Cher Jacques,
Voilà, la mort a fait sa sale besogne, elle a eu raison de ta brûlante énergie et t'a embarqué pour ce voyage qu'on dit long et qui n'est peut-être qu'un passage furtif vers le repos définitif. O' mon frère de cœur, comme c'est douloureux de savoir que tu as disparu de notre proche univers. J'aimais tellement ta voix suave, ironique, tendre et violente. J'aimais tellement tes "atmosphères" qui me donnaient de l’oxygène. Tant de souvenirs . Je t'ai rencontré la première fois. au Théâtre du Ranelagh. Ce soir là, Brigitte Fontaine nous avait insultés, nous, le public, étions l'ennemi, va savoir pourquoi. Puis c'était aux Blancs Manteaux, un couple avait quitté la salle et tu les avais un peu houspillés, ton fils Ken était dans la salle. Je suis partie à l'étranger et j'écoutais l'enregistrement à Mogador., un triple album qui a fait mon bonheur quand je me languissais dans ce pays de sable et de fausses richesses. J'étais responsable d'une émission de radio française dans les Emirats Arabes Unis et une veille de premier de l'an, j'avais invité les auditeurs francophones à le fêter avec ton "Champagne" ce qui m'avait valu des remarques du directeur pour apologie de l'ivresse en pays musulman (???!). J'aimais particulièrement Hold tight, l'humour!
Je suis allée t'écouter à la Villette et ton retard avait surchauffé la salle et m'avait un peu angoissée, moi qui supporte peu les phénomènes de foule. Mais tu nous avais donné un concert de trois heures joyeux et punchy. Suis allée t'écouter à nouveau à Montreuil. Tu avais fait un duo avec les Zap Mamas sur Mona Lisa klaxon qui avait duré 10 bonnes minutes.
Mes enfants ont écouté et tellement aimé "La croisade des enfants".
"J'suis trop p'tit pour me prendre au sérieux
Trop sérieux pour faire le jeu des grands
Assez grand pour affronter la vie
Trop petit pour être malheureux"
Tu as été pour moi le vrai rockeur, fou, généreux, libre, poète, dénué de forfanterie, et cependant excessif, incontrôlable (tu n'aimais pas la télé et ceux qui t'y invitais tremblaient à l'idée des folies que tu pouvais commettre et tu ne t'en privais pas!).
Je t'ai suivi dans de plus petites salles, à l'invitation de membres de ton équipe. Je pense à Mahut qui doit être si triste ce soir et à ta fille chérie qui perd son père alors qu'elle est encore si jeune. Elle a hérité de ton talent. Bon sang ne saurait mentir.
J'ai eu la chance d'assister à ton dernier concert le 24 mai 2016 à Toulouse. Tu semblais encore en grande forme, tu m'as bluffée!
Je vais relire "Lettres d'amour d'un soldat de vingt ans" et réécouter certaines de tes très vieilles chansons. Celle-ci tiens, tellement d'actualité "J'suis qu'un grain de poussière"
T'es pas mort, tu continues de chanter dans ma tête.
Retrospective INA