vendredi 8 janvier 2010

De fruits et de graines ?


Il n’est pas surprenant que tuer des êtres vivants pour s’en nourrir pose aux humains, qu’ils en soient conscients ou non, un problème philosophique que toutes les sociétés ont tenté de résoudre. L’Ancien Testament en fait une conséquence indirecte de la chute. Dans le jardin d’Éden, Adam et Ève se nourrissaient de fruits et de graines (Genèse I, 29). C’est seulement à partir de Noé que l’homme devint carnivore (IX, 3). Il est significatif que cette rupture entre le genre humain et les autres animaux précède immédiatement l’histoire de la tour de Babel, c’est-à-dire la séparation des hommes les uns des autres, comme si celle-ci était la conséquence ou un cas particulier de celle-là.

Hasard de la blogosphère, Bonne Nouvelle cite Lévi-Strauss, à partir d'un article qu'il a fait paraître en 1996 dans le journal La Repubblica.
J'ai choisi un autre extrait, mais vous invite à lire la totalité de la réflexion suscitée par l'épisode de la vache folle et d'une parfaite actualité, 14 ans plus tard.
Il me revient en mémoire ce documentaire "Au nom du progrès" (François Partant, un des grands contempteurs de la folie du développement productiviste). On y visite (entre autres) les usines à bestiaux aux Etats Unis. Un taureau énorme élevé en stabulation auquel on a placé un anneau dans le mufle est "promené" grâce à un rail qui guide la chaine au bout de laquelle l'animal quasi impotent et morne prend de l'exercice. J'ai rarement vu spectacle plus navrant. Pour l'animal et pour toute la chaine de pseudo intelligence qui a abouti à une telle stupidité.
Oui, en ce début d'année, je ne suis pas d'une folle gaité. Ca va revenir, pas d'inquiétude.

L'arbre de la connaissance Lucas Cranach, (1515-1586)

26 commentaires:

Anonyme a dit…

L'homme est un animal qui bouffe de tout— comme le cochon, comme le requin, comme le rat, etc. Il n'est pas différent d'un tas d'animaux mais il le pense et il se pose 50.000 questions, en fait un problème moral (!). Si l'être humain parvenait à se voir comme un animal, il ferait moins de conneries avec son cerveau.
Et puis, qu'il se rassure l'être humain, tout ce qu'il a avalé revient à la terre et aux p'tits asticots. Il finira bien par rendre tout ce qu'il a pris.

JEA a dit…

En ce début d'année, ni folle, ni gaie... les ardennes vous dépêchent un merle moqueur

Vinosse a dit…

C'est vrai que ça rigole pas souvent ici !!!!

Moi j'aime bien la viande cuite, la cuisine en fait...

A ce compte-là on peut penser que la hyène ou le vautour sont des animaux un peu évolués, vu qu'ils préfèrent le faisandé au saignant !!!

D'un autre côté, le renard aussi, qui met sa nourriture en conserve...

Bref, la diversité des espèces et des variétés, végétales comme animales, est entretenue par la diversité des pratiques alimentaires et la curiosité et l'inventivité des espèces évoluées...

Seuls les bien-pensants de tous poils peuvent nous en priver...

Zoë Lucider a dit…

@A, ce que souligne l'article de CLS, c'est l'extrémité d'un système qui tend au cannibalisme puisque dans le cas de la viande folle, on faisait absorber des farines animales issues de carcasses de moutons. Sinon d'accord pour se voir comme un animal, mais justement à ce titre, ne pas accepter que pour nous nourrir on fasse vivre l'enfer à ceux qu'on tue pour nous. Moins de viande et d'animaux qui ont vécu une vie "normale"
@JEA, merci, j'appécie le cadeau
@Vinosse, heureusement que tu viens relever le niveau de rigolade! Sinon on est d'accord, moi aussi j'aime la cuisine mais j'essaie d'éviter la viande nourrie hors sol. Mais toi tu manges tes poules et le renard avec, non ?

renato a dit…

Zoë,

J’avais lu quelque part que le succès de l’animal Homme résiderait dans sa capacité d’adapter son alimentation et donc de conquérir des zones géographiques où les aliments végétaux sont rares où manquent. Ça doit être vrai, cependant cette capacité est devenue une perversion, la seule je crois que nous partageons tous. Je crois qu’il ne sera pas demain la veille que nous nous en sortirons, mais à un moment il faudra s’y résoudre.
Pourtant ce ne devrait pas être si difficile : un enfant a besoin de protéines nobles ; un adulte de mon âge peut s’en passer. Entre les deux il y a des nuances que les nutritionnistes prouvent définir, etc.
Bon, c’est le debout de l’année et on rêve.

MH a dit…

Il faudrait un peu moins d'arrogance dans la tête des 'gens', et le respect suivra.
Il n'y a rien d'autre à dire.

Moi j'aime les deux, le cuit et le saignant.

Jolie illustration, merci Zoë !

Mek a dit…

Personnellement, j'ai compris il y a longtemps qu'il valait mieux ne pas croquer la moule, si l'on voulait éternellement s'y abreuver en cyprine.

