vendredi 30 mai 2014

Téoùlà?


Comme je suis très absente de ce blog et de la blogosphère en général, voici en quelques photos et quelques mots des bribes biographiques sommaires qui expliquent un peu mes intermittences
Suis allée à Rochefort, deux jours (par hasard) avant la fête de l'Hermione, bateau mythique que la ville recrée à grands frais. La frégate devrait prendre le large en 2015 vers les Amériques.













Mais Rochefort c'est aussi le Pont transbordeur du Martrou le dernier pont transbordeur encore en activité, inauguré en juillet 1900, ouvrage impressionnant, témoin de la grande époque des montages de ferrailles. Tous les autres ont été détruits ou fermés



Rochefort, c'est aussi La Corderie Royale longue de 374 mètres pour être en mesure de fabriquer des cordages d'une encablure soit 200m de long. Elle a été sauvée du dépérissement après que les Allemands l'ont incendiée dans la foulée de leur débâcle. Elle abrite désormais le Centre international de la mer.

Rochefort possède de jolies maisons bordées de roses trémières ou de buissons fleuris

Retour à Royan et son port gavé de bateaux en attente de leurs propriétaires qui reviendront au joli temps des vacances



L'eau était tentante mais bien trop froide pour aller au delà de la trempette d'orteils. J'ai ramassé quelques bois flottés qui sont allés s'échouer auprès de ma collection de figures improbables sculptées par le hasard.




Celles-ci sont restés en bonne place, sculptures éphémères dont les auteurs se sont éclipsés.

 

Par la suite j'ai poursuivi vers Caen, pour une réunion de travail. Je n'ai pas visité le mémorial. Outre que je n'ai pas grand goût pour les choses de la guerre, je n'ai fait que passer deux jours très occupés dans la cité normande non sans avoir goûté la fameuse "tourgoule", dessert à base de riz au lait.



Le centre ville a été préservé des bombardements,  Caen s'est trouvé sur le trajet des bombes du débarquement, plus de 2000 personnes en sont mortes.
Étonnant tous ces pointus non ?
Quelques jours plus tard, j'étais à Lille. Même pas eu le temps de prendre quelques photos
Au retour, je me suis posée un peu. Suis allée voir le magnifique Tabac Rouge  avec ma fillote. Enthousiasme partagé : performance des acteurs-danseurs, univers poétique, baroque, trouvaille des accessoires, du décor, métaphores du pouvoir, de l'addiction, du désir, une pure merveille !
Et hier soir Orlando King Kong Power Kintet en concert à l'espace Job, l'ex manufacture de papier à rouler reconvertie (après un long combat) en centre culturel. Aîda et Christelle en plus d'avoir un talent fou,  sont des amies, c'est dire si nous étions heureux.
Entre temps, oui j'ai voté, sans illusions et sans surprise pour le résultat. Heureusement que le monde est plus généreux que ces misérables fantoches.
J'oubliais : en passant par Paris, je suis allée voir l'expo de Martial Raysse à Beaubourg. Prolifique,étrange. et parfois prophétique.

vendredi 9 mai 2014

On nous cache tout, on nous dit rien

Les services publics moins chers et plus efficaces que le privé. Plus de détails ici 

A qui profite la dette ? 



C'est tout pour aujourd'hui et ça suffit bien, non ?

jeudi 1 mai 2014

Lisbonne en légèreté

J'étais pendant quelques jours à Lisbonne. Bien-sûr en parlant avec les gens on entend beaucoup évoquer "un terrible retour en arrière". La femme qui m'hébergeait, hôtesse de l'air de 61 ans, se plaignait de devoir continuer à travailler. Elle arrivait de New York et repartait à Luanda avec à peine un jour de repos. Elle devra poursuivre à ce rythme jusqu'à 66 ans et elle n'en pouvait plus.
En marchant dans les rues, on ne ressent pas vraiment les effets de la crise, mais je ne suis pas allée dans les quartiers vraiment touchés.
Fernando Pessoa trône à la terrasse de son café favori et les touristes se font prendre en photo un bras posé sur ses épaules. J'ai aimé que ce jeune homme lise tranquillement Steinbeck assis aux côtés de l'homme tranquille pour l'éternité.  Plus loin l'homme doré gagne sa vie suspendu et statufié.




