d'autant qu'il a une petite mine ce Prez
Prenez garde, à la jeune garde qui descend sur le pavé !
Roooh non! Plutôt mourir!
Ne pas leur donner d'idées malsaines siou' plait
Hem!
Photos , encore merci à FL de m'avoir prêté ses pieds et son oeil.
Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais beaucoup de blogs ont cessé d'émettre. Pour ne citer que ceux que je fréquentais régulièrement Clopine, Dexter, Montaigne à Cheval, Manu Causse, se sont tus (momentanément ou pas ?) Cactus clignote de temps à autre.
Bertrand Redonnet, part s'occuper de la mise en scène d'un de ses textes, Georges Flipo n'écrit plus parce qu'il écrit (sic),
Stéphane Beau est encore fidèle au poste et pose une question qui me taraude aussi : pourquoi Nicolas Sarkozy inspire-t-il à ce point les auteurs de fictions ? En effet, que ne le laisse-t-on
dans l'ombre d'où il n'aurait jamais dû sortir.
Le manchot tire le rideau. Comme il laisse à consultation ses archives j'en ai récupéré une que je vous donne à savourer avec en préambule un extrait de l'ouvrage : J'ai remarqué très tôt, trop tôt peut-être, que le travail c'est surtout de la fatigue (...)
« Et c’est ici, je crois, que je devins dangereux pour les affameurs… »
Chapardeur, roulottier, casseur, flambeur, braqueur, titulaire de quelques séjours en prison et d’une balle dans le ventre, Alexandre Dumal, dans son récit autobiographique, narre avec beaucoup de limpidité la trajectoire d’un jeune homme qui ne veut pas travailler.
Les possédants et les curés seront fâchés que ce jeune homme subisse la prison avec équanimité et qu’elle lui serve de stage de formation pour de nouveaux méfaits.
Les téléspectateurs s’étonneront que la même paisible vaillance donne un ton de simple évidence au récit des exploits et mésaventures de l’auteur.
Et les romanciers seront secrètement outragés de voir que le bandit écrit mieux qu’eux.
Sans doute certains milieux veulent-ils bien accepter les invectives des délinquants d’autrefois, et même de tel criminel plus récent projeté à une raisonnable distance critique par les flics et leurs Manhurin. Mais quand l’auteur est contemporain, vivant, et dit de claires évidences, rien ne va plus. (Ainsi, au temps où Mesrine n’avait pas encore été exécuté sur la voie publique, avait-on généralement pu lire dans la presse que son autobiographie était mensongère et mal écrite.)
Alexandre Dumal, étant contemporain, pas encore trop criblé de balles à l’heure où j’écris ceci, et nullement porté à l’invective lyrique, sera peut-être taxé d’insignifiance par les feuillistes et le reste de la domesticité.
Et tout au contraire, en adoptant naturellement le ton de l’évidence limpide, il est tout à fait scandaleux. Notamment parce qu’il est ainsi de son temps, du nôtre.
Certes il y a une manière d’inscrire les individus dans la « sociologie » d’une période qui n’est que le honteux moyen de dissimuler leur vertu personnelle. Tout de même on rappellera que notre période est une période de pillage généralisé et notoire. Aux exactions sans frein des riches répondent la fauche des pauvres, la reprise collective encore timide pendant les manifestations de rue, les attaques de ce que les policiers appelaient voici quelques années les « nouveaux bandits » (mères de famille braquant les caisses des supermarchés, etc…) Le respect de la propriété privée s’est perdu. Elle n’est plus gardée que par la peur de la police.
Alexandre Dumal est de ce temps. Il a passé par les barricades de Mai 68, mais il avait fait son choix avant, il l’a maintenu après. Et il s’élève au-dessus de ce temps en ayant perdu le respect, mais aussi la peur. Je crois qu’on peut dire que la vertu principale d’Alexandre Dumal est le courage.
Parce qu’il avait le courage, son refus de la misère ordinaire –décidé dès l’enfance- l’a mené haut. Et la clarté de son livre vient de là : elle vient de haut. Pour savoir écrire, il faut savoir vivre.
Certains, qui ne savent ni lire, ni vivre, auront hâte d’oublier ce livre. Qu’ils se dépêchent ! car le refus qui habite ce texte n’a pas fini de revenir, lui aussi, dans la gueule de la servitude.
JEAN-PATRICK MANCHETTE.
