mercredi 29 avril 2009

Voyages, voyage



Clopine m'a soufflé le sujet du jour. Elle s'extasie du miracle de l'avion qui vous fait traverser le monde en quelques heures et ce, grâce à l'abnégation des personnels, de l'hôtesse, qui mime pour la énième fois, les consignes de sécurité ayant vocation à ne point servir, au pilote qui vous arrache et vous dépose de là à là sans défaire le brushing. Elle dit avoir peu usé de ce moyen (épouvantable bouffeur de pétrole, d'oxygène, générateur de bruit et de méchants gaz) et être la première génération de sa lignée.
Il se trouve que j'ai dû utiliser l'avion à un rythme sans commune mesure avec celui de notre Très Haut et de ses différentes cours, mais cependant plutôt soutenu à une époque.
Comme Clopine, je souffre de cette douleur épouvantable qui au moment de l'atterrissage, à cause de la dépressurisation, se vrille au niveau des sinus et de l'oreille, de sorte qu'on a l'impression que tous les vaisseaux vont exploser et qu'une AVC va finir par nous anéantir. La première fois du moins, parce qu'ensuite, on ne saurait dire qu'on s'y habitue, du moins sait-on qu'on en réchappe.
Des avions manqués, retardés, détournés (pour cause de verglas, de brouillard, de tempête), des valises perdues, des correspondants qui ne vous attendent pas et vous ne savez pas où vous devez vous diriger, des transferts anxiogénes (Ammam, 40 degrés pas de climatisation , les avions en retard, des annonces indéchiffrables, des gens qui s'évanouissent par suffocation), des transits au pas de charge, des appels qui ne vous sont pas parvenus parce que votre nom est vraiment trop déformé, des itinéraires étranges, particulièrement alambiqués pour complaire aux impératifs d'un prix d'agence (ainsi un Dar Es Salam / Paris, via Moscou, Aéroflot la compagnie la moins chère). Mille anecdotes.
Nous allons au Maroc chez des amis, janvier est terrible, nous espérons le soleil. Comme nous sommes coincés dans la salle d'embarquement, un type fait preuve d'un bagout inouï, nous récitant du Céline, du Flaubert, du Baudelaire, comme il respire. Fabrice Lucchini avant qu'il ne soit très connu, il n'a encore tourné que (si on peut dire) dans le Perceval de Bresson. Au retour, trois semaines plus tard, c'est la fuite du Shah et son atterrissage en catastrophe a Marrakech qui nous retient une journée supplémentaire dans un très bel hôtel, où nous retrouvons Lucchini et son verbe fougueux.
L'avion entre New Delhi et Katmandou (bien après la ruée vers l'Inde des années 70) où je constate que les femmes secondent spontanément les mères lorsque les enfants brament pendant que nous dégustons de délicieuses brochettes de lamelle de viande qu'on croirait cuites au brasero.
Un Fokker qui tangue entre Paris et Brème sans interruption de sorte que lorsque nous atterrissons je mets un temps fou à trouver l'équilibre ordinaire, joscille comme sur le pont d'un navire.
Une arrestation ubuesque à Frankfort: nous sommes deux hommes et quatre femmes et les deux ressemblent à on ne saura jamais qui. Nous sommes dérivés alors que nous sommes en transit et nos bagages fouillés et nos inquisiteurs ont beaucoup de mal à accepter de nous relâcher, nous étions censés représenter une grosse prise semblait-il.
Un avion minuscule de 20 places dans lequel on ne peut se déplacer qu'en se courbant et qui nous offre un panorama sur les plaines à céréales du Saskatchewan où on ne décèle aucun édicule attestant de l'existence de cultivateurs pour ces immenses étendues de blé.
Un jour, je manque l'avion pour Palerme après moultes péripéties dont je vous fais grâce mais qui m'ont littéralement réduite en charpie, je décide de ne pas prendre le suivant et de ne plus jamais utiliser l'avion.
Je ne me suis pas tenue à cet intégrisme, à cet absolu tabou, mais il est vrai que j'ai réorienté ma vie, en partie pour échapper à la foire des aéroports qui se ressemblent et sont tous uniques. Mention spéciale pour celui de Chicago où on prend des navettes qui longent des kilomêtres de batiments où stationnent et se démènent des milliers d'artisans de ce miracle du déplacement dans l'espace et le temps, où on est accueilli avec des chiens et où dans les couloirs passent en boucle le rappel des consignes de sécurité.