 En fait j'avais envie de respirer et je suis allée au jardin botanique où se trouvent quelques beaux spécimens d'arbres tels ce ficus ou ce palmier invraisemblable.





J'ai encore admiré les planches décrivant le mécanisme des plantes carnivores et suis repartie vers le Tage



Bien-sûr Lisbonne venait de fêter une victoire de football (ne me demandez pas laquelle, j'ignore tout de ces choses) et quand je suis arrivée de l'aéroport ça klaxonnait à tout va. En revanche -et ma logeuse me l'a confirmé- l'anniversaire du 25 avril ne semblait pas avoir mobilisé les deniers publics, le pouvoir en place plutôt tiède sur la rétrospective. 


Un chantier imposant m'a permis de constater que tout de même le bâtiment va  et continue d'employer les hommes des anciennes colonies cependant que l'Angola devient une terre de refuge pour les jeunes Portugais. Le Portugal est à nouveau une terre dont on s'exile et qui voit partir ses jeunes, formés dans les Universités, vers des pays qui leur offrent de meilleures perspectives. Cremilde (ma logeuse) m'en a parlé les larmes aux yeux. 


Le temps était doux et les bords du Tage invitaient à la flânerie. Beaucoup d'amoureux enlacés, de copains copines sirotant   un verre en bavardant. 


Voici un selfie un peu elliptique, mes pieds en position détente pendant que je contemple les nuages, les merveilleux nuages. 

  


Je suis ensuite allée à Belem pour m'empiffrer de ses merveilleux Pasteis de nata.

Sur mon chemin j'ai rencontré un joli camion. Spéciale dédicace à Dominique Hasselmann.



Je n'ai pas vraiment ressenti les effets de la crise, croisé moins de mendiants que dans les rues de Paris, mais c'est sans doute que les Portugais sont un peuple très digne. Je conclurai donc ce billet en hommage à mes amis portugais par cette pensée de Confucius, parmi celles retenues et proposées par  Tania.



« Etre digne dans la vie privée ; diligent dans la vie publique ; loyal dans les relations humaines. Ne pas se départir de cette attitude, même parmi les Barbares. » 

samedi 26 avril 2014

La chasse est ouverte



Reçu aujourd'hui par mail un lien vers un site où est présentée la situation d'un petit môme et de sa famille (Malgaches) menacés d'expulsion. Des parents et des enseignants se mobilisent. La pétition et la mobilisation aboutissent : le Préfet accepte de revoir la décision : l'expulsion est suspendue, la peur s'éloigne, elle ne disparait pas.
Dans la même veine, on apprend que le nouveau maire UMP de Toulouse, considérant que son prédécesseur (PS) était par trop laxiste,  intime l'ordre aux officiers de l'état civil de dénoncer tout soupçon d'irrégularité dans l'état civil de futurs mariés (mariage blanc ou gris, sic)
Pas à dire, on vit une époque formidable !

  

