mercredi 30 septembre 2009

Marcheurs cueilleurs

Découverte du panorama au matin (arrivée la veille dans la nuit). Le village le plus proche Aleu, la ville Saint Girons (Ariège).


J'ai un faible pour les vaches
Ci-dessous l'alchémille et sa dentelle de rosée
Pédoncule, sépale, pétale ovaire, pistil, stigmate, style, étamine, anthère, carène, étendard, ailes, bractée, bractéole, inflorescence, ligule, involucre, panicule, pédicelle, corymbe, apiacées, vocabulaire indispensable pour comprendre les fleurs.
Limbe, pétiole, stipule, sessile, amplexicole, ovale, obovale, spatulée, reiniforme, cordée, lancéolée, lyre, accuminée, terminologie conseillée pour décrypter la feuille.
La taxonomie est précise, elle permet de différencier une espèce d'une autre, l'une pouvant être comestible, l'autre toxique.
Nous avons fait connaissance avec la consoude, l'achillée, l'alchémille, l'angélique, la benoite, le bouillon blanc, le lierre terrestre, l'aillère, la carotte,la berce, la mauve, le plantain (fort utile pour calmer les démangeaisons dues aux orties cueillies à mains nues, selon une recette infaillible pour ne pas se piquer, uh uh), des laiterons divers, des pissenlits promptement mis en besace avec moultes autres différentes graines et feuilles qui ont ensuite composé le menu du soir puis le lendemain de midi. En tout six à sept heures de marche, une halte pic nic avec des provisions rassemblant tartes et cakes, excellent saucisson au roquefort et fromages de brebis. Le soir le vin était bon après un morito, apéritif préparé par la jeune et jolie Camille. Excellente humeur des explorateurs de la survie comme chasseur cueilleur (les temps s'annoncent difficiles, il faut se préparer). Le lendemain nous avons cuit des "tourons" (sorte de chaussons ) fourrés d'ortie, de cerfeuil, de lierre terrestre et d'achillée, accompagné d'une salade de mache et de pissenlits et autres fantaisies dont des fleurs de mauve. C'était délicieux.
Hélas, le lendemain j'ai été prise de vertiges, de nausées. J'ai cru ma dernière heure arrivée, un peu de cigüe avait pu s'égarer dans la mixture. Le médecin a diagnostiqué une gastrite aigüe, m'a prescrit une palanquée de médicaments. j'en ai pris pendant deux jours et je me porte comme un charme. Peut-être ce régime hypervitaminé, bourré de fer et de liquides astringents a-t-il déclenché un processus de purge qui s'est violemment mis en marche, alors qu'il me semblait que tout allait bien.
Expérience riche en saveurs, en savoir et ... en émotions

Non, cet homme n'est pas mort foudroyé par l'amanite phalloïde que nous aurions confondu avec la coulemelle,(il y en avait et nous avons pu en déguster), il s'octroie une petite sieste avant de reprendre sa besace et son couteau.

Si vous voulez approcher ces sauvages sans quitter votre fauteuil c'est possible mais je vous conseille le contact direct

Photos ZL (pas excellentes hélas, défaut de dioptries vraisemblablement)

dimanche 27 septembre 2009

Le vent des blogs 27. Appelez la Polis


Je reviens d'un week-end consacré à l'exploration des plantes sauvages comestibles. Groupe de gens sympathiques dont quelques amis, animateurs drôles et compétents, repas pantagruéliques et délicieux avec une variété incroyable de plantes que nous arrachons d'ordinaire comme mauvaises herbes dans nos jardins. Je connaissais les vertus de l'ortie, j'ai découvert la pimprenelle, le lierre terreste, l'achilée, la consoude, et beaucoup d'autres dont je reparlerai.
Un vent des globes réduit pour cause d'occupations champêtres donc.

Vous ne connaissez peut-être pas La rénovitude . J'ai découvert sur ce site ce qui suit:

Quelques chiffres bruts sur les candidats socialistes aux régionales de 2010 (têtes de listes). (calcul sur 21 régions métropolitaines - hors Corse).
  • Nombre d’hommes candidats: 19 (90,48%)
  • Nombre de femmes candidates: 2 (9,52%)
  • Moyenne d’âge des candidats: 63 ans en 2010 (soit 69 ans en 2016, en fin de mandat)
  • Nombre de sortants: 19 (tous les sortants sont reconduits, sauf Frêche, enfin on l’espère).
  • Nombre de candidats ayant déjà fait deux mandats: 6
Il faudrait en effet redonner un coup de neuf, ça n'avance pas très vite dans ce parti devenu arthritique.