Voyage donc. Aujourd'hui, jeudi, je prend le TGV et je "monte à la capitale". Visite d'amis, observation du mouvement social de ce premier mai, l'expo de Calder à Beaubourg si le temps de queue n'est pas décourageant et grande fête d'anniversaire d'une amie chère avant de revenir sous le soleil exactement, lundi.

Illustration : Alexander Calder. Joséphine Baker (IV), vers 1928
© Calder Foundation, New York / Adagp, Paris 2009

mardi 28 avril 2009

Déjà né, pas encore mouru



Nous sommes des statues de terre chaude, d'insectes mis à nu, antennes ténues et molles, ballotés au hasard de courses ahuries. Nous pousse au ventre un démiurge têtu, aveugle et sourd. Nos yeux sont des vitrines ou vaquent des fantômes, notre bouche une meule déhanchée, nos oreilles des tambours vrillonnants.

Corps, susceptibles, précaires, capricieux, frôlant, foulant un destin idéal, femmes en demande de la lance des hommes, hommes en labour, assassins de leurs propres naissances, expurgeant au dehors l'irrécusable mystère du dedans.

La vie erre ainsi au domaine des morts, désir et peur du devenir, hors du marbre de l'éternité.

Pour je, naître n'a pas de futur, je ne naîtrai plus. Mourir n'a pas d'antérieur. Je n'ai pas pas encore mouru.

Je ris de vivre en cet étrange miroir.

Photos 9 avril 09 ZL


dimanche 26 avril 2009

Vent des blogs 10. Météo pourrie ? Lisons !



Ce sera un tout petit vent, tout doux. Notre Cactus s'est enfin décidé à ranger un peu son foutoir en un lieu accessible à ses visiteurs où il ne se prendront plus les pieds dans les tapis. C'est très aéré, de bon goût, bref n'hésitez pas, la République des Ivres n'est pas morte. A votre santé !

Comme si je n'avais pas assez des piles de livres qui s'entassent à mon chevet (oui ce sont eux qui me veillent), hier, j'ai passé mon après-midi au Salon du livre et du Vin (ça va ensemble non ?) de Balma. , et j'ai envie de passer en revue mes recrues des derniers jours, tous ne relevant pas de cette dernière expédition.

Lepape, j'avance lentement en alternant avec d'autres. Actuellement (469 /702), Girardin (1806 -1881) invente "La Presse", ancêtre de nos médias, avec financement via la publicité et inaugure l'ère des écrivains tâcherons qui se crèvent à pisser de la ligne de feuilleton pour survivre. Balzac, Dumas et beaucoup d'autres vont tirer subsistance de ce qui fournira par la suite les romans de ce XIXème où le genre va devenir florissant. Première littérature populaire et premier capitalisme de presse.

"Le prof de philo nous a demandé de lire un livre de Schopenhauer qui s'appelle esthétique et je sais plus quoi. Puisque tu vas à Ombres Blanches*, tu peux me le ramener, maman s'il te plait (oui ma fille s'adresse à moi en termes délicats, surtout dans ce genre d'occurence). J'ai donc adjoint à Esthétique et Métaphysique, le petit traité L'art d'avoir toujours raison, dédié à mon usage personnel et dont j'extraies ce passage de l'ultime stratagème (38 en tout) [...]de cent hommes, on en trouvera à peine un seul qui soit digne qu'on discute avec lui. Quant aux autres, qu'on les laisse dire ce qui leur passe par la tête, car desipere est juris gentium (c'est un droit de l'homme que d'être idiot), et qu'on médite ce conseil de Voltaire: La paix vaut encore mieux que la vérité. Méditons.