vendredi 18 avril 2014

Consolata


On a beaucoup parlé du Rwanda ces derniers temps pour le sombre anniversaire du génocide des Tutsis. J'ai alors pensé à Consolata. Je l'avais connue en 1982 pendant mon passage à Kigali. Hébergée par un ami français attaché culturel à l'Ambassade de France, j'avais fait la connaissance de Consolata, une jeune Tutsi d'une grande beauté et d'une belle gaieté. De retour en France j'avais lu dans la presse que la femme du Président Juvénal Habyarimana, Agathe, avait décidé de faire arrêter et déporter dans des camps les femmes tutsis qui avaient eu des "relations coupables" avec des Occidentaux. Consolata en faisait partie. L'ami français, revenu entre temps en France s'est démené pour la tirer de cette mauvaise passe en repartant à Kigali et en l'épousant à l'ambassade de France. Mariage à l'insu de sa famille (il est juif d'une famille très intégriste) et mariage aussitôt suivi d'une séparation.  Ils n'avaient ni l'un ni l'autre l'intention de vivre ensemble, même s'ils sont restés les meilleurs amis du monde.
Consolata a mis un peu de temps à s'acclimater à Paris (elle détestait les escaliers roulants par exemple), mais comme elle était intelligente et possédait un excellent niveau de langue, elle a trouvé du travail et s'est mise à apprendre ... l'accordéon. Nous nous voyions de temps à autre à cette époque là, période heureuse.
En 1994, cela faisait plus de 10 ans qu'elle vivait en France.  En mai, j'avais convié mes amis à une fête pour mon départ (déménagement de toute la famille, bye bye la capitale). J'avais invité Consolata, mais elle ne vint pas. Quand je l'appelai au téléphone, une personne me dit en chuchotant que Consolata venait  d'apprendre le massacre de sa famille et qu'elle était effondrée.
Sa sœur avait échappé aux tueurs et se trouvait au Zaïre. Consolata s'est débrouillée pour lui faire parvenir un ticket d'avion à partir de Bujumbura  au Burundi. Sur la route qui la menait de Bukavu au Zaîre à l'aéroport de Bujumbura, sa sœur a trouvé la mort dans un accident de voiture.
Par la suite Consolata est retournée au Rwanda au prix de gros risques pour tenter de comprendre ce qui était arrivé.  Elle a ainsi appris que son plus jeune frère, né de père hutu avait été sauvé in extrémis et se trouvait quelque part au Zaïre. Cette fois encore, elle a réussi à le retrouver, à le faire venir en France et à l'inscrire dans un lycée. Hélas, ce jeune homme était devenu inapte à la vie civile. Sans la prévenir, il a fugué pour aller s'engager dans la Légion.
Consolata avait suivi entre-temps un cursus de logisticienne et travaillé pour certaines ONG. Son premier poste a été en Arménie et ses lettres décrivaient les affres dont elles souffrait, peu habituée au froid glacial qui régnait sous ces latitudes.
Elle partit au Tchad, au Congo. Un jour elle m'annonça qu'elle était de retour en France. Je la revis, toujours aussi calme et rayonnante en dépit de tous ces deuils. Elle allait avoir un enfant. Elle était heureuse. Les dernières nouvelles ont été pour m'apprendre que le père de l'enfant avait décidé de renoncer à sa paternité au profit de sa liberté. Qu'importe, Consolata avec sa douce gaieté me dit que l'essentiel était son fils, sa seule famille.
Elle est repartie pour le Botswana et je n'ai plus de nouvelles. J'espère qu'elle aura pu revenir au Rwanda. Je crois qu'elle souhaitait participer à la reconstruction de son pays, le plus peuplé d'Afrique, le pays aux mille collines épargné naturellement des fléaux ordinaires de l'Afrique (pas de moustiques, une température relativement douce, une terre généreuse). Il devrait pouvoir se relever de ce drame épouvantable. Il compte le taux le plus élevé d'Afrique de femmes impliquées dans le gouvernement. On peut espérer qu'ainsi le niveau de fécondité s'abaisse (la surpopulation est un des problèmes de ce petit pays) et comme la corruption (plaie des pays africains) a été maitrisée, que le taux d'alphabétisation est en constante progression, le Rwanda pourrait devenir un des pays d'Afrique où  la démocratie et la justice sociale seront des modèles pour les générations futures.

 Le film


mercredi 2 avril 2014

Contraste

La Tour 2 mars 2014*


La Tour 2 mars 2014

Que  dire ? Les champs de colza sont éblouissants, l'actualité est affligeante.

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Le fou, l’amoureux et le poète

Les amoureux et les fous ont des cerveaux bouillants,
Des fantaisies visionnaires, qui conçoivent
Plus de choses que la froide raison n’en perçoit.
Le fou, l’amoureux, et le poète
Sont d’imagination tout entiers pétris :
L’un voit plus de démons que le vaste enfer n’en peut contenir ;
C’est le fou. L’amoureux, tout aussi exalté,
Voit la beauté d’Hélène au front d’une Égyptienne.
L’œil du poète, roulant dans un parfait délire,
Va du ciel à la terre, et de la terre au ciel.
Et quand l’imagination accouche
Les formes de choses inconnues, la plume du poète
En dessine les contours, et donne à ce qui n’est qu’un rien dans l’air
Une demeure précise, et un nom.
Tels sont les tours d’une imagination puissante,
Il lui suffit de concevoir une joie,
Pour percevoir le messager de cette joie.
Et, la nuit, si l’on se forge une peur,
Comme il est facile de prendre un buisson pour un ours !
William Shakespeare, Le Songe d’une nuit d’été, Acte V
 *La Tour est le nom du lieu-dit où je suis perchée

mardi 18 mars 2014

L'éclair au front.

