mercredi 16 septembre 2015

Un peu de gaieté dans ce monde sinistre

 La Cop 21, vous en avez entendu parler ? Oui ? Non ?
Alternatiba, ?  Remember ? 
Depuis, les  BIZI,  le comité organisateur qui avaient lancé l'initiative  "créons 10, 100, 1000 Alternatiba".
a fait des petits et suscité  une grande mobilisation à l'occasion de la COP 21. Pour tenter d'éviter qu'elle  se termine comme à Copenhague : un fiasco absolu et Rio + 20 dont les maigres résolutions sont restées lettre morte, partout en France les alternatives se rassemblent dans une grande fête pédagogique : on peut faire autrement, la preuve! Le slogan : changeons le système, pas le climat ! 35000 personnes sont venues se baguenauder entre les 200 stands.
J'ai fait partie de cette petite foule, mon appareil photo en bandoulière et même si je connaissais la plupart si ce n'est des exposants eux-mêmes du moins des enseignes, j'ai eu plaisir à en découvrir d'autres.
Quelques captures en illustration. Autant d'intelligence, de savoir-faire et de bonne humeur, ça fait du bien. Allons, il y a de l'espoir, on va s'en sortir.






Elle c'est Loulou pratiquant en direct   l'Ecolocoaching










 Il y avait du Oud, du rock et même ici du tango. Beaucoup de convaincus de l'urgence de changer de système, beaucoup de curieux qui découvraient mille façons de faire autrement tout en se régalant de bière locale (la Garland est délicieuse) et des sandwichs aux herbes. Le stand des glaces n'a pas désempli.
J'ai assisté à une controverse animée par l'Arc-en-ciel Théâtre Forum ou comment aborder tous les conflits sur le mode du débat et de la drôlerie. Le sujet : mon voisin peut-il devenir un élu.
Après deux bonnes heures à arpenter, serrer des mains et claquer des bises, comme il commençait à pleuvoir, qu'à peine descendue de l'avion venant de Berlin et venue directement saluer les copains j'étais épuisée, je suis partie. Mais  requinquée.
Si Alternatiba passe par chez vous, n'hésitez pas, allez savourer l'utopie en marche.

Photos ZL 13/09/15

samedi 5 septembre 2015

L'appel contre les murs

Je relaie intégralement ce texte qu'un ami m'a transmis et qui dit mieux que je ne saurais le faire ce que je ressens et pas depuis deux jours mais depuis toujours.




 (…) La tentation du mur n’est pas nouvelle. Chaque fois qu’une culture ou qu‘une civilisation n’a pas réussi à penser l’Autre, à se penser avec l’Autre, à penser l’Autre en soi, ces raides préservations de pierres, de fer, de barbelés, ou d’idéologies closes, se sont élevées, effondrées, et nous reviennent encore dans de nouvelles stridences. (…)
(…) La moindre invention, la moindre trouvaille, s’est toujours répandue dans tous les peuples à une vitesse étonnante. De la roue à la culture sédentaire. Le progrès humain ne peut pas se comprendre sans admettre qu’il existe un côté dynamique de l’identité, et qui est celui de la Relation. Là où le côté mur de l’identité renferme, le côté Relation ouvre tout autant, et si, dès l’origine, ce côté s’est ouvert aux différences comme aux opacités, cela n’a jamais été sur des bases humanistes ni d’après le dispositif d’une morale religieuse laïcisée. C’était simplement une affaire de survie : ceux qui duraient le mieux, qui se reproduisaient le mieux, avaient su pratiquer ce contact avec l’Autre : compenser le côté mur par la rencontre du donner-recevoir, s’alimenter sans cesse ainsi : à cet échange où l’on se change sans pour autant se perdre ni se dénaturer.
(…) Les murs qui se construisent aujourd’hui (au prétexte de terrorisme, d’immigration sauvage ou de dieu préférable) ne se dressent pas entre des civilisations, des cultures ou des identités, mais entre des pauvretés et des surabondances, des ivresses opulentes mais inquiètes, et des asphyxies sèches. Donc : entre des réalités qu’une politique mondiale, dotée des institutions adéquates saurait atténuer, voire résoudre. Ce qui menace les identités nationales, ce n’est pas les immigrations, c’est par exemple l’hégémonie étasunienne sans partage, c’est la standardisation insidieuse prise dans la consommation, c’est la marchandise divinisée, précipitée sur toutes les innocences, c’est l’idée d’une « essence occidentale », exempte des autres, ou d‘une civilisation exempte de tout apport des autres, et qui serait par là-même devenue non-humaine. C’est l’idée de la pureté, de l’élection divine, de la prééminence, du droit d’ingérence, en bref c’est le mur identitaire au cœur de l’unité-diversité humaine.