L'Hérétique
(il semble qu'on ait affaire à un Modem) vote Irina Guerguieva Bokova. On ne peut qu'être de son avis et de toute façon c'est fait, elle est élue. Exit donc l'Egyptien Farouk Housni qui ne semblait pas très franc du collier. L'UNESCO c'est sans doute un "machin" mais un de ceux qu'il me semble utile de conserver, une mondialisation utile.

Kamizole continue son oeuvre de salubrité publique. Elle ne passe rien à notre Nano Président et n'a pas apprécié qu'il s'offre une tribune en direct des Etats Unis pour venir faire causette avec son peuple chéri et lui rappeler que la justice fait son devoir en faisant comparaître les "coupables" d'outrage à sa personne par l'intermédiaire de faux en écriture. L'affaire du lapsus a été largement relayée, mais Kamizole est vénère et le dit avec humour. En voilà une que les chiffres ci-dessus ne doivent guère réjouir.

Le vent de cette semaine sera bref et exclusivement orienté politique. Pour le conclure je suggère un petit tour chez P. Corcuff qui propose une lecture de Rosa Luxembourg "volontairement anachronique, dans le sens où elle part d’aujourd’hui, d’une certaine interprétation actuelle des enjeux politiques de la période, pour puiser des questions et des pistes qui nous aident dans la formulation des problèmes contemporains. . Corcuff met en lumière sa position délicate entre anarchisme et bolchévisme, une autre voie qui n'a pas eu l'occasion d'exister.
Ajoutons cette info pour les Parisiens, que Corcuff mentionne au début de son article Dans la reprise recomposée de son beau spectacle Rosa, la vie (créé initialement en 2006), Anouk Grinberg lit des lettres de Rosa Luxemburg, au Théâtre de la Commune à Aubervilliers, du 24 septembre au 4 octobre 2009. Le jeudi 1er octobre, un débat entre la comédienne et Edwy Plenel suivra la représentation, en partenariat avec Mediapart. L'occasion de revenir sur l'actualité de Rosa Luxembourg...
Oui, j'aime bien Rosa.

Photo Wikipedia

vendredi 25 septembre 2009

Epitaphe pour les morts de la rue


Alors que je débutais ce blog j'avais posté ceci, que j'ai retiré par la suite et je dirai pourquoi

Te rappelles tu, cet homme au regard de rapace, si fier, si beau ?
Ce copain de bohème des années du Marais ?
Ce fou de vie qui se retrouva enfermé pour 3 ans ?
Tape sur Google : R.J.
Tristesse.

N.

J'ai tapé. Je suis arrivée directement sur la liste 2007 des morts de la rue. Il y apparaissait, mort le 22/01/2007, Paris 13. J'ai tapé d'autres noms dont je n'ai plus de nouvelles, puisque les hommes fiers et beaux à vingt ans peuvent mourir seuls, dans la rue, comme lui en ce mois de janvier où j'ai failli moi-même mourir. Ils seront accompagnés pour leur dernier voyage par ces hommes et femmes (Collectif des morts de la rue) déterminés - qu'ils en soient remerciés- à leur manifester une dernière fois leur appartenance à cette espèce qui se distingue de ses compagnons mammifères par le langage et le rituel funéraire. Ce mort là m'obsède. Ainsi nous avons été proches d'hommes et de femmes qui mourront seuls et abandonnés et nous, ne le saurons que parce que cet outil invraisemblable, Google, est capable de repérer dans une liste leur nom que des humains compassionnels auront noté à cette fin, nous alerter. Mais il y a dans cette liste des dates de mort avec comme seule trace de celui là qui est parti, X homme, environ 50 ans, 28 / 01/ 2007 Paris 15. Comment en arrive-t-on à ne même plus avoir de nom ? Pas de papiers, perdus ou volés et non renouvelés, jamais obtenus ? Plus de famille, plus d'amis ? Errance subie ou choisie et dégénérant peu à peu ? Rebelle, peu enclin à la courbure de l'échine, on refuse la bride sur le cou. Mais la ville est la pire des jungles où survivre. Ou bien de chômage en RMI, on ne peut plus s'assurer un couvert. Pour R., il n'y avait aucune fatalité. C'était un homme intelligent, possédant les moyens de se créer une niche de survie. Quelle fatale déréliction l'a conduit à cette mort solitaire ? Nous ne saurons probablement jamais.


