Les apparitions magiques de sa femme défunte et de son fils disparu depuis des années confirment à Oncle Boonmee que sa fin est proche. Dans son domaine apicole, entouré des siens, il se souvient alors de ses vies antérieures.
J'aime plutôt les films qui mélangent rêve et réalité, j'aime la lenteur, la magie des lumières, la force des paysages de la jungle thaîlandaise. D'où vient que je n'ai pas vraiment aimé ce film ?
Le sujet, l'approche de la mort à partir de la cosmologie bouddhiste de la réincarnation est traité de façon paisible. Les fantômes s'invitent à la table de l'homme qui sait ainsi qu'il va les rejoindre.
"Où pourrais-je te rejoindre, demande Oncle Boonmee à sa femme, sortie des limbes pour l'assister dans ses dernières heures. Les fantômes ne sont pas attachés aux lieux dit-elle mais aux vivants qu'ils ont quittés. De fait, nous convoquons nos morts ou ils nous rendent visite, la métaphore fonctionne. Une des rares scènes un peu convaincante, c'est à dire qui suscite une empathie est celle où Boonmee étreint sa femme fantôme et pose sa tête sur son sein. Cette scène et celle de la femme dont le visage ravagé redevient lisse dans le miroir de l'eau et qui s'abandonne à la surface de l'eau au coït d'un poisson-chat. Pour le reste, la beauté des images reste glacée. la grotte où l'Oncle revient (matrice initiale) pour s'allonger et mourir est somptueuse, ornée de mille scintillements, mais la longue marche à la torche qui nous y conduit se déroule sans émotion. Nous marchons, sans comprendre où le voyage conduit même s'il est entendu que nous savons. Les reminiscences sont une sorte de collage dont les contours sont insaisissables. Ainsi dans une vie antérieure, Boonmee a-t-il été ce buffle somptueux qui inaugure le film ou l'homme qui le rattrape après qu'il a rompu sa corde, le jeune porteur que la Princesse cherche à séduire ou la Princesse elle-même ? C'est évidemment décousu comme tous les rêves, mais le résultat est qu'on finit par s'en désintéresser. Quand il voit le futur, le mourant n'est pas optimiste. Il voit resurgir du passé et du présent actuel le régime de la violence arbitraire, mais la séquence est si artificielle soudain (la lumière crue et les jeunes gens armés) qu'elle ne produit aucun effet, pas même celui de nous rappeler l'état de guerre civile actuelle dans le pays du cinéaste.
La fin n'en est pas une. Elle s'accroche en bout de piste et achève de nous frustrer .
Il me manque sans doute les clés de compréhension des symboles, non pas de connaissance rationnelle mais de familiarité intime avec les formes et les notations, de résonnance psychique.
Le film suscite quelques enthousiastes dithyrambiques. On a compris que je n'en suis pas. Tim Burton est un amateur d'univers où se mèlent intrusions de l'imaginaire dans la vie normale. En tant que président du jury à Cannes, il a sans doute poussé l'Oncle. Avec un tel parrain, le film devrait trouver son public. Je crains néanmoins qu'il soit plutôt restreint. Wait and see.
J'aime plutôt les films qui mélangent rêve et réalité, j'aime la lenteur, la magie des lumières, la force des paysages de la jungle thaîlandaise. D'où vient que je n'ai pas vraiment aimé ce film ?
Le sujet, l'approche de la mort à partir de la cosmologie bouddhiste de la réincarnation est traité de façon paisible. Les fantômes s'invitent à la table de l'homme qui sait ainsi qu'il va les rejoindre.