Claire a dit…

J'aime beaucoup l'illustration que vous avez choisie Zoë. Très sensée !

Sophie K. a dit…

Je te lisais, et brusquement m'est revenue la vision du premier Tintin que j'ai lu, petite, et de la première notion de "viande en conserve faite à la chaîne" jaillissant sous mes yeux. C'était "Tintin en Amérique", et c'était, paradoxalement, à travers une oeuvre d'imagination, le premier aperçu de l'enfant que j'étais sur le monde des hommes, avec ses absurdités et sa cruauté sous-jacente.
On ne reproche pas à la nature d'être cruelle. On le reproche à l'humain, puisqu'effectivement, comme le dit Anonyme et comme tu le soulignes, il pense, lui...

Zoë Lucider a dit…

@Renato, le problème c'est que les boeufs mangent 5 fois plus de protéines qu'ils n'en restituent, que les maladies cardio vasculaires sont surtout développées dans les populations qui mangent trop de viande. S'il est vrai que l'homme a pu survivre dans des conditions extrèmes en s'adaptant aux milieux où il se trouvait, désormais et c'est ce que dit CLS, il détruit ces milieux pour les adapter à ses propres attentes. Et il se trompe. Rêvons tout de même.
@MH, CLS a d'ailleurs écrit "le cru et le cuit". Pour l'illus, j'ai hésité, j'avais pensé à l'Eden de Jerôme Bosch.
@ É. Je te fais confiance pour préserver tes sources.
@Claire, les pommes sont mes fruits préférés avec les cerises (ah! le joli temps)

Zoë Lucider a dit…

@Sophie K, nous écrivions de conserve, ah ah!juste en même temps. Ma culture tintinesque est peu développée (sauf le Lotus bleu et TT au Thibet) et je ne pense pas avoir lu Tintin en Amérique. Vais vois s'il se trouve dans la collec de mon fiston. Le taureau mené par le bout du nez, c'est aux States bien-sûr!

Vinosse a dit…

" le problème c'est que les boeufs mangent 5 fois plus de protéines qu'ils n'en restituent"

Oui, mais... et le méthane ???

renato a dit…

Je sais, je sais Zoë, et comme j’ai vous ai dit, à mon âge on peut se passer de viande.



Vinosse,
dans un pays du nord de l’Europe (je ne me souviens pas lequel) il y a une taxe sur le cheptel spécifique pour le méthane.

MH a dit…

Un tableau de Bosch aurait été moins gentillet et plus adapté à votre texte mais la fraîcheur(!)a du bon.

Oui,oui, le cru ou le cuit, la pensée sauvage ou la pensée civilisée, les plumes ou les ordis, toutesces connaissances se valent et démontrent une même capacité à appréhender le réel!
Je vous disais 'l'arrogance'...

D. Hasselmann a dit…

Les taureaux ne s'ennuient pas seulement le dimanche.

Et il y a aussi un jardin des délices chez Bosch !

dominique boudou a dit…

C'est un coup à devenir végétarien, cet article ! Et dire qu'il y a une entrecôte pour le dîner. Enfin, comme le boeuf vient de mon jardin, je ne culpabilise pas.

Zoë Lucider a dit…

@Vinosse, on pourrait pas s'arranger pour placer des sacs au cul des vaches et recueillir le méthane, combustible naturel. Ce serait joli dans les près, les vaches et leurs jolis ballons non ?
@Renato, vous êtes à un âge si canonique ? Respect.
@MH Gardons Bosch pour la jouissance
@DH, oui, la corrida n'est qu'un mauvais moment à passer, comparée à la mornitude de ces usines à viande.
@dominique boudou, bon appétit, régalez-vous, qu'au moins il ne soit pas mort pour rien :-)

Anonyme a dit…

Il y a certains humais que je boufferais plus volontiers que n'importe quel animal.
Mais au figuré bien (en)tendu car tout le monde sait maintenant que manger son voisin, c'est manger son âme. Il faudrait donc trouver, je ne sais pas, un vieux rat (ou une vieille rate) de bibliothèque. Berk !

Anonyme a dit…

Je n'ai pas senti venir la faute !

Zoë Lucider a dit…

@Dom A c'est Homais qui devait se faire bouffer peut-être, mais je saisis bien l'intention. Le seul cannibalisme jamais éprouvé, c'est celui, très retenu, de croquer les petits orteils des bébés, mmmmh

renato a dit…

Avec les critères d’aujourd’hui je ne suis pas si vieux, disons que je suis désormais loin de l’âge de la croissance.

chantal serrière a dit…

Age d'or également pour tant d'allergiques..au gluten!

Zoë Lucider a dit…

@Renato, pas encore dans la décroissance, j'espère
@chantal serrière, en effet, cela existe hélas pour eux.

renato a dit…

Je ne suis pas encore à la décrépitude ni au gâtisme, Zoé, mais j’ai confiance : ça viendra.

Zoë Lucider a dit…

@Renato, ce n'est pas obligatoire. Voyez Lévi-Strauss, l'esprit alerte jusqu'à la fin. Je vous le souhaite

Cactus a dit…

j'apporte mes petites graines un peu tard !
j'ai un grain , je sais !!