samedi 10 janvier 2009

Volontaires de la Paix

Je sais, je n'aurais pas dû. Placer sur le même plan les colonialistes et les résistants, les horribles massacreurs bardés d'engins hyper sophistiqués et les guenilleux usant de leurs pétoires dérisoires qui font à peine quelques trous vite rebouchés. Le combat est inégal, c'est indéniable. C'est le refus d'accorder le droit à une patrie aux Palestiniens qui est la cause de la relance des hostilités. Certes. Mais comment se fait-il que la "communauté internationale" qui sait si bien se mêler des affaires du monde via la Banque mondiale et le FMI, qui s'est si promptement mobilisée lors de la première guerre du Golfe, n'a pas en quarante ans imposé la présence de Casques Bleus, n'a même jamais évoqué la potentialité d'une telle intervention. Comment la Communauté Européenne a-t-elle accepté d'obéir au blocus infligé aux malheureux Gazaouis. Qui empêche l'acheminement de vivres, le parachutage si nécessaire. Comment avons-nous pu accumuler des dons pour le Tsunami au delà même des besoins et rien pour les martyrs de ces enclaves ?
Je sais, je fais la bête, la naïve. Nous assistons impuissants à une nouvelle (ultime ?) hystérie des faucons israéliens soutenus avant son départ (enfin!) par ce calamiteux gouvernement bushique. Dernier feu d'artifice avant de remiser l'attirail ? Il est certain que le monde entier attend d'Obama qu'il adopte une attitude de retrait. Stop war, please, Mister Président! Soyez le premier président américain à introduire dans votre pays et ainsi dans l'orientation spirituelle du monde le dégoût des armes, l'interdit absolu du meurtre sous quelque prétexte. Soyez celui qui donnera à l'Organisation des Nations Unies la latitude de porter haut sa mission et ses buts.
Organisez une armée de dissuasion formée d'un mur vivant de volontaires de la paix. Nous avons un droit d'ingérence absolu ! Ça fait soixante ans que la question israélo -palestinienne nous empoisonne. Créons une fédération de deux Etats, contraints, sous contrôle international de vivre en paix. Et ceux qui ne pourraient le supporter seront priés de s'exiler. Cela semble plus juste que la situation actuelle qui force ceux qui souhaitent vivre normalement à s'extirper de ce bourbier, exportant par là même la haine et le ressentiment.
Oui, oui, naïf ce discours et pourtant il faudra bien que cela advienne et le plus tôt possible.

vendredi 9 janvier 2009

Vagabonder avec Chantal Thomas

Découverte de Chantal Thomas. Je ne m'étais jamais intéressé à cette auteure. Je ne sais pourquoi, elle me semblait appartenir à une catégorie de grande bourgeoise, lettrée certes, mais ennuyeuse. Je découvre une personne avec laquelle je partage des expériences proches : l'océan atlantique et le bonheur de la plage, la mort brutale du père l'année du bac, la transplantation de provinciale à Paris, le plaisir des cafés et même une passion amoureuse pour un homme fascinant mais alcoolique.(Les cafés de la mémoire, Seuil 2008). Je me réjouis du vagabondage comme méthode, de ce collage d'exégèses d'auteurs aimés, de méditation sur l'art de vivre et d'anecdotes tirées de l'expérience d'une vie sans cesse en recherche d'elle-même. J'admire la détermination qui a tenu C T à distance des pièges ordinaires qui réduisent, voire pulvérisent la cavale de la liberté. Seule elle se souhaitait, seule elle est demeurée et on ne trouve trace d'aucun regret. Au contraire, elle traduit sur le mode jubilatoire l'extrême sérénité que confère le commerce avec soi-même lorsqu'il n'est pas vécu comme la punition infligée par le sort mais une victoire gagnée au quotidien pour déjouer ce que la doxa tente de nous faire accroire : la solitude, une tare d'asocial. "Autour de nous, tout tend à nous persuader que la solitude est un handicap, une tare. Une vaste littérature mièvre, débilitante, des tonnes de romans photos entretiennent l'attente de la Rencontre avec Celui ou Celle qui va survenir et changer votre existence". (Chemins de sable, Seuil, Points Essais 2008). A rebours elle appartient au nombre restreint des amoureux du tête-à-tête avec soi-même.
"Etre avec moi-même me plaît. Cette connivence intime ne laisse pas de place à l'ennui. J'ai toujours cru qu'au commencement de l'existence chacun forme avec soi-même une monade idéale, sur laquelle viendront se greffer par la suite des rencontres avec des personnes et des lieux. (...) J'ai une préférence pour les conversations de hasard, les échanges anonymes, entre des "je" incertains, mais résolus à ne pas se fondre dans un groupe.
Elle insiste sur la difficulté pour une femme à faire admettre que sa solitude est librement consentie, y compris lorsque l'amour aurait pu l'incliner à se "fondre" dans la fameuse dyade. "En dépit du mythe platonicien, je ne croyais pas être une moitié en mal de son complément. je refusais confusément toute perspective de dépendance et donc de manque plus ou moins latent dès qu'on aime"
Il est vrai aussi que si on a l'ambition de se consacrer assez exclusivement à l'écriture, par exemple, il est préférable d'éloigner les tâches chronophages au nombre desquelles élever des enfants est un paroxysme. "Rien mieux que l'écriture ne s'accorde au passage, à la non installation. Il suffit de rien pour écrire, d'un coin de table et du fil du temps", d'une chambre à soi et de quelques livres de rente disait Virginia Woolf, mais surtout de temps dédié, de temps inexpugnable .
L'écriture de Chantal Thomas est une perfusion d'optimisme et de plaisir à vivre même lorsqu'elle aborde les thèmes de la douleur (Souffrir, Manuels Payot 2003). "on manque aussi, en voulant se dérober à des souffrances inévitables, le lien essentiel qui unit le courage d'affronter la douleur à l'évènement de la joie, à la seule possibilité d'un rapport au monde entièrement vivant".