"Où pourrais-je te rejoindre, demande Oncle Boonmee à sa femme, sortie des limbes pour l'assister dans ses dernières heures. Les fantômes ne sont pas attachés aux lieux dit-elle mais aux vivants qu'ils ont quittés. De fait, nous convoquons nos morts ou ils nous rendent visite, la métaphore fonctionne. Une des rares scènes un peu convaincante, c'est à dire qui suscite une empathie est celle où Boonmee étreint sa femme fantôme et pose sa tête sur son sein. Cette scène et celle de la femme dont le visage ravagé redevient lisse dans le miroir de l'eau et qui s'abandonne à la surface de l'eau au coït d'un poisson-chat. Pour le reste, la beauté des images reste glacée. la grotte où l'Oncle revient (matrice initiale) pour s'allonger et mourir est somptueuse, ornée de mille scintillements, mais la longue marche à la torche qui nous y conduit se déroule sans émotion. Nous marchons, sans comprendre où le voyage conduit même s'il est entendu que nous savons. Les reminiscences sont une sorte de collage dont les contours sont insaisissables. Ainsi dans une vie antérieure, Boonmee a-t-il été ce buffle somptueux qui inaugure le film ou l'homme qui le rattrape après qu'il a rompu sa corde, le jeune porteur que la Princesse cherche à séduire ou la Princesse elle-même ? C'est évidemment décousu comme tous les rêves, mais le résultat est qu'on finit par s'en désintéresser. Quand il voit le futur, le mourant n'est pas optimiste. Il voit resurgir du passé et du présent actuel le régime de la violence arbitraire, mais la séquence est si artificielle soudain (la lumière crue et les jeunes gens armés) qu'elle ne produit aucun effet, pas même celui de nous rappeler l'état de guerre civile actuelle dans le pays du cinéaste.
La fin n'en est pas une. Elle s'accroche en bout de piste et achève de nous frustrer .
Il me manque sans doute les clés de compréhension des symboles, non pas de connaissance rationnelle mais de familiarité intime avec les formes et les notations, de résonnance psychique.
Le film suscite quelques enthousiastes dithyrambiques. On a compris que je n'en suis pas. Tim Burton est un amateur d'univers où se mèlent intrusions de l'imaginaire dans la vie normale. En tant que président du jury à Cannes, il a sans doute poussé l'Oncle. Avec un tel parrain, le film devrait trouver son public. Je crains néanmoins qu'il soit plutôt restreint. Wait and see.
19 commentaires:
Tu n'es pas la première que j'entends tenir ces propos sur ce film.
Qui vivra...
Faudrait commencer à "see" alors ...
:0)
Mon fils et ma fille l'ont vu, il a bien aimé.
Personnellement, je préfère les thèmes bien traités par David Lynch.
Ils ont... (j'ai rajouté ma fille après coup).
Critique agréable. Elle exprime une opinion sans dissuader, calmement.
un film INCONTOURNABLE ! un chef d'oeuvres ! quand je pense que certains n'y pigent que Dalle qui n'y déjoue même pas !
merci !
manquent juste un raton laveur , deux ou trois garçons vachers voire Paris Clitoriston , non ?
on va encore me trouver imbitable , je sais , moi qui ne marine plus chez mes parents ! allez voir aussi POETRY !
Bon, je n'ai pas grand chose à dire là-dessus, donc je la ferme, d'autant que ça fait quelque quinze ans que je n'ai pas foutu les pieds (et les yeux et les oreilles, donc) dans une salle de cinéma.
(J'envisage bien entendu de changer.)
Je ne l'ai pas vu mais j'ai fait un article sur ce film, dont voici le lien.
http://rackhamjack-lerouge.blogspot.com/2010/05/uncle-boonmee-le-fantome-du-pirate.html
Une chroniqueuse de mes amies a rajouté quelques lignes plutôt positives...
Besos Zoë !
Jack
Lu aussi que le périple dans la grotte était interminable... J'aime bien la nuance de ta critique, Zoë.
Merci.
@la bacchante, ni la dernière sans doute
@Kouki, tu es prévenue...
@DH, oui mais pas la même culture, tout est là.
@VP, merci de cette remarque. je préfère en général proposer en positif. Mais la Palme...