Je sais, on pourrait considérer que moi aussi je ne fiche plus rien. Pas faux. (Merci au Manchot et à Manchette du coup de main, si je puis dire).
* Le titre, en hommage à Bernard Clavel qui vient de mourir et dont la disparition n'a semble-t-il guère ému les chroniqueurs.
Photo Retraite aux flambeaux au jardin d'état
J'ajoute ce jour 11/10 10 un lien vers un article d'Alain Sagault, Ah, les braves gens !
Lagrasse est ce petit village situé dans les Corbières, traversé par l'Orbieu où il est toujours possible de se baigner à condition de choisir son heure afin d'éviter les familles et leurs enfants hurlants, les allongés luisant d'huile solaire et de façon générale la vulgarité des vacanciers écramollés.
Ce village est dominé par l' Abbaye Sainte Marie qui abrite d'un côté la communauté des Chanoines Réguliers de la Mère de Dieu, de l'autre, la propriété du Conseil Général de l'Aude mise à disposition de La Maison du Banquet pour l'activité culturelle développée par cette association.
Cette année, Gérard Bobillier, nous le savions, ne viendrait pas s'adosser à un des murs du petit cloitre pour écouter, en fumant son éternelle cigarette, l'orateur de l'heure. Beaucoup d'entre eux lui ont rendu un hommage ému. Bob était un homme intense, exigeant, volontiers violent dans sa verve et son humour. "Il était complètement dans le présent qui va dynamiter l'avenir" dit Martin Rueff dans une émission du 7 octobre 2009 au lendemain de sa mort. Il est vrai que l'aventure éditoriale de Verdier est unique, dans la recherche absolue de la puissance de la langue, portée par un petit groupe de compagnons qui se partageaient toutes les tâches et dont l'objectif n'était certes pas la renommée, la gloire et l'argent. L'histoire de Verdier est à la fois d'une très haute ambition et d'une grande modestie. "L'aménagement d'un espace pour la parole , pas pour la conversation, mais pour ce qui nous force à être plus que nous-mêmes". (Tiphaine Samoyault. Ainsi de ce banquet (le quinzième) dont le thème était Chaque un.
Cette année donc quelques uns des habitués. Patrick Boucheron a magistralement analysé la fresque Allégorie du bon gouvernement peinte par Lorenzetti Ambrogio entre 1337 et 1340 qu'on trouve au Palazzo publico de Sienne : qu'est-ce qu'une cité "bien gouvernée" ? Ce qui est donné à voir c'est une grande tension entre la parade des grands principes et leurs effets sur la vie de chacun. Sur deux fois 14 mêtres, s'opposent deux peintures, l'une montrant des humains vivant une vie paisible, l'autre des gens en proie aux malheurs. Ce qui juge en dernier lieu c'est la réalité des gens qui sont gouvernés avec cette sanction finale : vivre bien, c'est vivre "sansa paura", sans peur. Il semblerait qu'on soit plutôt actuellement dans une tendance inverse. Gwénaëlle Aubry, Stéphane Audeguy, Maryline Desbiolles, Olivier Rolin, Mathieu Riboulet (dont la lecture de ses textes nous a basculés dans l'univers homosexuel dans sa dimension la plus violemment tragique), Gérard Macé (que j'ai découvert avec bonheur), Paul Jorion sur la crise. Bref, de la parole vive. C'était parfois trop, ces discours qui s'enchainaient. Les autres années le cinéma et la musique "allégeaient" le menu.
Une Lolita, souvent accompagnée de semblables nous étaient offerte au regard, placée ainsi en surplomb afin d'enregistrer les orateurs. Il est donc possible de visionner certaines prestations.
Ici, Pennac parle de Bartleby (Melville), du désarroi du notaire devant ce personnage qui s'arrête ("I would prefer not to"), avant de nous en donner lecture, à la nuit tombée. En dépit de nos réticences, (nous en avions parlé au diner avant de tout de même aller l'écouter) nous n'avons pu qu'être profondément secoués par son art de nous insinuer de façon très subtile l'angoisse de passer d'une sorte de comédie ou de farce au drame de la mort du scribe. O' Bartleby ! O' humanité! Ces quelques jours au bord de l'Orbieu, au coeur de ce banquet où se partagent livres et bonnes bouteilles sont le temps béni d'une pause, même si cette année, je me suis trouvée un peu lasse du rituel. Se méfier des habitudes.