Quelques semaines plus tard j'ai remarqué un commentaire qui était resté en souffrance (c'est le cas de le dire). On me demandait de prendre contact d'urgence, un numéro de téléphone et un mail étant joint.
J'appris ainsi que le frère de cet ami avait eu connaissance de la mort de R. par le biais de Gougueule, qu'il avait trouvé mon épitaphe par la même voie et il me demandait de retirer mon texte. R. s'était brouillé avec sa famille, sa mère ne savait rien de la mort de ce fils ainé, elle était cardiaque et risquait de tomber sur l'information par hasard. R. est mort dans son camion, dans un garage qu'il louait, c'est la propriétaire qui l'a découvert. Mort de quoi ? On ne sait. Il n'y a pas d'enquête pour ceux que personne ne réclame. J'ai donc retiré mon texte, assez bouleversée par ma conversation avec cet homme que j'avais croisé une ou deux fois quand je fréquentais R.

Pourquoi je remets en circulation ce billet (en l'anonymisant cette fois) ? Parce que j'ai lu aujourd'hui que depuis le début 2009, au moins 205 SDF sont morts. le 25 novembre, le collectif Les Morts de la rue rendra hommage à ces soldats tombés au front de la misère. La cérémonie aura lieu Place du Palais Royal à Paris.
Je n'ai pu publier "épitaphe à RJ" ce sera donc une épitaphe collective répertoriée comme anonyme Nous avons trop aimé les étoiles, pour avoir peur de la nuit.

Le collectif des morts de la rue

Illus L'homme de demain. Paul Klee 1933

mardi 22 septembre 2009

Sois belle et tais-toi




Selon l’opinion communément admise, ce sont les femmes qui parleraient plus que les hommes. Le stéréotype de la femme bavarde est certainement, en ce qui concerne la différence des sexes et la conversation, l’un des plus forts et des plus répandus. Paradoxalement, c’est aussi celui qui n’a jamais pu être confirmé par une seule étude. Bien au contraire, de nombreuses recherches ont montré qu’en réalité, ce sont les hommes qui parlent le plus. Déjà en 1951, Strodtbeck a mis en évidence que dans des couples hétérosexuels mariés, les hommes parlaient plus que les femmes.

Mais comment expliquer un tel décalage entre le stéréotype et la réalité ? Comment se fait-il que, bien que tou-te-s nous nous soyons retrouvé-e-s dans des situations où il était clair que les hommes monopolisaient la parole, si peu d’entre nous en aient profité pour questionner le bien fondé de cette croyance ?

Dale Spender s’est penchée sur ce mythe de la femme bavarde afin d’en analyser le fonctionnement. Ce stéréotype est souvent interprété comme affirmant que les femmes sont jugées bavardes en comparaison des hommes qui le seraient moins. Mais il n’en va pas ainsi. Ce n’est pas en comparaison du temps de parole des hommes que les femmes sont jugées bavardes mais en comparaison des femmes silencieuses (Spender, 1980). La norme ici n’est pas le masculin mais le silence, puisque nous devrions toutes être des femmes silencieuses. Si la place des femmes dans une société patriarcale est d’abord dans le silence, il n’est pas étonnant qu’en conséquence, toute parole de femme soit toujours considérée de trop. On demande d’ailleurs avant tout aux femmes d’être vues plutôt qu’entendues, et elles sont en général plus observées que les hommes (Henley, 1975).

Ce n'est pas moi qui le dit mais une chercheure qui communique au sein d'un collectif intitulé "Les mots sont importants". Si ça vous intéresse d'en savoir plus, c'est ici

Mais ce qui ne fait aucun doute, c'est que les femmes lisent davantage que les hommes et que les auteurs vivent grâce à elles.

Photo Liseuse sur fond noir. Henri Matisse.


dimanche 20 septembre 2009

Le vent des blogs 26. Langueur d'automne

C'est l'automne. Après un été sans une goutte d'eau, à l'équinoxe, le ciel nous tombe sur la tête, il pleut, il pleut, il pleut!

Pour nous consoler prenons connaissance des bonnes nouvelles, il n'y a pas de petits plaisirs (merci à Phildo, pour son mail). Dans la foulée il m'a transmis un lien vers un diaporama des oeuvres d'un certain Carl Warner qui photographie des paysages créés à partir de légumes, pains et autres denrées. Etonnant. (cliquez pour agrandir et dévorer)

