Hier, je suis allée au Salon
Vivons Livres organisé à Toulouse pour sa troisième année. Je ne mets pas de lien, aujourd'hui était le dernier jour. C'est bizarre, mais j'aurais dû aimer fureter dans les rangs, feuilleter les ouvrages, je n'ai pas pu. Chaque fois que je me penchais vers une couverture, le type ou la femme qui se tenait derrière l'étal me couvait du regard, voire me demandait si je souhaitais un conseil ou me recommandait instamment telle ou telle merveille. J'ai résisté aux sirènes mais pas suffisamment pour éviter de faire chauffer un brin ma carte bleue. Je suis donc repartie avec dans une poche en plastique aux couleurs vives à souhait et à l'enseigne des éditions du Rouergue (oui, il s'agit d'un salon des éditeurs de Midi-Pyrénées) quelques opus glanés dans ma déambulation.
Chez Anacharsis.
Dictionnaire à l'usage des oisifs de Joan Fuster (1922-1992) un poète et essayiste espagnol, valencien plus exactement dont
"toute l'œuvre littéraire et philosophique sans équivalent" (s'est ) réalisée dans l'ombre de la nuit franquiste. "Dans une langue ciselée avec la précision d'un travail d'orfèvre, chaque article ramasse et développe à soi seul des considérations incisives qui confondent avec bonheur tous les obscurantismes. Je promets d'en extraire quelques pépites.
Le roman: tout dire? Assises du roman. Christian Bourgois, quelques 50 articles de 50 écrivains ont participé. J'aime beaucoup ce type de recension.
Le corps tel qu'il s'impose, La folie à l'oeuvre, la puissance de l'intrigue, ils en ont parlé et ça me cause.
Les jardins statuaires, Jacques Abeille aux Editions Attila. C'est une réédition (première parution en 1982, grâce à Bernard Noël, chez flamarion) d'une oeuvre polymorphe qui échappe aux catégories en étant tout à la fois
fable, roman d'aventure, récit de voyage, conte philosophique. Ce roman semble avoir été entravé par de multiples circonstances fâcheuses et son auteur tenu dans un relatif anonymat. J'étais venue pour l'écouter. Interrogé par un jeune homme Jérôme Goude, critique au Matricule des Anges, il était prolixe. Je regardais ses belles mains voltiger pendant qu'il évoquait Julien Gracq ou sa relation étrange à l'identité (il est né d'un homme et d'une femme tous deux mariés mais pas ensemble et il n'a appris qu'à quinze ans l'affaire de ses origines), sa mise en abîme du terme "langue maternelle" citant les contre-exemples que sont Beckett ou Conrad. Tandis qu'il évoquait la genèse des
jardins statuaires, je me demandais en regardant et en écoutant qu'est-ce qui distingue un écrivain du commun des mortels. Rien, si ce n'est ce délire verbal qui opère (ou non) comme un charme, un envoutement. Nous avons un peu bavardé, plus tard avant qu'il ne me dédicace d'une écriture fine et penchée son livre, dont je reparlerai quand je l'aurai vraiment lu (je n'ai fait, comme d'habitude quand je viens d'acheter un livre que papillonner entre les pages). J'y reviendrai, ce livre méritant bien mieux que ces quelques lignes.
A noter qu'en même temps les éditions Attila mettent en circulation un roman graphique intitulé,
Les Mers Perdues, né de la rencontre et de la complicité de Jacques Abeille et de François Schuiten.
Et pour finir et commencer, du léger. Hameçonnée par l'officiante des éditions du Rouergue et mon intérêt pour la collection de Sylvie Gracia, La brune, je me suis laissé tenter par un titre
Vivement l'avenir. Marie-Sabine Roger a surtout écrit pour les enfants et les ados. Je n'ai jamais rien lu d'elle. J'avais vu le film tiré d'un de ses romans
La tête en friche, une histoire de rédemption par les livres qui tenait surtout grâce à la ravissante vieille dame qu'est Gisèle Casadesus. Ce matin j'ai entamé et terminé cet après-midi le roman tout nouveau de la drôlesse. Éminemment sympathique, touchant, truculent. Bon, ça finit (trop) bien, mais mon petit cœur de midinette ne boude pas les fins heureuses. N'empêche qu'elle a une sacrée patte pour dessiner ses personnages, qu'on rigole bien à ses trouvailles stylistiques, que son portrait du gogol, personnage central est particulièrement chaleureux, bref un bonbon fondant qui vous laisse un goût sucré et acide à la fois, parfait exutoire pour une journée pluvieuse et tristoune.
J'aurais dû retourner au Salon, il parait qu'un certain Fransesco Pittau dédicaçait ses
derniers ouvrages . Mais voilà, je ne l'ai appris qu'après avoir terminé ma lecture. Il était bien trop tard. Je crois savoir qu'il avait rendez-vous avec de délicieuses succubes. J'espère qu'elles l'auront entrainé dans quelque tournée toulousaine, parce que le Palais des Congrès, froid et aseptisé , ce n'est pas un lieu de franche rigolade.