Au Salon, Bernard Maris (Oncle Bernard à Charlie Hebdo) présentait son dernier opus Capitalisme et pulsion de mort (Albin Michel) écrit en collaboration avec Gilles Dostaler. En 1930 Freud (Malaise dans la culture) et Keynes (Perspectives économiques pour nos petits enfants) font la même analyse. Le capitalisme et l'obsession de l'accumulation relèvent de ce que Freud a nommé la pulsion de mort et dont il pronostiquait les pires conséquences. Freud était pessimiste : Les hommes sont maintenant parvenus si loin dans la domination des forces de la nature qu'avec l'aide de ces dernières il leur est facile de s'exterminer les uns les autres jusqu'au dernier. Keynes espère encore que le pire peut être évité : Nous honorerons ceux qui sauront nous enseigner à cueillir chaque heure et chaque jour de façon vertueuse et bonne, ces gens merveilleux qui savent jouir immédiatement des choses, les lys des champs qui ne peinent ni ne filent. Freud va mourir à Londres en 1939 au pire moment du délire hitlérien et Keynes en 1946 après avoir été un des principaux artisans des Accords de Bretton Woods qui ont permis la mise en oeuvre des Etats providence de l'après guerre, mais avant la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Je reviendrai sur ce livre lorsque je l'aurai lu.

Pour la littérature, écouté hier débattre Régine Detambel (Noces de chêne, Gallimard) et Pascale Kramer (L'implacable brutalité du réveil, Mercure de France). Aux deux bouts de la vie, les tabous ligotent les êtres dans un mutisme contraint. Les amoureux octogénaires doivent affronter le scandale que suscite leur passion jugée indécente. Les jeunes parents ne peuvent exprimer la terreur qui les assaille, dès la naissance de l'enfant, à l'idée qu'ils ont peut-être commis une erreur en s'accouplant et plus encore en faisant naître de cette union une nouvelle vie. Les livres sont les seuls instruments pour se débarasser de ces alliénations.

J'ai bavardé avec plaisir avec Pia Petersen dont j'avais apprécié la pugnacité du discours au cours d'une table ronde où elle avait clairement positionné l'Art comme nécessairement politique. Son héros Iouri dans son livre éponyme (Actes Sud) pousse l'engagement politique de son art au point que sa compagne finit par craindre qu'il ne franchisse le cap de la criminalité. Pia Petersen est Danoise et s'est "enfuie" (ce sont ses termes) du Danemark à l'âge de 16 ans pour échapper à l'anesthésie d'une société où le tout sécuritaire enferme chaque geste sous la chappe du contrôle social. Le modèle scandinave dit'elle tant vanté pour ses vertus est en fait basé sur la mise sous tutelle des citoyens par la mise en oeuvre du tout sécuritaire. Pour elle la France est un pays où on respire encore un air de liberté mais pour combien de temps. Ce fut le sujet de notre échange.

Anne-Christine Tinel (Tunis par hasard, Editions elysad) a vécu sept ans en Tunisie. Dans son roman édité par une petite maison tunisienne, elle entremèle une histoire de vie et la description de ce pays qu'elle a rencontré, elle aussi pour fuir une situation douloureuse. Elle avait auparavant vécu en Algérie, puis en France et dit se sentir essentiellement méditéranéenne. Nous avons parlé de ces doubles appartenances lient en nous nos origines et un pays de coeur, de la difficulté de se réacclimater après une longue absence et de la difficulté d'écrire tout en travaillant et élevant des enfants. Rien d'original, mais un vrai plaisir d'échange. J'attends de la lecture de son livre une immersion en terre d'Afrique du Nord.

Je me suis dévoilée (ah bon c'est Zoë ? quelle surprise ! bonne ou mauvaise, ils ne l'ont pas dit) à Manu Causse et Emmanuelle Urien, dont j'avais déjà lu les livres et avec qui je causais de temps à autre par blog interposé. Deux belles personnes que j'espère revoir, puisque nous sommes toulousains, eux permanents et moi intermittente.

Il y avait tant d'autres à rencontrer, Jean Rouaud par exemple, mais je parlai avec Régine Detambel quand il présentait son dernier livre La femme promise. Mabanckou dont on lisait aujourd'hui, en sa présence Mémoire de Porc-épic et je n'y suis pas revenue. Temps pourri (40km sous la pluie) et mille autres choses à faire dont ce billet n'en est qu'une.

Emmanuelle Pagano (Le tiroir à cheveux ) n'était pas à Balma, mais son livre est en cours. A la page 20. J'espère qu'à la page 40 je serais plus séduite, on m'en a dit si grand bien.