jeudi 8 janvier 2009

Bouffes de neige

Neige et verglas. Longue plainte recueillie par les médias de tous ces coincés, contraints d'immobiliser leur véhicule et de dormir dans des abris de fortune. Personne, jamais, ne se réjouit d'un peu d'aventure survenue, de l'excellent prétexte pour abandonner sa routine, de l'occasion fortuite et néanmoins délicieuse de prendre langue avec des inconnus et qui sait de rencontrer sinon l'âme sœur (qui croit encore à cette fable ?) du moins une pétillante et troublante apparition, même fugace, relançant un brin le manège libidinal. Tout est désormais vécu sur le versant tragique. Alors que, à part la mort des SDF tout le reste est dérisoire. Il est quasi indécent d'étaler ces minuscules misères quand on sait qu'ailleurs des êtres sont déchiquetés, affamés, terrorisés. Et les cris d'orfraie des pauvres chéris qui se gèlent un peu le cul entre Aix et Marseille, ça me donne le goût de filer des baffes. Je hais les journalistes et les crétins qui se prêtent à cette gabegie de verbiage. Mais je hais plus encore les fous furieux des deux bords qui ont relancé la machine de guerre, là-bas, du côté du Mont des Oliviers. Je n'ai plus envie de signer quelque pétition que ce soit. Marre! Ceux qui actionnent les rockets et les obus s'en foutent totalement. Je ne veux pas participer davantage à ce rituel : ils s'entretuent, nous nous indignons and so what ?

dimanche 4 janvier 2009

Un ludion nommé Agnès


Agnès s'appelait Arlette, son prénom lui déplaisait, elle en changea. Avant de devenir la Varda, la fille de la Nouvelle Vague, qui gagnait un début de renommée comme cinéaste avec Cléo de 5 à 7, un de ces petits films faits avec trois sous et qui firent le tour du monde. Agnès a quatre vingts balais et s'offre à cette occasion une sorte d'Amarcord à la Varda, aussi drôle et fantaisiste, qui met bout à bout ses souvenirs et son présent avec pour seul fil directeur la grâce de sa photographie, la magie de ses collages et un commentaire sans complaisance pour sa vieillesse (elle se promène en lisière d'un défilé protestataire en arborant une petite pancarte où on peut lire "J'ai mal partout"). Comme elle a été la photographe des années Vilar à Avignon, du temps de Gérard Philippe, Avignon lui a proposé d'organiser une rétrospective en 2007, elle nous fait partager un des rares moments de profonde nostalgie lorsqu'elle dépose des boutons de roses et de bégonias en hommage à tous ses chers disparus. Sinon elle est bien vivante, lovée dans le ventre de la baleine,(un hommage à Bachelard dont elle a eu le bonheur de suivre les cours à la Sorbonne) elle chemine avec et à côté des images dont elle nous livre une abondante moisson entre celles de ses films passés et celles tournées sur ses plages en France ou en Californie où elle revient sur Mur Murs ou rend un bel hommage à un couple de ses amis avec une pointe d'envie, vieillir ensemble, c'était leur projet à Jacquot de Nantes et Agnès .
On visite un peu son royaume rue Daguerre. C'est un souvenir pour moi aussi. Lorsqu'elle préparait son film "L'une chante, l'autre pas", mon amie Pomme et moi avions été photographiées par Agnès et nous figurons ainsi au générique, au titre des portraits de femmes tristes que le photographe suicidaire (dans le film) affichait en vitrine. Ce portrait je n'en avais pas de copie. Mon fils l'a récupéré il y a peu de temps en le repiquant grâce à l'outil magique du net. Nous avions en effet pris l'air le plus sinistre mais nous sommes tout de même dans la splendeur de nos vingt ans.
Les plages d'Agnès ce sont des immuables, le temps n'y a pas de prise. L'eau et le sable ne vieillissent pas eux. Et les films ? Ils vieillissent si on s'en tient à la forme des coiffures, la marque des voitures, le vocabulaire, le ton des voix. Mais ce qu'ils gardent en eux d'incorruptible, c'est la force du désir qui animait leur créateur. Agnès réussit à sauver même les morts-nés en disposant la pellicule telle une toile de tente où la lumière joue au travers du visage de Catherine Deneuve et Michel Picolli ("les créatures"), puisqu'elle a ajouté à ses multiples talents celui de plasticienne.
Ce film n'est pas une autobiographie même s'il nous donne à connaître la mère, les sœurs, les enfants, les petits enfants d'Agnès V, il est une promenade dans un labyrinthe dont nous reconnaissons quelques coursives, dont nous découvrons des pans entiers de perspectives et que nous empruntons à la suite d'une sorte de ludion qui monte et descend sur les vagues de son imagination, n'en fait qu'à sa tête, mélange allègrement les noms, les dates et les références. Etourdissant et délicieux.
Me revient en mémoire le bras d'honneur que le grand-père de Fellini faisait à la mort dans Amarcord. Agnès pour ses quatre vingts balais fait un joli pied de nez à la vieillesse.

