans les transports en prenant toute la place, biopropriating, le fait qu'un homme s'empare des idées et des inventions d'une femme en laissant croire qu'il en est l'auteur.

La mise en concurrence des femmes est orchestrée. Pour en déjouer les incidences il faut traquer les chausse-trappes qui nous conduisent à adopter à l'égard de nos alliées naturelles des stratégies de rivalité.C'est une démarche consciente, une éthique de vie qui nécessite empathie, ouverture et confiance, à rebours de ce qui nous a jusqu'ici formatées.

"Cet ouvrage collectif est un geste sororal.  Ici quatorze femmes se penchent sur le sujet (...) racontent, interrogent, explorent ce qui constitue pour elles ce lien si particulier." (Chloé Delaume dans son introduction).

Sororité 

Un outil pour reconstruire l'humanité en reparant l'amputation d'une moitié d'elle-même  qu'elle a subi au cours de ces siècles d'obscurantisme religieux et patriarcal .

Un petit tour au pays basque espagnol avant de se quitter

La plage de Zarautz

 

L'ancêtre du home cinéma ( Musée de la photographie à Zarautz)

La Kontcha de San Sebastian vue du Mont Igueldo (par le funiculaire)

Les coiffes qui désignaient l'appartenance à un métier, une confrérie

Au musée, on trouvait aussi le solex

Santilliana del Mar,  

 

La Collégiale romane Sainte Julienne

Ce n'était qu'une petite escapade , il faisait froid et il pleuvait de temps à autre. San Sebastian est une ville animée. Nous avons mangé des pintxos dans la vieille ville bien-sûr, exploré le Musée San Telmos et approché ainsi, un peu, la culture basque. J'ai pu tremper mes pieds dans l'océan, mais ne serait pas allée au-delà, le maillot est resté dans la valise. Nous sommes passés à Guernica ( Gernika-Lumo en basque), visite éprouvante, en particulier la séquence où, enfermés dans une pièce sombre, nous vivons la simulation d'un bombardement. Le musée de Guernica est consacré à la paix et une série de photos présente des épisodes célèbres de réconciliation.   Le récit des réfugiés du camp de Gurz  et la honte qu'on éprouve en tant que Français.e pour les traitements inhumains infligés. Plus loin, la plage de Bakio était noyée de brume et nous avons renoncé au Sanctuaire de Gaztelugatxe. Nous étions préparé.e.s aux 241 marches qui y mènent, mais la queue pour le droit d'entrée et la contemplation de  la déambulation de la cohorte tout le long de l'ascension nous en a dissuadé.e.s, (évitant peut-être l'arrêt cardiaque en cours de route). 

Nous avons visité la Grotte d'Altamira à Santilliana del Mar dont les peintures rupestres sont reconstituées comme celles de la grotte Chauvet. Le village est conservé en grande partie dans son architecture médiévale. Nous avons déambulé dans les petites rues  Mais d'où vient que j'ai de plus en plus de mal à visiter les lieux "préparés" pour le tourisme? 

 * (Grasset Et Fasquelle