@CCC, ah ah vieux frère nous ne sommes pas d'accord.Un grand cinéphile comme toi ne peut se tromper. C'est peut-être un incontournable. je ne regrette pas de l'avoir vu. Mais je ma suis mortellement em...
@Chr B. un parti pris ou un effet de circonstances ? 15 ans sans cinéma ! Un exploit à mes yeux. J'ai du mal à passer un mois sans alors 180, pensez!
@Rackam le Rouge, hello Pirate, je suis allée lire. belle idée, ta Rita dans son bocal ah ah! Et la chroniqueuse a apprécié. Tant mieux, donc et vogue ta galère.
@Sophie K, interminable en effet, c'est un film où le temps s'étire.
Version Backchich:
Magicien du cinéma thaï, Apichatpong Weerasethakul nous avait déjà ébloui avec "Blissfully Yours" ou l’extatique "Tropical Malady". Avec "Oncle Boonmee", Apichatpong, Joe pour les intimes, nous offre son film le plus étrange, le plus radical, le plus beau aussi. Ni « incompréhensible », ni « hermétique », "Oncle Boonmee" est une invitation au rêve, un film halluciné et hallucinant, un trip.
D’ailleurs, aussi étrange que cela puisse paraître, "Oncle Boonmee" présente pas mal de points communs avec d’autres grands films immersifs sortis récemment : "Avatar", "Le Guerrier silencieux", "Enter the Void" ou "Inception". Des films sous influence kubrickienne qui envisagent le cinéma comme une expérience polysensualiste, parfois non-verbale, et qui s’apparentent à un rêve ou une vision sous l’emprise d’une drogue. Du cinéma total, absolu, ultime…
Dans "Oncle Boonmee", il n’y a rien à comprendre mais tout à voir, tout ressentir. Des singes géants aux yeux rougeoyants arpentent la jungle, un poisson-chat phallique qui butine une princesse, un buffle qui s’échappe au crépuscule, des fantômes du passé qui vous prennent par la main, les premières lueurs de l’aube, les rayons du soleil qui tardent à travers un arbre, un souffle dans les nuages…
Voici donc une des plus belles propositions de cinéma de ces dernières années. Apichatpong Weerasethakul – qui a déclaré en recevant sa récompense « J’aimerais embrasser Tim Burton dont j’adore la coiffure » - ne fait pas de films. Il fait du cinéma. Pas sûr que les critiques qui ont dégueulé sur "Oncle Boonmee" comprennent la différence.
@Vinosse, somptueuse contre critique . Elle est de toi ? J'accepte la contre critique, sauf que je n'ai pas "dégueulé " sur Oncle Boonmee, j'ai dit que je m'y suis ennuyée alors que j'aime plutôt les films de cette veine. J'ai même émis l'hypothèse qu'il me manque une intimité avec les codes. Mais si tu l'as vu et aimé, voilà qui donne deux sons de cloche différents :-)
Zoe: est-ce que j'écris ainsi ???
C'est lu sur Backchich de ce matin!
Vi, non bien-sûr, je rigolais.
Débat passionnant, la critique de Vinosse me donne envie de le voir, et justement parce que Palme d'or et contreverse !
Merci Zoë, je n'irai pas voir le film. Je n'y serais pas allé de toute façon! Certains producteurs français ou étrangers parle du Grand prix du festival de Cannes comme du "baiser de la mort"! Et ça se vérifie assez souvent..
Les américains (Tim Burton par ex.) lorsqu'ils président Le jury se font un devoir de se racheter une conduite en favorisant un film difficile. Ils ont le complexe du cinéma d'auteur, ce qui est assez stupide...
@Laure K, les amoureux de l'image dont tu es peuvent y trouver leur bonheur
@Depluloin, ah! je suis contente de vous conforter dans votre "je préfère ne pas" bartleflyen (très en vogue le bartlefly en ce moment. Je crois votre analyse du remords yankee assez juste. On avait eu la daube "Entre les murs" grâce à Sean Penn.
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