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samedi 30 août 2014

Un héroisme ordinaire, l'histoire de la Maternité d'Elne.


  

J'avais à peine connaissance de l'histoire de la Maternité d'Elne dont m'avait parlé une amie catalane à Barcelone. Il y a quelques jours, j'ai visité ce lieu et son histoire m'a été contée ( nous étions un groupe) par l'ancien maire communiste d'Elne, Nicolas Garcia, qui a été l'artisan, aux côtés de François Charpentier, de la réhabilitation du lieu et de sa transformation en lieu de mémoire.  Le "château" édifié au début du siècle par l'industriel Eugène Bardou est racheté à sa mort en 1927 par les frères Pierre et Charles Mirous qui cultivent les terres mais laissent le château à l'abandon.


En 1939, Elizabeth Eidenbenz le loue pour le compte du Secours suisse aux enfants et y installe une maternité pour permettre aux femmes enceintes, réfugiées espagnoles de la Retirada qui sont parquées dans les camps  (Argelès sur mer, Barcarès, Saint Cyprien) dans des conditions épouvantables, d'accoucher dans des conditions décentes. Elizabeth continuera pendant l'occupation allemande  à accueillir des femmes au risque de la Gestapo sans souci de nationalité (juives, tziganes, exilées allemandes). Elle sera bannie par la Croix Rouge Suisse pour avoir désobéi aux règles qui interdisaient l'accueil de ces populations proscrites. Par ailleurs elle organisera sans trêve du ravitaillement auprès des camps. Les Allemands fermeront la Maternité en 1944.
Ce courage et  cette détermination ne seront honorés que très tardivement grâce à la pugnacité d'un des enfants, Guy Eckstein, sauvé par ses soins qui la retrouve en Autriche où elle a continué à venir en aide aux enfants et aux mères en difficulté.(plus de détails ici)



Devenue une vieille dame, elle témoigne avec beaucoup d'humilité et de modestie de cette aventure humaine

Quand elle revient à Elne en 2002 à l'âge de 93, elle se souvient parfaitement des lieux et de leur usage à l'époque de la maternité. Dans l'interview projetée dans le lieu, elle apparaît rieuse, et pleine d'anecdotes sur la façon dont les femmes s'organisaient pour que la vie à la maternité se déroule dans la paix.  Elles travaillaient, chantaient, dansaient ensemble. Elles étaient vivantes en somme, une parenthèse enchantée dans l'enfer qu'elles venaient de vivre.


 

 La partie haute du bâtiment accueille des expositions plus récente, ici la guerre vue par les dessins d'enfants (oui, ça continue, ailleurs). Le projet comportait un accueil pour les femmes en détresse et un centre de formation mais la nouvelle municipalité de droite a abandonné cette option et se contente de faire vivoter le lieu de façon touristique. Sans commentaires.


Une des images du mémorial d'Argelès sur Mer consacré à la guerre d'Espagne avec comme final la Retirada, plus de 500 000 réfugiés qui déferlent à la frontière espagnole et sont parqués sur les plages alors que l'hiver 39 est un des plus froids du siècle et qu'à la frontière  ils sont dépouillés de leurs maigres biens et  brutalisés.
Malgré cet accueil  déplorable, les Républicains espagnols viendront renforcer les rangs de la Résistance et ceux de la Nueve entreront les premiers dans Paris le 24 août 1944 pour sa libération dont on vient de commémorer le soixante dixième anniversaire.




Il faisait très beau dans les Pyrénées orientales et la côte vue d'un bateau ne porte plus les stigmates de cet épisode tragique, si ce n'est ces quelques lieux que les enfants de réfugiés (nombreux sur ce territoire) ont organisés pour ne pas oublier et transmettre.

Photos ZL