Pour aller à la rencontre d'Agnès Varda
http://www.cine-tamaris.com/

Et pour lire une analyse pertinente (comme toujours) Mona Chollet


vendredi 2 janvier 2009

Tribus de l'Omo

http://akwaba-africa.blogspot.com/2008/03/tribus-de-lomo-par-hans-sylvester.html

Sur ce site (dont on retrouve le lien ci-contre) on peut contempler des oeuvres d'art éphémères, les peintures corporelles que réalisent quotidiennement les membres d'une tribu située en Ethiopie
"Au confins de l'Ethiopie , du Kenya et du Soudan la basse vallée de l'Omo est encore un monde perdu . Située dns la basse vallée du Rift , là où fut trouvée Lucy, cette contrée demeure l'une des plus sauvages d'Afrique . Ni esclavage ni colonisation n'ont atteint ces tribus semi nomades qui n'ont connu la "civilisation"qu'à travers des guerres et ses trafics d'armes . La kalachnikov semble être leur seul "bien".
Hélas, c'est par le pire que la "civilisation" les rejoint. Prendre le temps de découvrir ces merveilles puisque nous ne savons plus consacrer le nôtre à la création et à la beauté éphémères.

jeudi 1 janvier 2009

Les noces du Che et de Sainte Utopie

Que disent les augures sur la nouvelle ? Année pourrie ? La bourse, les banques, les braques, tout fout le camp?
J'ai clôturé la précédente en assistant à la projection en avant-première du "Che, l'Argentin" (le film ) proposée par Utopia Toulouse. Ca flingue beaucoup ! Idéal de mecs qui en ont, des "cojones". Et il en fallait. Pas seulement pour se battre contre l'armée de Battista mais pour clamer haut et fort que l'Oncle Sam était le responsable de ces dictatures tortionnaires qui infestaient l'Amérique du Sud, au Panama, au Vénézuela, en Bolivie, à peu près partout dans ces années 50. Comme il n'a pas été possible de les mettre au pas, à genoux, (dans le film, le Che remercie le délégué américain des Nations Unies pour l'épisode de la Baie des cochons, le meilleur moyen de souder un peuple), cinquante ans de blocus imposé par les Etats Unis, appliqué par les "démocraties européennes", le meilleur moyen de les envoyer dans les bras des Rouges . En dépit des dérives d'un régime réduit à la crispation sur une paranoïa pas seulement fantasmatique, le peuple cubain toujours debout et l'un des mieux éduqués du continent. "Ce qui ne vous tue pas vous rend fort". En revanche, il y a fort à parier que l'ouverture actuelle des frontières aux requins yankees va par effet d'instillation diffuse de l'individualisme et du consumérisme ruiner la solidarité qui lui avait permis à ce peuple de préserver son inégalable splendeur.
La Révolution cubaine avant de s'avachir et s'obscurcir avait suscité dans le monde entier l'espoir que le système mafieux qui est le jumeau de l'ombre du libéralisme, l'exécuteur de tous les coups foireux de l'Empire, allait enfin être ramené à la lumière et comme tout vampire s'y dissoudre. Espoir déçu. Trop de transfusés du démon par morsure insidieuse participent et collaborent.
Pourtant, voilà bien ce qu'il nous faudrait. Une année de dissolution de toutes les camorras et pour commencer balancer dans des bains d'acide toutes les pétoires que nos mâles ornés des fameuses cojones arborent en sautoir sur tous les théâtres du monde. Interdiction absolue des armes. Expurgation totale. A mains nues, les pugilats s'épuiseraient assez vite et auraient l'insigne avantage de laisser les non pugilistes hors champ des gnons.
Sainte Utopie, priez pour nous. Ainsi soit-elle (la nouvelle année).