(…) Mais la folie serait de croire inverser par des diktats le mouvement des immigrations. Dans le mot« immigration » il y a comme un souffle vivifiant. L’idée d’« intégration » est une verticale orgueilleuse qui réclame la désintégration préalable de ce qui vient vers nous, et donc l’appauvrissement de soi. Tout comme l’idée de tolérer les différences qui se dresse sur ses ergots pour évaluer l’entour et qui ne se défait pas de sa prétention altière. Le co-développement ne saurait être un prétexte destiné à apaiser d’éventuels comparses économiques afin de pouvoir expulser à objectifs pré-chiffrés, humilier chez soi en toute quiétude. Le co-développement ne vaut que par cette vérité simple : nous sommes sur la même yole. Personne ne saurait se sauver seul. Aucune société, aucune économie. Aucune langue n’est, sans le concert des autres. Aucune culture, aucune civilisation n’atteint à plénitude sans relation aux Autres. Ce n’est pas l’immigration qui menace ou appauvrit, c’est la raideur du mur et la clôture de soi. (…)
Les murs menacent tout le monde, de l’un et l’autre côté de leur obscurité. C’est la relation à l’Autre (à tout L’Autre, dans ses présences animales, végétales, environnementales, culturelles et humaines) qui nous indique la partie la plus haute, la plus honorable, la plus enrichissante de nous-mêmes.
Nous demandons que toute les forces humaines, d’Afrique d’Asie, des Amériques, d’Europe, que tous les peuples sans États, tous les « Républicains », tous les tenants des « Droits de l’Homme », que tous les artistes, toute autorité citoyenne ou de bonne volonté, élèvent par toutes les formes possibles, une protestation contre ces murs qui tentent de nous accommoder au pire, de nous habituer à l’insupportable, de nous faire fréquenter, en silence, jusqu’au risque de la complicité, l’inadmissible.

Tout le contraire de la beauté.
Edouard GLISSANT - Patrick CHAMOISEAU

Extrait de « Quand les murs tombent :
l’identité nationale hors la loi ? »   Editions Galaade.


vendredi 21 août 2015

Hommage de l'arbre à Palabres aux arbres de François Matton

Il faut cliquer sur les images pour mieux les voir mais surtout visiter la forêt d'où viennent ces spécimen. Y'a du beau monde. Il est fou ce Matton, folie douce


 

 

