samedi 30 janvier 2010

Avis de travaux en cours


Je ne sais pour quelle raison, la majeure partie de ma liste de blogs a disparu. Aussi, cher lecteur, si par hasard tu n'as pas été restauré à la place où tu te retrouvais, ici à droite parce que tu es toi-même un de ces fous qui confie à l'électronique la mission de garder en mémoire tes élucubrations, pardonne à ma lenteur, signales-toi d'un petit commentaire amical et ainsi, te rappelant à moi, tu me permettras de gagner du temps pour rechercher ton URL et te réinstaller dans mes chouchous. En allant glaner chez ceux avec qui je sais partager quelques signatures, j'en découvre que je n'avais pas encore pris la peine de d'explorer. J'en ferai une petite liste demain dans le vent des blogs. Et voilà ma thématique toute trouvée. Merci blogger d'avoir ratatiné une lente accumulation. j'aurais ainsi eu l'occasion de renouveler un brin mes pérégrinations bloguesques. Mais j'aimerais autant que cela ne se reproduise plus.

mercredi 27 janvier 2010

Forgeronne, nous voilà !


Cette nuit j'ai fait un rêve étrange. Tous les rêves sont étranges, c'est entendu. Cependant, la visite, nuitamment, de personnages de la blogosphère, pour moi, c'est une première.
Or donc je rendais visite à la Forgeronne, une de mes blogueuses chéries que je fréquente le plus assidument et que je m'apprête à rencontrer en chair (hum!) et en os ( mouais.).
Je me présentais à sa porte, portant une casserole remplie d'eau chaude destinée à lui préparer un bon petit thé. Je m'introduisais incognito, sans dévoiler mon identité, du moins celle validée par mon IP, carte d'identité au pays des blogueurs.
Or, à sa porte, se tenait une sorte de mendiant, la tête rentrée dans une attitude de honte et de contrition, celle que j'avais découverte avec stupéfaction chez les mendiants du pont Charles V à Prague. Sous cette attitude faussement contrite se dissimulait un sourire ironique et le mendiant se faufilait à ma suite quand je pénétrais dans l'antre de la Forgeronne. Il y avait beaucoup de monde qui évoluait dans une lumière légèrement rougeoyante, non pas celle de la forge, mais d'un bouge relativement paisible. Comme je cherchais à me rendre utile avec mon eau chaude, je marmonnais quelques mots qui permettaient à ma forgeronne de s'extasier. Comment? c'était donc moi ? Quelle surprise ? Cependant elle ne s'attardait pas, réclamée par d'autres qui la sollicitaient et elle m'apparaissait de dos, une taille d'une exceptionnelle minceur, un large pantalon de cuir (à la manière des cow boys du grand Ouest) dont les jambières fendues laissaient voir ses cuisses et ses mollets dans le mouvement lourd du cuir. Ses cheveux étaient remontés en un chignon serré et foutraque dont quelques mêches s'échappaient. Soudain surgissait un type à la crinière péroxydée qui manifestait bruyamment sa surprise de me rencontrer après tant d'années et s'engageait dans une enquête sur les membres de mon passé. Etaient-ils toujours vivants, mes amours, mes amis. Il citait des noms et j'étais dans l'embarras, ne sachant que lui répondre et m'engluant dans un malaise grandissant. Cet anonymat que j'avais souhaité préserver, était brutalement mis à mal. La forgeronne, elle, n'était plus dans le champ (dans le chant) du rêve, mais elle demeurait ce témoin d'une mise à nu.

dimanche 24 janvier 2010

Le vent des blogs 44. Allumer une chandelle dans l'obscurité



Urgence Haiti. Je lui ai promis, je relaie la suggestion de Doulidelle, elle fait un récapitulatif des façons de venir en aide à Haïti pas seulement en France, mais en Belgique, en Suisse. C'est vous qui voyez. « Mieux vaut allumer une chandelle dans l’obscurité que maudire l’obscurité » disait Confucius.
Haïti également, Chantal Serrière rend hommage à Jacques Roumain et à son ouvrage publié après sa mort sous ce beau titre Gouverneurs de rosée. En 1937, il dénonçait le massacre des paysans haïtiens qui se trouvaient du côté dominicain ordonné par le dictateur Raphaël Trujillo pour "améliorer la race" de son pays. Suite chez Chantal Serrière.