dimanche 28 décembre 2008

Sautons du bocal, ça chauffe!

En fouillant dans une librairie, à la recherche de tout autre chose, j'ai déniché un petit ouvrage dont la fraiche couleur verte et le titre m'ont tiré l'oeil (La grenouille qui ne savait pas qu'elle était cuite... et autres leçons de vie, Essai, Editions JC Lattès, 2005) et dont la lecture m'a mise de très bonne humeur. En voici le pitch : "Des leçons de sagesse délivrées par une grenouille, un bambou, un papillon, un poussin ou une vipère… L’auteur invite ici au voyage à travers sept métaphores porteuses de conscience, d’évolution, de changement. Un livre pareil à un fruit parfumé et juteux que l’on a envie de dévorer et dont il vous restera sept pépins, condensés de vie et de sagesse, que chacun pourra planter pour faire fructifier son jardin !".
En surfant à la recherche de la grenouille, j'ai pu constater que cet apologue avait beaucoup voyagé. Je me souvenais en effet avoir entendu parler de cette mise en garde que l'auteur développait : si on plonge une grenouille dans une eau bouillante, elle va tenter de s'extirper du sale jus; en revanche si elle est plongée dans une eau froide sous laquelle est sournoisement allumé un feu, elle s'ébat avec plaisir, puis la chaleur l'endort et elle finit par se figer, bouillie à l'insu de son plein gré. Nous nageons toujours mais sommes -nous déjà cuits ?
Comme l'auteur entretient un "scribarium" http://olivierclerc.com
je l'ai exploré et en livre ici quelques bribes en invitant à aller à la rencontre de l'auteur si affinités.

La raison a permis à l’homme de s’émanciper de ses seuls sens, qui peuvent être trompeurs, comme lorsqu’ils nous font croire à la rotation du soleil autour de la Terre. De même aujourd’hui, l’éveil de facultés complémentaires à la raison – les intelligences émotionnelles et relationnelles, la compréhension archétypale et métaphorique, l’intuition, etc. – nous permettront de nous émanciper de la prison étroite de la raison, de ce cocon mental qui menace de tous nous asphyxier à court terme, si nous ne le déchirons au plus vite.

(....)

Seule, la croyance est aveugle : d’un peignoir sur un cintre, dans l’obscurité, elle fait monstre effrayant. La croyance devient vite dangereuse, fanatique, imperméable à la critique et même aux faits, si l’on n'a pas pris très tôt l’habitude de la soumettre à un examen rigoureux.

Or le monde aujourd’hui comme hier est déchiré par les croyances, et pas seulement les croyances religieuses, même si ces dernières détiennent sans doute la palme des massacres commis en leur nom. Les croyances en matière de politique, de médecine, d’éducation, d’écologie, de sexualité, etc., divisent partout l’humanité en camps opposés qui s’affrontent verbalement ou l’arme à la main.

Combien de temps encore, allons-nous nous satisfaire de croire ?

Combien de temps encore sera-t-il mal vu de douter, de questionner, de s’interroger, dans certains domaines, de remettre en question la pensée dominante et sa tendance totalisante à devenir unique ?

Par ailleurs, je lui suis gré de proposer une interprétation juste de la part du féminin niée dans nos civilisations occidentales qui ne valorisent que l'intelligence du cerveau en minorant les intelligences émotionnelle et relationnelle. J'ajouterai que nos mœurs méprisent ce qui de fait participe de l'harmonie du monde à savoir l'entretien, du corps (le soin) et de l'environnement (dont le ménage), tâches généralement dévolues aux femmes. Enfin, dans un article sur les "tiers-monde" il rappelle que la seule acception économique est un point de vue étroit et réducteur et que si on adopte une définition de la richesse qui inclut la ressource relationnelle, ce sont les occidentaux qui se retrouvent en position de pauvres. Pauvres de nous ! Cœurs secs et à moitié cuits.

Lisons Olivier Clerc et ses leçons de vie. Antidote bien utile alors que dans la bande de Gaza, le Diable a repris son sabbat.