Trop occupée pour avoir le temps d'élaborer, songeant que ce blog a bientôt trois ans, je reviens à mes premiers posts et j'exhume "la déconfiture des arrogants, publié initialement le 18 décembre 2008. Je le trouve en parfaite adéquation avec ce qui se fomente dans ces sommets dont on nous assomme en nous serinant qu'ils sont hyper déterminants, que s'ils échouent, c'est la catastrophe absolue. Trois ans et plus que jamais on nous raconte la légende du siècle : "libérons le marché et tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes marchands".
"C'est formidable, je rencontre partout des articles où sont vantées les vertus de la coopération, de la solidarité, de la sobriété. Les conversions à "l'autre économie", à la régulation de l’État, l'invocation des mânes de Keynes fleurissent dans des cénacles où on vouait les unes et les autres aux gémonies il n'y a pas même trois mois. Ce serait à mourir de rire si on ne pressentait dans les discours opportunistes une tartufferie de première urgence, le temps de colmater, avant de repartir vers le cap du profit à tout crin. J'ai une pensée émue pour Ivan Illich et André Gorz qui ont quitté la planète avant de pouvoir assister à la déconfiture des arrogants dont ils avaient dénoncé l'immense et stupide cupidité. On ne pourrait que se réjouir de la cure d'amaigrissement infligée à la ploutocratie. Hélas, son impéritie va encore serrer d'un cran la ceinture de ceux qui crevaient déjà de faim et en augmenter les cohortes. Les autres reprendront très vite de belles couleurs."
Ca ne devrait pas s'arranger si on en croit Jean Ziegler dans un entretien à l'occasion de la sortie de son livre présenté ci-dessus.
Extrait de l'interview.
Pourquoi meurt-t-on encore de faim de nos jours ?
"Il y a cinq grandes raisons : premièrement, la spéculation financière sur les matières premières alimentaires qui a fait flamber leurs prix ces dernières années et rendu quasiment impossible aux agences d’aide, comme le Programme alimentaire mondial (PAM) de subvenir aux besoins des populations victimes de sous-alimentation. Il y a ensuite les agrocarburants, qui soustraient des terres fertiles et des plantes nourricières à l’alimentation humaine*. Troisièmement, il y a la dette extérieure, qui étrangle les pays les plus pauvres et les empêche d’investir dans l’agriculture de subsistance. Après, il y a le dumping agricole, qui fait que, sur les marchés de Dakar ou de Cotonou, les fruits, les légumes et les poulets français, grecs, portugais, allemands etc. sont vendus au tiers ou à la moitié du prix du produit africain équivalent. Enfin, il a l’accaparement des terres par les fonds d’investissement ou les grandes multinationales, qui en chassent les paysans locaux pour y cultiver des produits destinés exclusivement aux marchés occidentaux."
* Le plein d'un 4x4 en bioéthanol c'est l'équivalent en céréales de la ration alimentaire annuelle d'un enfant.
Un petit rajout de dernière minute : en Lybie, ça va grenouiller en toute tranquillité désormais