Continuons dans le grave : un réalisateur inquiété pour délit de solidarité (n'existe pas disent les officiels, mais si, quand même, disent les officieux). Lui, en tout cas, plaide coupable.

Moins grave, mais très énervant (vous me direz, ce n'est pas la première fois que je m'énerve sur ce motif et Olympe non plus d'ailleurs. Quel motif ? La pub sexiste. Grrr.
Une autre pub mais très marrante et utile celle -là : le préservatif bandant. Si, c'est possible.

Un peu de détente avec les blagues à deux balles et si vous n'en aviez pas assez je vous repasse le Boulet. Attention, gros talent.

Restons dans la drôlerie avec Terry Gilliam. Ce lien m'a été suggéré par mon fiston, (grand chasseur de vidéos et films divers et variés), avec qui j'ai regardé "Lost in la Mancha" de Keith Fulton et Louis Pepe, le making of du tournage avorté du Quichotte que Gilliam a tenté de réaliser en 2001. Il a dû abandonner pour cause de catastrophes à répétition : orage diluvien, hernie discale (double, oui) de Rochefort et autres avaries. Le making of est passionnant, où on voit, en même temps que la formidable inventivité de Terry Gilliam , l'acharnement et l'optimisme forcené du réalisateur qui veut y croire jusqu'au dernier moment.
Neuf ans après le fiasco, il a finalement réussi à récupérer ses droits et il repart à la charge. Si le sort ne s'acharne pas (le Quixote a la réputation d'un maudit, voir Orson Welles), on retrouvera Johnny Depp en Sancho mais Quixote, ce ne sera pas Rochefort et on ne peut que le regretter.


Il a cette majesté accompagnée de folie douce du chevalier à la longue figure et avant que la hernie ne le terrasse, il avait fière allure sur son destrier.
Sortie de "L'homme qui tua Don Quixote" prévue en 2011, si...

Pour conclure, un peu de poésie : un poème, une expérience poètique, une revue électronique où on retrouvera certaines de nos connaissances Anna de Sandre, Frasby, Cathy Garcia, à vous de feuilleter et de découvrir les riches heures de Chos'e n°2.

Topor était à l'affiche dans mon dernier post, je redouble mon petit hommage : la planète sauvage, réalisé par René Laloux, à partir de dessins de Topor. Une belle métaphore sur l'esclavage. Là, ce sont les hommes qui sont traités comme des animaux, sauvages ou de compagnie, par des êtres "supérieurs"

Les artistes allument pour nous ces lumignons qui luttent contre l'obscurité des temps.

vendredi 22 janvier 2010

S'il n'en reste qu'un, comment se reproduira-t-il ?


Cliquez sur le texte pour lire confortablement

Retrouvé ce jour dans une archive et remis en jambes pour quelques heures de partage : découverte pour ceux qui ne le connaissaient pas (le texte), clin d'œil pour les autres. Spéciale dédicace à Christophe Borhen qui aime les questionnaires.
Merci Topor