Tout autre chose, Martin Winckler chez François Bon, décrit le malaise que nous procure un étranger lorsque nous entrons dans l'intimité de son désarroi sans pouvoir réellement intervenir "Je n’avais qu’une station pour prendre une décision. Qu’est-ce que je faisais ? Qu’est-ce que j’avais le droit de faire ? Qu’est-ce qu’il était possible de faire ? S’il avait essayé de se jeter sous le train, il allait le faire de nouveau. Fallait-il que je parle avec lui, que j’essaie de savoir qui il était, pourquoi il avait voulu faire ça ?" Je l'aime bien ce Winckler, il vient de publier "Le choeur des femmes", un roman initiatique qui se passe, sans surprise, dans le milieu hospitalier. A découvrir pour ce qui me concerne.
Tiens, restons dans la médecine -si on peut dire-. Au nombre des ignominies dont la pub est capable, celle-ci signalée dans son blog Daily life par KL. Les types de la pub ont les mains propres mais l'âme crasseuse
baccide.jpg
Je ne voudrais pas finir ce vent des blogs automnal sur une note aussi poisseuse, je vais recourir aux carnets d'Hubert Nyssen (oui je le cite de temps à autre) et leur voler deux jolies phrases bien ajustées à mon humeur du jour (voire de la semaine).
Retrouvant une de ses amies : "Je regardais la petite robe impertinente qu’elle avait choisie pour venir me voir et je me suis promis qu’un personnage la porterait dans le prochain roman. Sachant que nous ne nous reverrons pas de sitôt, nous n’avons mis de frein ni à ce que nous avions à nous apprendre l’un de l’autre, ni à ce que nous craignions peut-être de nous dire. Redécouvrant ainsi que sous l’écorce de la mémoire les fruits du souvenir peuvent être tendres."
Ce vent des blogs n'a rien du "mistral qui s'agite tel King-Kong rompant ses chaînes sur la scène new-yorkaise où on l'exhibe", il s'achévera sur des liens pour partager quelques oldies but goodies, que j'ai réécoutés avec plaisir cette semaine, j'ai nommé Coltrane et Miles et le héros de la classe ouvrière ( merci qui ? merci Mon Chien).

Photo 1. ZL

vendredi 18 septembre 2009

Dérisons

Certains jours, je m'éveille dans cette indécision du monde. Je ne reconnais rien de ma vie ordinaire, j'avance à tâtons, dans une extrême lenteur, je crains à chaque instant de me heurter à un obstacle réservé à moi seule, les êtres s'adressent à moi comme si j'avais six bras et deux têtes, les sons se vrillent et s'empenaillent, l'air est saturé d'effluves acidulées, mon thé ne m'ôte pas ma toux, je fixe au loin un horizon erratique, j'interroge la pythie, son oracle est circonspect.
J'ai envie alors de m'étendre sur le sol en attendant qu'une coulée de lumière me ranime.

mercredi 16 septembre 2009

Les zinédits. Regarder vivre et surtout rire


Dans ce quartier, tous les faciès, les langues, les cuisines, que j’avais rencontrés ailleurs se retrouvaient là, dans un condensé de rescapés de l’antique Babel. C’était merveilleux de les regarder aller venir, acheter des légumes et des épices chez leurs congénères, échappés eux-mêmes de quelque pogrom. J’étais heureuse de payer mon addition chez le Chinois, le Vietnamien, le Marocain, le Tunisien. Tous les jours, j’allais explorer une nouvelle gargote. J’étais quelques fois la seule femme, mais je l’ai été si souvent et dans des lieux autrement tendancieux. Je m’alliais la protection du patron en le faisant parler de son pays que je connaissais un peu, je taisais de quelle manière. J’étais servie et respectée comme une reine. Mon délice, c’était de les regarder vivre et surtout rire. Ça m’a très vite démangé. Dans certains lieux dont je commençais à être une habituée, j’ai sorti mon appareil, j’ai pris des photos à l’impromptu, si possible discrètement, mais le flash me trahissait. Un jour un type a très mal pris l’affaire. Il s’est tourné vers moi et en associant la salle, il m’a demandé pour qui et pour quoi faire ces photos. Je travaillais pour les RG ou quoi ? J’ai dit que je prenais exclusivement des photos de gens joyeux et comme ils riaient, je ne savais pas pourquoi, mais comme ils riaient…

Il était estomaqué. Tout le monde s’est esclaffé et lui aussi, après un temps de retard. J’ai sorti mon appareil et après un petit sourire de connivence, j’ai déclenché. Le patron est venu me demander ce qu’il retournait de ces histoires de photos de rigolades. Je lui ai dit que ça me remontait le moral, que ça me faisait rire, moi, quand le révélateur faisait lentement affleurer des dents, l’écartèlement des lèvres, mais surtout cette lumière dans les yeux, le bonheur de partager les mêmes absurdités, un abandon. Quand il n’est pas de cette sorte, le rire ne rit pas, il grince. Il a hoché la tête, mais j’ai senti qu’il me trouvait un peu cinglée.

Extrait La voisine. ZL

Photo L'express Le bonheur est contagieux