vendredi 14 août 2015

Des vivants et des morts

Qu'on se rassure, si ce blog semble dans le coma, ce n'est pas pour cause de maladie ou de disparition par enlèvement de sa rédactrice mais parce qu'elle n'a eu ni le temps -ni le goût sans doute- de s'y consacrer.
D'ailleurs si je consulte la liste des blogs que je suivais régulièrement je constate qu'à part quelques héroïques et vaillants résistants, beaucoup de ceux qui publiaient journellement se sont calés sur une vitesse de croisière qui frôle l'immobilisme voire sont en cale sèche.
Au nombre des multiples raisons qui m'ont tenue éloignée de mon écran (visite d'amis, présence des jeunes acteurs de la troupe de ma fille qui ont fait résidence à la maison) la dernière en date est mon rituel passage (écourté) à Lagrasse pour le Banquet du livre.
Le thème de cette année "ce qui nous est étranger" réunissait une belle affiche dont Lydie Salvayre et Olivier Rolin qui me sont chers comme le savent ceux qui fréquentent l"arbre.
Lydie venait présenter Pas pleurer (j'en avais parlé à sa sortie  ici avant qu'il n'obtienne le Goncourt), Olivier Le météorologue. Je me permets la familiarité du prénom parce que je connais un peu Lydie sur un mode amical et que Rolin m'est comme un frère, je ne sais pourquoi.
Lydie a perdu sa chevelure flamboyante (chimio) et m'est apparue avec une sorte de duvet d'argent au-dessus de son bel ovale, je l'ai trouvée magnifiée. Nous n'avons pas eu beaucoup de temps d'échange, elle devait repartir (contretemps imprévu lié aux soins qu'elle continue de recevoir) et était bien-sûr accaparée par tous ceux et celles qui l'admirent et sollicitaient un autographe. Il n’empêche, "je me croyais inoxydable, m'a-t-elle dit et j'ai bien dû admettre que ce n'est pas le cas. Humilité radicale. Sa conférence était orientée sur les vertus du ressourcement de la langue par les parlers populaires et les fantaisies qu'y introduisent les collisions entre les langues comme c'est le cas pour le fragnol, terme qu'elle utilise pour désigner le langage de sa mère acclimatant des termes espagnols au sein d'un continuum francophone. Hélas, le langage aseptisé des médias a éradiqué cet humus naturel. La langue s’ankylose.
Une personne délicieuse m'ont dit les amis qui la découvraient.
Quant à Rolin il nous a fait partager une réflexion "crépusculaire" (dixit) sur la disparition programmée de la littérature, le vocabulaire se désertifiant au profit d'une sorte de globish. Il vient de faire paraître une somme imposante Circus I et II  qui rassemble ses écrits de 1980 à aujourd'hui. Il a un regard critique sur son entreprise d'auteur et bizarrement s'est étonné qu'on méprise les prix (était-ce parce que Lydie était présente?) alors qu'on le sait, il a professé à une époque l'abolition du système de façon radicale. Dans son dernier roman, la biographie d'un homme "ordinaire" broyé par le système stalinien, il soulève la question qui n'aura jamais de réponse : que serait devenue la belle utopie communiste si un tyran ne l'avait ensanglantée de ses crimes. Après Staline, l'avenir radieux s'est définitivement assombri et le Grand Capital règne en maître absolu, chosifiant les êtres aussi bien que toutes choses et reléguant bientôt la littérature au rang des lettres mortes. Oui, il n'était pas gai l'ami Rolin et les quelques mots que j'ai échangés avec lui m'ont semblé ceux d'un homme dépressif. Vieillir n'est pas facile décidément.
Pour le dérider, je lui ai conseillé d'écouter La Tordue, la vie c'est dingue . Un petit enfant scande d'une voix fluette chaque couplet d'un refrain "le plus important c'est d'être pas mort". Hé oui, pas mieux.
Hélas, Sólveig Anspach (Queen of Montreuil, Lulu femme nue) s'est fait manger par le crabe  mais Jean Rochefort lui est bien vivant. *
Tiens bon Jean, le plus important c'est d'être pas mort.
Et c'est valable pour ce blog...
On aura remarqué que pas une photo n'illustre mes propos. Afin de vous permettre tout de même de respirer un peu, en voici une, prise au bord d'une rivière, lors d'un pique-nique improvisé, sur la route qui me conduisait vers les Cévennes pour fêter les 75 ans d'un ami, en pleine forme. Que les Dieux des forêts le protègent.

* puisqu'on parle de langue, de littérature et de Jean Rochefort, je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager Madame Bovary"résumé" par JR en "boloss  

samedi 27 juin 2015

Escapade entre mer et étang.