mercredi 20 janvier 2010

Entretien de débauche


- Puisque vous postulez pour entrer dans notre Société, permettez-moi quelques conseils utiles pour vous éviter les impasses et les chausse-trappes.
- Vous êtes bien aimable.
- Je remplis mon rôle du mieux que je peux.
- C'est très honorable.
- Merci. Donc je vous fournirai un vade-mecum rassemblant les éléments essentiels, ordonnés selon leur importance à l'heure où je vous parle, car chaque minute, que dis-je seconde, micro milliardième de seconde introduit des changements qui ne sont pas perceptibles dans l'instant, vous comprenez?
- J'essaie mais un brin d'explication ne nuirait pas.
- Notre Société a mis au point un système de réactivité à l'actualisation des données, néanmoins certaines lourdeurs persistent.
- On peut l'imaginer.
- Ces lourdeurs sont dues à l'imperfection des filtres qui perdure entre la vitesse de la lumière et la lenteur de la matière.
- La vitesse de la lumière, c'est clair pour moi, la lourdeur de la matière c'est une évidence, les filtres, ça m'échappe, les filtres ?
- Monsieur, soyez conscient que vous êtes un vecteur d'énergie. C'est en vous que se joue l'équation et vous devez la résoudre. Vous avez été engagé pour ça. Vous êtes un filtre. Pardon, mais c'est le terme.
- Un filtre !?
- Vous êtes une matière poreuse. Vous fixez ou ne fixez pas certaines émanations. Vos appétits et vos dégoûts sont des vecteurs de conduction. Nous vous avons choisi pour cela. C'est ce qu'on dénomme "compétence".
Bien entendu, vous serez inlassablement reformaté pour continuer à conduire notre fluide énergie. Toute entrave à la fluidité des flux déclenche un signal d'alarme. Les circonstances sont considérées -éventuellement- mais le plus souvent jugées inacceptables et donnent lieu à un licenciement immédiat et sans appel. Vous comprenez pourquoi je dois vous transmettre les règles de bonne fluidité pour que vous puissiez opérer en toute sérénité.
- Sérénité ? "Matière poreuse" et "licenciement sans appel" prédisposent mal, excusez-moi! Je veux bien mettre à l'essai ma modeste personne, puis-je cependant examiner vos principes.
- Volontiers, mais si cela vous était familier, faites comme dans l'avion quand on écoute les préconisations qu'on a déjà mille fois entendues.
- D'autant qu'on n'ignore pas qu'il n'y a pas de parachute, seulement une bouée, utile à la seule condition de sombrer en douceur dans un océan par temps calme.
- Revenons à notre règlement intérieur, voulez-vous ?
- Ah, oui, intérieur.
- La Société à laquelle vous appartiendrez, si votre période d'essai nous donne satisfaction, mise sur le dynamisme, un concept de mouvement ascendant. Est dynamique ce qui génère du déplacement, financier cela va de soi, vers des sommets et des records synonymes de toute puissance.
Principe premier: il n'y a de richesse que selon une appréciation monétaire, censée transmuter de la matière en immatériel et réciproquement. Notez bien le "réciproquement", c'est l'aller-retour incessant qui est dynamique.
Etre riche c'est posséder par le biais de comptes en banque un morceau de la planète. Plus on possède de morceaux en direct ou en différé plus on peut en acquérir de nouveaux c'est ce que nous nommons l'ascension. Cette fructification échoit aux meilleurs concocteurs de flux. Vous avez été recruté pour être un technicien opérateur de réseau de circulation. Votre rôle est de faciliter la fluidité.
- Oui, que ça circule.
- Bien, vous avez compris. Ce qui circule vers où, pourquoi, pour quoi faire ne vous concerne pas. Vous n'avez ni le droit, ni le pouvoir d'en décider. Votre devoir est d'examiner les courbes et d'agir en fonction d'une logique et d'une seule, l'accumulation. C'est en chiffres purs que vos services sont évalués.
Principe second : le débat sur les finalités n'est pas admis dans notre communauté. La mesure du compte en banque est la seule issue qui doit mobiliser votre vigilance. L'horizon étant une abstraction fallacieuse, sachez que nos intérêts immédiats sont confondus avec le long terme. Nous devons donc être intraitables, avoir une longueur d'avance et de toute façon le dernier mot.
Cela ne nous empêche pas d'être informés sur les drames de l'humanité, celle qui ne ressortit pas de notre Société.
- C'est tout de même une écrasante majorité, c'est un peu regrettable, non ?
- Pas du tout. Notre Société entretient des liens fort actifs, bref dynamiques avec plusieurs autres. Nos relations vont du local à l'international avec tous les échelons intermédiaires nécessaires. C'est nous qui faisons tourner le monde, ne vous y trompez pas. Nous sommes les grands ordonnateurs de la planète et les premiers présents en cas de catastrophe. Pourquoi croyez vous que nous organisons des levées de fonds ? Pour remettre en route les flux. Que ça circule. Pour les morts, on ne peut rien, mais pour les vivants tout est à reconstruire. Croyez-moi, s'il est exact que les populations souffrent, les fluidités elles, circulent, les courbes atteignent des apogées.
Bien, quand commencez-vous ?
- Je vais prendre un temps de réflexion.
- Je crains, dans ce cas, que vous ne puissiez prétendre à entrer dans notre Société.

Illustration Daumier

dimanche 17 janvier 2010

Le vent des blogs 43. De la métamorphose.




