J'ai préparé beaucoup de plats pour ceux et celles qui sont venus s'asseoir à ma table.
J'ai participé à quelques rassemblements, dont certains prétendaient se mêler des affaires du monde qui, on le sait menace de péricliter, tous les "observateurs" le claironnent, même ceux qui étaient du côté du manche et se retrouvent désormais sous la menace de la cognée.
J'ai lu. Peu de livres (je ne sais pourquoi, cet été ne me portait pas vers les livres, étrange!) mais beaucoup de journaux, d'articles.
Ainsi glané sur le blog de Jorion ce texte d'Annie Le Brun à propos des Pussy Riots.
"J’ai dit ailleurs que si la servitude est contagieuse, la liberté l’est aussi. Nous en sommes à ce point d’équilibre instable, où tout peut basculer d’un côté ou de l’autre. D’où l’importance de repérer tous les signes et nous ne serons jamais trop pour tenter de discerner ce qui advient. C’est pourquoi il me déplairait qu’on fasse fi de l’insaisissable jeunesse de cette révolte venant de l’Est. Pensez aux Provos, pensez aux Hippies, aux « aventuristes » de 68… il y aura toujours l’insolente beauté de ce qui commence. Aussi, quand bien même « en matière de révolte, aucun de nous ne doit avoir besoin d’ancêtres », il se pourrait que tout débute avec le « retour du refoulé », mais ailleurs et autrement. Comme si chaque insurrection était riche de tous les rêves précédents encore à venir, c’est-à-dire comme si, à chaque fois, il s’agissait de jouer le Grand Jeu.
Il faut peut-être le savoir pour commencer à voir."
J'ai fait une petite excursion en terre charentaise où j'ai vécu mes premières années avant de partir vers la capitale, que j'ai fui depuis. Je n'avais jamais abordé sur l'île d'Aix qu'on joint par bateau et qui grâce à cela et à l'interdiction, à quelques exceptions, de la voiture, est restée à peu près indemne des dégâts générés par l'invasion touristique. Ceux qui viennent sur l'île le font pour le plaisir d'un lieu relativement vierge des outrances du bord de mer.
On en fait le tour (3 km de long, 700 m de large) en quelques heures à pied et moins encore à bicyclette. Il y avait beaucoup de vent mais la petite plage (Baby plage) était tentante. Cependant nous avons continué à pédaler. Ignoré de la plus belle façon le musée Napoléon. Nous n'étions venu que pour la promenade le nez au vent dans les senteurs d'iode et de pins chauffés par un soleil encore vaillant.
Baby plage. Ile d'Aix. Août 2012
Revenue à la maison, à la grande satisfaction des chats qui avaient épuisé leurs réserves de croquettes et d'eau, j'ai lu le dernier opus de Frédérique Martin.
Je suis une piètre "critique " littéraire. Aussi ne vais-je rien en dire. Citer simplement et vous inviter à vous laisser embarquer dans l'aventure de Joseph et Zika qui ont gardé malgré leur grand âge le désir exclusif l'un de l'autre et que les circonstances séparent, leurs enfants ne souhaitant pas les prendre en charge ensemble. Cette séparation produit par contagion dirait-on, la déliquescence de tout ce qui avait fondé leur vie, les entrainant dans une spirale de désespoir et de malheur.
Je ne sais décidément pas parler des livres, mais pourquoi les paraphraser au risque de les trahir? Mieux vaut les ouvrir, à la page 146 par exemple : Joseph (76 ans) écrit à sa "très chère femme" :
" Comme tu me manques en ces jours de détresse! Aujourd'hui le ciel est obstinément gris, il pleut à ne pas mettre un vieux dehors, alors je me dessèche derrière les fenêtres, ce qui n'améliore ni le temps ni mon humeur. Tu as le don d'effacer ce qui est hostile, je ne souffrais pas longtemps avec toi. L'abondance de ta douceur ne m'a pas préparé aux épreuves. C'est rude de comprendre à mon âge qu'on ne connaît vraiment personne, ceux qu'on aime sans doute moins encore que les autres. Le cœur s'installe dans les yeux pour nous aveugler, on lui laisse prendre ses aises. Est-ce que dans toute relation, on rêve seulement qu'on est deux, est-ce qu'on jette une grande partie de ses forces pour maintenir l'illusion et ne pas avoir à découvrir qu'on est seul, absolument seul chacun de son côté, à s'embraser pour un autre qui n'a pas de réalité ? Eh bien, même si c'était seulement ça, aimer, il faudrait le prendre, nous n'avons rien de meilleur à proposer."
Ne pas se fier à ce seul extrait, Frédérique Martin, de son écriture à la fois simple et élaborée, nous délivre une histoire tissée de douceur, de tendresse certes mais tout autant de violence et de cruauté. On en sort sonné, plus encore sans doute si on a soi-même des enfants et que l'âge commence à nous en éloigner.
"Le vase où meurt cette verveine", Belfond.
On aura reconnu dans le titre un extrait d'une chanson de Jacques Brel.