Pour conclure ce patchwork un peu foutraque, un article dans Politis de cette semaine Mensonges et infantilisation (p 26, 27). Olivier Doubre s'entretient avec Michela Marzano, à propos de l'ouvrage qu'elle vient de publier Le fascisme, un encombrant retour ? (Larousse "Philosopher"). Elle s'alarme des signes qui montrent en France et en Italie que nous sommes entrés dans un régime autoritaire, antichambre éventuelle d'un nouveau fascisme.
Philosophe italienne vivant en France, chercheuse au CNRS elle est convaincue que les intellectuels et en particulier les philosophes doivent assumer leur rôle et dénoncer de risque d'un "encombrant retour" et considère en s'appuyant sur l'apport de la pensée critique de l'Ecole de Francfort, notamment celle d'Adorno "qu'au moment où l'on a encore la possibilité de s'exprimer, ce qui est le cas (elle se doit de s') engager pour permettre à la pensée de rester vivante.

Restons vivants !
Celle-ci, ci-dessous, l'air de rien, est enceinte. Encore une portée qu'il faudra distribuer auprès de parents adoptifs. Si ça vous tente, n'hésitez pas à passer commande

Et pour être absolument complète: Fronton Château Bouissel et Corbières Château Serres Hauterive Le Vieux Salon du Livre et du Vin.

*Pub gratuite pour ma librairie chérie sise à Toulouse
Photos ZL

jeudi 23 avril 2009

Noircir pour mieux blanchir





Pour justifier le bienfondé d'une domination, il importe de souligner les faiblesses constitutives du dominé en le décrivant sous les traits les plus négatifs tout en l'idéalisant quelque part pour motiver notre générosité à son endroit. [...] "Noircir" et "dénigrer" (littéralement ) l'Africain pour mieux "blanchir" le Blanc [...] L'essence même de ce que nous ne tolérons pas : qu'une réalité puisse échapper à l'emprise de nos catégories"
Roland Louvel. L'Afrique Noire et la différence culturelle, L'harmattan, 1996.


Sculptures Ousmane Sow

mardi 21 avril 2009

Complices de l'inavouable

Fichier:Rwanda Gitarama landscape.JPG

J'écoutais ce soir, dans ma voiture chargée de cageots de légumes à destination de mes voisins amapiens* (j'étais de distribution aujourd'hui), l'émission de Kathleen Evin, L'humeur vagabonde,
Invité à s'entretenir avec l'hôtesse Patrick de Saint-Exupéry pour son livre "Complices de l'inavouable, la France au Rwanda"qui reparait aux Editions les Arènes. Ce journaliste ne décolère pas depuis 15 ans, depuis qu'il a assisté en direct au génocide des Tutsis au Rwanda, terme que la france ne parvient pas encore à valider pour des raisons extrèmement glauques, compte tenu de ses responsabilités indirectes sinon directes dans ce drame abominable.
Le Rwanda, je l'ai connu en 1982 et déjà les tensions ethniques entre Tutsis et Hutus étaient très fortes. Cette région de l'Afrique centrale, ex colonie belge était en effervescence. Des transfuges se croisaient de l'Ouganda ou Amin Dada avait furieusement sévi, du Burundi où les Tutsis régnaient après de sanglantes ponctions dans les rangs des Hutus (en 1973 notamment, environ 200000 morts) et juste le contraire au Rwanda. Sans parler des Zaïrois de la région du Kivu déjà et encore aujourd'hui en rébellion armée contre Kinshasa.
A Kigali, nous avions rencontré un jeune attaché culturel de l'Ambassade de France avec qui nous avions lié une amitié autour de la musique et du match de foot France Allemagne qui avait polarisé toute la capitale le temps d'une soirée mémorable que j'avais partagée avec C. une adorable Tutsi guère plus intéréssée par le football que je ne le suis.
Quelques mois plus tard, rentrés en France, nous apprenions que C. avait été emprisonnée dans un camp en raison de ses relations avec les Blancs, promues au rang de crime selon un décret dicté par la femme du président Habyarimana, celui qui devait mourir 12 ans plus tard dans l'attentat de son avion, évènement considéré comme le déclencheur du massacre qui s'ensuivit.
En 1982, notre ami (juif d'une famille très religieuse) était reparti à Kigali et avait épousé la sublime C. (sans en dire un mot à sa famille, une goy, noire de sucroît !) pour la tirer de son camp. Nous l'avions accueillie, elle avait eu le crâne rasé mais elle était sauve. B. et C. commencèrent leur vie de couple, séparée en toute amitié et elle trouva du travail et se mit à apprendre l'accordéon.
En 1994, nous avions organisé une fête pour saluer tous nos amis avant d'embarquer nos meubles, nos chats et nos enfants et rejoindre nos terres du Sud Ouest où se cultivent les maïs dont on gave les canards. C. avait promis d'être des nôtres. Le veille elle apprit que sa famille avait été enfermée avec plus de deux cents autres dans une église à Kibuye et qu'après la machette, c'est le feu qui avait achevé le "travail".
Une de ses soeurs avait réussi à s'échapper. C. lui obtint un visa et un ticket d'avion. Elle mourut sur la route qui la conduisait du Zaïre à l'aéroport de Bujumbura.
C. obstinée, finit par découvrir que son plus jeune frère que sa mère avait eu avec un Hutu avait été épargné. Elle finit par le retrouver, le faire venir en France, l'inscrire dans une école. Un jour, il a fugué et s'est engagé dans la Légion..
C. entre temps avait préparé un master de logistique et travaille désormais dans des ONG, elle doit être au Soudan après l'Arménie où elle a bien cru mourir de froid, la Guinée, le Tchad et d'autres que j'oublie ou ignore.
Ce soir, je ressens à nouveau le malaise et l'amertume qui me submergeaient, l'écoutant me raconter les péripéties de ses recherches, y compris lorsque au risque de sa vie elle est revenue enquêter à Kibuye. "Il fallait que je voie l'église brûlée pour y croire".
C'est la personne la plus douce, gaie, intelligente que j'aie jamais rencontrée. D'une beauté extraordinaire comme beaucoup de Tutsis. Je pense à elle ce soir. Et, oui, je crois que par notre indifférence à tout le moins nous avons été les complices de l'inavouable.