Yves est écrivain, puisqu'il ne pourrait écrire sans honte « infinie tendresse», « fusiller du regard », ou « éperdument amoureux ». De temps à autre « sommeil pesant », « traverser l'existence », « griffonner à la hâte» lui échappent. Décelant le cliché après publication, il s'en désole. Il place souvent des virgules inutiles, aussi, qu'il extermine ensuite impitoyablement. Il a trop lu pour ne pas savoir qu'écrire bien, c'est écrire mal, comme disait l'autre. Il voudrait que toute phrase lui échappe, le surprenne, que cette surprise ne s'affadisse jamais. Il se relit, s'exaspère de retrouver ses tics d'écriture. Alors, il efface la sonorité séduisante, la tournure élégante, il traque le pléonasme littéraire, détruit le rythme ternaire qui lui vient inconsciemment. Parfois, du premier jet, il ne reste rien, sinon une simple ossature. Giacometti, pour saisir le noyau de la vie, ôtait sans cesse la glaise autour du fil de fer. La langue que triture Yves Janvier est son ennemie, il la sait trop exotique et trop intime. Ses mots tentent de peindre le réel, comme des dallesrecouvrent une cour de terre battue: mais ici, là., l'herbe rebelle s'échappe. Toujours il pourrait raturer, reprendre. Il cherche le miracle, la grâce absolue, et ne la ressent que chez les autres. Il ignore si l'insatisfaction est la preuve de l'artiste. Hervé Le Tellier Assez Parlé d'amour. JC Lattès, p 54.

Un vent des blogs anémique pour cause de tête ailleurs.

Pour ne pas laisser le visiteur sur sa faim j'ai sélectionné quelques blogs qui ont eux-mêmes adopté la compilation.

Harmonia, tiens, qui m'a fait le plaisir d'une visite et de ce fait m'a donné l'envie de lui rendre la politesse. Bien m'en a pris, comme vous le constaterez, c'est un peu étouffe-chrétien, mais on peut consommer par tranches et c'est roboratif.

Je lui emprunte également un de ses commentaires adressé à l'ami Dexter.

"Tenez, je vous livre cela, exergue du bouquin de Michéa "Orwell éducateur".

"Etre humain consiste essentiellement à ne pas rechercher la perfection, à être parfois prêt à commettre des péchés par loyauté, à ne pas pousser l'ascétisme jusqu'au point où il rendrait les relations amicales impossibles, et à accepter finalement d'être vaincu et brisé par la vie, ce qui est le prix inévitable de l'amour que l'on porte à d'autres individus. Sans doute l'alcool, le tabac et le reste sont-ils des choses dont un saint doit se garder, mais la sainteté est elle-même quelque chose dont les êtres humains doivent se garder." Orwell, 1949.

Ca me va assez bien (là c'est moi qui commente). Où ai-je lu quelque chose comme (je cite approximativement) : "ceux qui donnent des leçons sont ceux là même qui les transgressent le plus férocement. ". A rapprocher d'une formule que j'utilise souvent (Christophe Bohren, where are you ?)"les héros sont fatigants".

Les assauts de compassion dégoulinante (ça ne serait pas un cliché par hasard ?) qu'on nous inflige en ce moment entrent parfaitement dans ce tableau. Entendu ce matin que des tennismen ont donné une représentation "très marrante" à Melbourne, ils se sont bien amusés (dixit Roger Federer), le produit de leur prestation ira "naturellement" à la rescousse des Haïtiens, du moins ceux qui ne sont pas partis par tombereaux dans les fosses communes creusées pour absorber tous ces tas de morts.

Mieux vaut sur la question des horreurs subies dans les Caraïbes lire l'ami charbinois, il fait parler les chiffres. C'est éloquent.

Reconnaissons qu'en ces temps sombres un peu d'optimisme ne nuit pas. Edgar Morin propose d'échanger l'appel à la révolution (elle présente l'inconvénient de mettre à bas ce qui précédait et par là-même inaugure les temps nouveaux par un nombre consistant de crimes et d'exactions ternissant d'emblée la lumière des aubes nouvelles), contre un éloge de la métamorphose

L'idée de métamorphose, plus riche que l'idée de révolution, en garde la radicalité transformatrice, mais la lie à la conservation (de la vie, de l'héritage des cultures). (...)

Aujourd'hui, tout est à repenser. Tout est à recommencer.

Tout en fait a recommencé, mais sans qu'on le sache. Nous en sommes au stade de commencements, modestes, invisibles, marginaux, dispersés. Car il existe déjà, sur tous les continents, un bouillonnement créatif, une multitude d'initiatives locales, dans le sens de la régénération économique, ou sociale, ou politique, ou cognitive, ou éducationnelle, ou éthique, ou de la réforme de vie.