Une amie nous a prêté un petit studio cabine situé sur le port de Valras . Ma copine potière et moi-même avions besoin de repos. Nous avons entamé notre semaine de farniente par un plateau de fruit de mer proposé par les écaillers de Valras, dégusté sur le petit balcon face au port




Le lendemain, nous sommes allées à Gruissan où se trouve  le salin de l'ile Saint Martin,  bordé par la méditerranée à l'est et l'étang de l'Ayrolle au sud.. La couleur rose est étrange
 

Diner à la Cambuse du Saunier

Le lendemain, nous sommes allées à Agde, la Perle Noire  où se tenait une exposition. Nous savions que quelques amis exposaient
Ainsi Pierre Baey, inspiré par la tradition nudiste du Cap d'Agde a produit ce très spécial androgyne


Michel Wohlfahrt (dont je vous ai déjà parlé) présentait une série de femmes debout



Diner au bord de l'Hérault


Échappée vers un domaine de production et son jardin où sont exposés des ceps avec le nom du cépage et les territoires de production . Au milieu un beau carré de lavande.


Pendant tout ce temps nous avons vainement tenté de nous baigner. Eau glaciale, vent infernal nous remplissant les oreilles et les yeux de sable. Nous avons mis à profit nos après-midi pour lire ou somnoler, nous reposer enfin...
Dernière promenade sur la plage des Eygalières située sur la rive est du fleuve, l'Orb qui débouche dans la Méditerranée à Valras même. Et dépose par conséquent une manne de bois flotté dont ci-dessous un beau spécimen.


Ce pays serait magnifique s'il n'était envahi de la désespérante laideur des immeubles et autres dispositifs destinés au tourisme de masse qui va déferler dans quelques jours.


Pendant ma courte absence, les lys avaient explosé.  

Et pendant que nous lézardions, la Grèce continuait à batailler pour se sortir de la nasse. Si vous voulez avoir une idée claire de la question, je vous conseille l'interview de Yannis Youlountas

Photos ZL juins 2015.

dimanche 14 juin 2015

Quelques jours parmi les jours






Ada Colau en campagne dans le quartier de Gracia à Barcelone  (14/05/15). L'indignée sera élue  sera élue peu  après.



Quelques pas sur la plage, une paêlla partagée avec les collègues avant de repartir 

 Reims 28/05/15. La cathédrale est en travaux. Avez-vous remarqué comme tous ces bâtiments historiques sont sans cesse affublés d’échafaudages ?


Un diner de gala nous est offert dans le Palais du Tau après une promenade dans le musée

 


Milan, 02/06/15. je revois des amis que j'aime beaucoup. Nous n'avions pas eu l'occasion de nous rendre visite depuis dix ans. Promenade à leurs côtés, échange sur nos vies.



Léonard domine de toute sa stature une ville qui lui a permis d'exercer son génie


Les contrôleurs guettent les fraudeurs à la sortie du tramway. Touffeur ! il fait 35°
Je suis venue pour l'Expo.
Pas celle des multinationales qui affichent un slogan indécent "we feed the world" alors qu'elles l'affament.


L'expo dei popoli  où se sont donnés rendez-vous ceux qui se battent pour la souveraineté alimentaire, l'accès à l'eau, contre l'accaparement des terres  et des zones de pêche.





Sur la proposition de Stéfania , nous sommes allés (quelques uns- d'entre nous) rendre visite à un producteur qui nous a présenté ses plantations et expliqué de quel système il s'est échappé (productiviste et à la merci de la grande distribution) pour reconsidérer sa façon de produire et de vendre. Son agriculture bio approvisionne désormais des "GAS"(gruppo di acquisto solidale) équivalent des AMAP en France.



 

Le dernier soir, les anciens docks du Darsenna près du canal du Naviglio Grande offrent en étalage les produits locaux qu'on peut acheter et déguster assis autour des tables distribuées le long du canal.Un peu de fraicheur après la canicule et de légèreté après la gravité des propos tenus au cours de ces journées chargées en chiffres désespérants et en discours gonflés d'énergie.