Photo Wikipedia

dimanche 19 avril 2009

Le vent des blogs 9


Bon, il me faut l'admettre : ce vent hebdomadaire est pure contrainte, réservée à moi seule. Qui s'inquiète de suivre cette collection ? Répondez !
Je vais n'en faire qu'à ma tête de l'art , tant pis si c'est incohérent, mal rabouté, voire disjoint. Qui ça pourrait gêner, hein ?
J'ai scrupule à citer de nouveau la République des Libres (j'aime bien l'intitulé), je n'ose pas vous y envoyer, c'est un cercle fermé assez peu bienveillant à l'égard des égarés et si vous ne faites pas partie des happy fews, contentez vous d'éventuellement aller voir de quoi ça cause, faites un commentaire mais n'espérez rien en retour. J'y ai appris que Michelangelo di Lodovico Buonarroti Simoni mieux connu comme Michel-Ange (1475-1569) peintre, sculpteur, architecte a été également poète. Il a écrit une cinquantaine de poèmes, sonnets et madrigaux, datables de 1535 à 1541, d'inspiration souvent humaniste. Plusieurs de ces sonnets ont été mis en musique, notamment par Benjamin Britten et Dmitri Chostakovitch. Ces poèmes, inédits de son vivant, seront publiés par son neveu, Michelangelo le Jeune, en 1623 (ça c'est wikipédia). Sur la RDL un exemplaire de sa poésie était proposé en devinette (c'est le jeu favori du groupe), traduite à mon avis de façon un peu curieuse
[...]
"Amour, grottes fleuries, muses,
ce que je chante ou gratte devient tambourin et papillotte
pour l'auberge, le lupanar ou les chiottes."
[...]
"Les chiottes " aux alentours de 1540, ça nous a tous égarés même les plus érudits.

Tania, après un petit tour dans notre sud où elle n'a trouvé que pluie et vents est revenue en bonne Belgique sous le soleil et s'intéresse à Coeur de chien de Boulgakov. Ca m'a rappelé que Le maître et Marguerite soupirent sur l'étagère depuis des lustres. Jamais réussi à m'y attaquer. J'éviterai de vous faire la liste de tous ces dormants qui mangent leur poussière sans moufter. En ce moment j'ai attaqué L'art de vieillir de John Cowper Powys, un auteur profondément panthéiste, juste ce dont j'ai besoin pour revitaliser mon âme païenne.