Victor Brauner « Le Carreau », manuscrit autographe de René Char peint à la gouache et à l’aquarelle. Signé par l’auteur et dédicacé par le peintre à sa femme (mai 1950). Image tirée de « Victor Brauner », Centre Pompidou (janv.1996)


"Le fascisme ne fait que recouvrir ce que "la gauche" et ses intellectuels d'outre gauche lui ont permis d'occuper, dans les plus imbéciles des malentendus. les positions dans le vide et l'invivable mènent à cela."
René Char écrit ces mots d'une lucidité imparable alors que De Gaulle organise par son référendum de 1958 "le suicide de la IV ème République". Char soupçonne De Gaulle qu'il tient en très piètre estime (il l'a rencontré en Afrique du Nord alors qu'il était mandaté pour conduire les troupes françaises dans leur débarquement au Sud de la France) d'installer un franquisme à la française.
J'ai trouvé en me promenant sur les quais, lors de mon dernier passage à Paris la biographie que Laurent Greilsamer a publié en 2004 chez Fayard. On connaît ici ma prédilection pour la poésie de Char qu'on dit hermétique alors qu'elle est un concentré d'éclats somptueux d'intuitives harmonies du langage qui fouillent au plus profond de l'humain.
Quant à sa vie - qu'il refusait qu'on mette en pages de son vivant- c'est une extraordinaire épopée de la recherche obstinée de la liberté et de la vérité. Char c'est aussi un ogre, amoureux de la vie, des femmes dont il disait qu'on ne les séduisait pas mais qu'on butait contre elles.
Char c'est un ami fidèle mais qui ne pardonne aucun compromis avec la médiocrité. Il classe les humains en trois catégories "les gentils, les merdeux et les génies". Il aura fréquenté les artistes du mouvement surréaliste mais leur tiendra rigueur (surtout à Aragon) de leur mutisme sur les exactions staliniennes. On le connaît sous le nom d'Alexandre comme chef aimé et admiré de la résistance de la région d'Avignon. Cependant, à la fin de la guerre il n'éprouvera que mépris pour les ralliés de dernière heure et leur zèle à châtier les collaborateurs. Il a refusé de participer à "l'épuration". Il sera marqué toute sa vie par ces années où il a dû ordonner voire infliger lui même la mort à ceux qui menaçaient le réseau des maquisards. Lui qui respectait tout ce qui vivait, les oiseaux, les écureuils , les chiens et surtout deux animaux emblématiques le loup et le serpent.
Char c'est courage, fermeté, dignité et la poésie comme oriflamme.
La biographie est ici un exercice d'admiration mais sans dithyrambe, une trame habile tissée de ses œuvres, de ses amitiés et de ses amours.
Camus a tenu une place essentielle dans la vie de Char. Il était "son frère", un être "absolument bon", dont il a dû organiser les funérailles alors qu'ils venaient de passer quelques jours ensemble à Lourmarin avant que la Facel Véga de Gallimard ne quitte la route à Villeblevin le 4 janvier 1960.  Camus meurt sur le coup, Michel Gallimard cinq jours plus tard.
Il était l'ami de génies comme Picasso, Giacometti ou Brauner, mais il aimait fréquenter les anonymes, les hommes de la terre, de cette terre des eaux de la Sorgue, et partager avec eux dans le silence la jouissance de la lumière et des parfums d'un pays qu'il aime profondément.
Mais il sait déjà que ces paysages sont menacés par l'appétit du gain des grandes compagnies ou par les projets absurdes de l'Etat comme l'installation d'ogives nucléaires sur le plateau d'Albion contre lequel il se battra en mobilisant tous ceux qu'il connait, (et son carnet d'adresses est prodigieux) en vain. La base sera inaugurée en 1968 et démantelée en 1996.
Il n'aura pas le bonheur amer de s'en féliciter en même temps que de constater l’imbécillité d'un tel gâchis. Il meurt le 19 février 1988.
"La mort n'est qu'un sommeil entier et pur"