Photos ZL



mercredi 20 mai 2015

Un temps déraisonnable

 "C'était un temps déraisonnable"... Paris drainait entre Montmartre et Montparnasse du Bateau Lavoir à la Ruche,  tous les grands illuminés du début du siècle. Ils vivaient dans des gourbis, ne mangeaient pas toujours à leur faim mais ils embrasaient le monde des arts  et des lettres, ils s'appliquaient à réduire en poussière les corsets que la bienséance bourgeoise avait accrochés aux corps et aux esprits. 
Bohèmes 
 Il y a eu de ferventes bagarres entre les Anciens et les Modernes. On se conviait sur le pré, on tirait en l'air pour effrayer un contradicteur, on prenait au sérieux la fête et l'excès. Mais avant tout on créait sans cesse et à tout prix. Picasso, Braque, Modigliani, Apollinaire, Pascin, Desnos, Breton, Man Ray, Diaghilev, Rodin et bien d’autres, inventaient le siècle. Le cubisme faisait fuir les rombières et enchantait les prospecteurs de nouveauté qui firent fortune de leurs intuitions et rendirent riches et célèbres certains de ces anciens pauvres.
Puis la guerre est venue. Certains s'y sont engagés et y ont laissé leur crâne (Apollinaire), leur bras (Cendrars) ou leur raison.
Dan Franck nous invite à revivre à leurs côtés leur intimité avec la création, leurs querelles et leurs jalousies, leurs amitiés et leurs amours. Le livre est un monument d'érudition, l'auteur a puisé directement dans les écrits des artistes ou de ceux qui les ont intimement fréquentés. Il s'y conjugue grands évènements fondateurs de l'Art et heurs et malheurs des artistes.   Cela donne des entremêlements de points de vue des uns sur les autres qui nous restituent à vif douleurs et enthousiasmes. Modigliani meurt pauvre, sa femme enceinte de leur deuxième enfant se suicide peu après. Pascin dépense sans compter et abreuve généreusement tous ceux qui lui montrent quelque amitié. Picasso se tient à distance, il est le prince incontesté dont Max Jacob et Apollinaire se disputent la préférence. On croise Kiki de Montparnasse et toutes les égéries des artistes, grands consommateurs de modèles ou de muses. Aragon rencontre Elsa qui jette sur lui son dévolu. On voit naître également le marché de l'art et s'amasser les collections qui trônent désormais dans les grands musées du monde. Les cafés de Montparnasse naissent, la Rotonde, le Sélect, La Closerie deviennent les ports d'attache des célébrités nouvelles ou à venir. Le livre est truculent, une anecdote par page, les cocasseries les plus inouïes, Dada et les surréalistes dans leurs frasques, les coups d'éclat des excentriques qui ne veulent surtout pas risquer le conformisme. Au total, moins des analyses de l'art que le matériau de vie frémissante, hasardeuse, qui le nourrit.
 Ce tome restitue les trente premières années.  Libertad et Minuit poursuivent la mise en scène des "aventuriers de l'art moderne". Je ne les ai pas encore lus. A suivre sans doute...

http://static.fnac-static.com/multimedia/Images/FR/NR/2d/9d/62/6462765/1540-1.jpg

Un petit mot sur un opus beaucoup plus mince, mais dont le propos remet en scène l'horreur de la grande guerre que décrivaient Apollinaire ou  Cendrars, largement cités par Dan Franck.
« À une heure de l’après-midi, avec la chaleur qui écrasait la ville, les hurlements du chien étaient insupportables. Il était là depuis deux jours, sur la place Michelet et, depuis deux jours, il aboyait. C’était un gros chien marron à poils courts, sans collier, avec une oreille déchirée. Il jappait méthodiquement, une fois toutes les trois secondes à peu près, avec une voix grave qui rendait fou.
Dujeux lui avait lancé des pierres depuis le seuil de l’ancienne caserne, celle qui avait été transformée en prison pendant la guerre pour les déserteurs et les espions. Mais cela ne servait à rien. » 

Jean Christophe Rufin à partir d'un fait divers que lui a raconté un ami,  nous livre un roman moins de la guerre que de l'après guerre où les hommes renvoyés à la vie civile sont  désormais amers et désolés. Chez Rufin un fond d'optimisme relève toujours le propos grave. Comme l'histoire est construite sur une enquête, on ne lâche le collier rouge que lorsqu'on a eu le fin mot de l'affaire. Un petit moment profond et délicieux. 

Sur Bohèmes, je renvoie à Tania qui en avait proposé une subtile et alerte présentation