Ce n'est qu'un début, continuons la métamorphose! Evidemment ça fait moins martial.

Avant de refermer ce billet, vous faire partager un OVNI (objet vidéo non identifié). J'en dois la découverte à Mon Chien grand distributeur de liens dont je fais (ou non ) mon miel,(ainsi vous éviterai-je Mexico, Mexi i cooooo!).

Allez, je vais me replonger dans le livre de Le Tellier qui parle d'amour mais aussi des brontosaures et des taches de Fuchs. Vous voyez qui c'est Le Tellier ? Un des Papous, oulipien de surcroît. Restons exotique.

Photos De la métamorphose des flocons ZL

vendredi 15 janvier 2010

Déracinez avec moi l'arbre de l'esclavage.

Forteresse de la paix - Préfète Duffaut

Les propos de Toussaint Louverture dans sa déclaration du 29 août 1793 résonne (raisonne ?) terriblement en ces jours de misère superlative endurée par le peuple haïtien. C'est au sujet d'Haïti que j'entendis pour la première fois parler de mères nourrissant leurs enfants de galettes de terre. Je ne connais pas Haïti mais je suis allée en Jamaîque juste après le passage du cyclone Gilbert qui avait dévasté l'île. Cela faisait deux mois que le vent soufflant à quelques 300 km/ heure avait commis ses ravages et les scènes étaient encore apocalyptiques à certains endroits avec notamment des arbres géants qui avaient basculé en éviscérant le sol et en exhibant des racines hautes comme des immeubles. Le cyclone avait tué beaucoup de gens et la plupart des réseaux avaient été endommagés. J'étais arrivée à Kingston en même temps qu'une équipe de malabars dépêchée par les Etats Unis pour remettre en état les infrastructures. Mais le désastre n'avait rien de comparable à celui qui vient de s'abattre sur Haïti. Le cyclone avait traité les cahutes comme fétus de paille mais les immeubles plus solides avaient résisté et le gouvernement avait pu continué à fonctionner et coordonner l'aide internationale.
La situation telle qu'elle apparaît en Haïti est au-delà de l'imaginable. Cette misérable communauté n'a pas connu de répit depuis que les peuples de la Caraïbe ont eu affaire à ce cher Christophe, puis aux Anglais, Français et autres pirates, filous qui y installaient leurs bases de repli, de trafic, y transplantaient des Noirs (le père de Toussaint originaire du Dahomey). Cette maigre population (moins de 10 millions) dont un tiers dit-on vient d'être soit ensevelie, soit blessée, dépossédée, anéantie de douleur, hagarde et affamée, aura subi sans discontinuer les pires régimes de terreur, le pillage, la corruption, la dévastation de ses terres.
Tout cela est bien connu et en même temps ignoré, tenu en lisière des fondamentaux de la pensée internationale.
J'écoutais ce matin Régis Debré faire état des préconisations que la commission qu'il avait présidée avait émises et qui étaient restées, sans surprise, lettre morte. (Haïti et la France, rapport à Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, Editions de La Table ronde, 2004). Gageons que notre Sarkoman après un petit tour de piste rangera aux oubliettes ce territoire minuscule et sans grand intérêt stratégique désormais.
Comment imaginer qu'un pays déjà si indigent puisse se relever d'une telle catastrophe.
On envoie en même temps que l'aide alimentaire des garnisons pour en sécuriser l'acheminement. Il ne s'agit pas de la force onusienne, mais encore une fois de troupes américaines qui décidément sont à ce point pléthoriques qu'elles se trouvent toujours les premières sur tous les fronts (en même temps ou juste à la suite des caméras de télévision).
Pourtant les Yankees ne sont pas particulièrement chers au coeur des Haïtiens qu'ils ont tenu sous le joug d'une occupation directe de 1915 à 1934. Est-ce bien raisonnable ?
Non, on peut craindre, une fois encore, qu'à la suite du tremblement de terre, ce ne soit pas la félicité qui s'installe en Haïti.

On est vraiment mort quand il n'y a personne pour se rappeler notre nom sur cette terre. Dany Lafferrière.

Illustration Forteresse de la paix, par Préfète Duffaut (1977). Collection de Michel Monnin (Galerie Monnin).