Les abeilles et les architectes nous rappellent que nos amours sont le produit de nos réciprocités butineuses, alors que les artistes de la pollinisation sont menacées de disparition et nous risquons fortement par contingence de débander nous aussi. C'est un très beau texte.

Ca c'est un clin d'oeil d'Henri Zerdoun. Plutôt qu'un long discours...

L...c qui visite ici de temps à autre, fabrique pour son blog de petites scènes animées souvent drôles, empreintes de relents d'enfance et particulièrement celle du jour d'hier ( samedi 18 04), intitulé Otite, o' désespoir (oui humour + référence chic, très classe), qui rappelera à chacun une occasion de frustration intense : privé de jeu pour cause de maladie.

Et tiens une nouvelle, petite racine (ça ressemble à un nom Hopi). Elle prétend que dans les couloirs du métro, les affiches nous regardent Et pendant que les yeux embusqués des images nous charment, nous appellent, nous oublions de nous regarder les uns les autres, nous les passants de chair, pas encore collés au mur.
Dépêchons-nous de nous regarder dans le blanc des blogs avant que l'Hadopi nous vitriole le paysage

Photo Pêcheurs sur la plage de Ngor, Dakar. ZL

samedi 18 avril 2009

Qui veut partager des millions


Tu devrais voir Slumdog millionaire, maman, il a eu huit oscars. Mouais, je me méfie toujours des films sur récompensés. Comme l'adorable jeune fille organisait une fête, ma foi, l'occasion se présentait (disparaitre momentanément).
Réalisé par Danny Boyle, ce film est l'adaptation du roman de Vikas Swarup, Les fabuleuses aventures d'un Indien malchanceux qui devint milliardaire. Les interprètes en sont Dev Patel, Anil Kapoor, Irrfan Khan, Madhur Mittal, Freida Pinto, Saurabh Shukla.
Dany Boyle, c'est le réalisateur du film choc, Trainspotting qui nous "trainait" dans l'univers totalement hors norme de junkies graves.
Cette fois, DB adapte un roman et réalise un film à la mode bollyvoodienne tout en conservant l'art des images terribles ( violence d'une agression d'une communauté musulmane par des fanatiques hindouistes, énucléation des yeux d'un enfant par des adultes exploiteurs d'orphelins, violence des relations de castes, sursaturation des foules, etc).

La force du film tient dans l'alternance des temps de la narration : Jamil, un jeune Indien, orphelin, issu des bidonvilles de Mumbai (ex Bombay), est sur le point de gagner l'épreuve ultime du jeu "Qui veut gagner des millions". Il a été arrêté par la police qui le soupçonne de tricherie et il est interrogé (à l'aide d'une gégène éventuellement) afin de lui faire révéler comment il est parvenu au sans faute. Le film retrace les temps forts de la vie du jeune homme,(Dev Patel, excellent interprète, juste, touchant) animé d'une obsession, retrouver Latika, son amour né dans l'enfance, dans le partage des pires épisodes du manque et de la peur. Le film se déroule donc dans l'alternance entre le face à face avec le flic qui l'interroge, les épisodes forts remémorés qui lui ont permis de trouver les réponses et le temps du jeu dans la frénésie engendrée dans les couches populaires par ce type de saga.
C'est un melting pot entre techniques ultra sophistiquées et précarité des vies décrites, entre le Mumbai des bidonvilles et celui des immeubles qui sont construits sur l'éradication des taudis , les centres de téléphonie high tech, les mafias proliférant sur la misère, fondée sur une société très inégalitaire et traversée par les haines entre religions historiquement opposées. Le film est efficace et l'air de rien incorpore des références puisées dans la culture indienne mais au-delà à un fonds désormais commun à l'ensemble de l'humanité.
C'est un thriller et une histoire d'amour. Salman Rushdie aurait objecté que l'histoire est invraisemblable, qu'un jeune des bidonvilles ne pouvait aucunement prétendre à ce type d'exploit. Oui, mais les contes n'ont jamais prétendu à la vraisemblance, mais à l'illustration d'utopies morales.
On apprend par une dépèche du 16 avril que "Le réalisateur de "Slumdog Millionnaire" Danny Boyle a annoncé jeudi que 747.500 dollars seraient versés à une organisation caritative qui se consacre aux enfants des rues de Mumbai (ex-Bombay) en Inde.

Cette somme est accordée à Plan, une organisation internationale qui travaille en Inde depuis 1979. L'objectif est de contribuer à la scolarisation de 5.000 enfants des bidonvilles au cours des cinq prochaines années.

"Ayant tellement profité de l'hospitalité de la population de Mumbai, ce n'est que justice qu'une partie des recettes du film soit reversée à la ville, dans les quartiers qui en ont le plus besoin et là où il peut vraiment changer des vies", explique Danny Boyle dans un communiqué.

"Slumdog Millionnaire", qui raconte l'ascension d'un enfant des bidonvilles, a remporté huit Oscars et récolté plus de 200 millions de dollars de recettes dans le monde.

Un énorme succès qui n'a pas échappé à la polémique, certains accusant la production d'avoir profité de la misère de la population mais oublié de partager les recettes et d'avoir exploité les deux enfants stars du film, Rubina Ali, neuf ans, et Azharuddin Mohammed Ismail, dix ans, qui ont grandi dans un bidonville de Mumbai, à quelques minutes seulement d'un quartier luxueux de Bollywood.

La production a annoncé jeudi avoir désigné trois tuteurs possédant une longue expérience des services sociaux pour gérer le fonds mis en place pour les deux enfants, précisant que les deux jeunes pourraient puiser dans le fonds après l'obtention de leur diplôme après le lycée. Le fonds Jai Ho doit permettre d'assurer que les deux jeunes puissent recevoir une bonne éducation, un logement adéquat et un soutien financier, selon la production qui n'a pas précisé le montant de ce fonds."

Si tous les films qui exploitent les aspects les moins reluisants de l'humanité pouvaient de temps à autre participer à l'allègement des fardeaux, ma foi, on irait au cinéma avec d'autant plus de bonheur.

vendredi 17 avril 2009

La terreur des fourmis

Toutes nos vies sont souterraines. Leurs affleurements sont fugaces.
Comme ces chevaux de cirque dont la peau de coton unit mal les deux êtres qui les composent, animés de deux volontés acharnées à tirer à hue et à dia, ne parvenant ni à avancer, ni à reculer, le ventre agité des remous de la lutte, nous composons ce puzzle livré en vrac à la naissance, colmatant les ruptures tandis que de nouvelles fêlures entreprennent de ruiner nos ajustements savants.
Toutes nos vies pérégrinent sous le ciel indifférent, laissant d'infimes traces, qui mettent en alerte avant tout les fourmis écrasées sous nos pas.
Rions de ce comique involontaire, puisque nous sommes impuissants à nous extraire de notre enveloppe sauf à y déchirer nos entrailles.

Pour une note optimiste, une vidéo qui circule, peut-être connaissez vous. Elle m'a été transmise par mon ami Phildo avec ce commentaire : Le printemps sera musical ! Et révolutionnaire ?

mercredi 15 avril 2009

Les belles des seigneurs

Dans l'oeuvre d'Albert, j'ai une tendresse particulière pour Mangeclous même si dans un premier temps je n'avais d'yeux que pour Solal. J'ai lu la Saga du solaire Solal et son amour fou pour la belle Ariane quand j'avais à peine vingt ans, saga tragique, il s'entend, les histoires d'amour finissent mal...
J'ai lu Mangeclous et Le livre de ma mère beaucoup plus tard. Mon époque romantique sérieusement édulcorée par les prosaïques leçons de l'ordinaire du vivre , j'ai été friande de la truculence des valeureux d'autant qu'ils me rappelaient ma Grèce chérie. Et j'ai été émue Le livre de ma mère, somptueux tribut à la mère disparue.
Cohen est un oriental, ainsi se définit-il et en effet il en a les grandeurs et hélas les limites. Lisant la biographie que Frank Médioni lui consacre je (re)découvre ce qui m'était difficile lors de mes lectures, qui me provoquait un rire étranglé, la misogynie du grand littérateur, alors même qu'il ne peut vivre sans femme, puisqu'il admet lui-même que sans elles, il n'aurait pu écrire. Sans sa mère, ses trois femmes successives, sa fille, sa fidèle secrétaire Anne-Marie Boissonnas et toutes celles qui se sont laissé subjuguer par ce grand séducteur, il n'aurait pu mener à bien une entreprise aussi colossale que la rédaction de Belle du Seigneur (trois fois recopié, remanié plus de mille pages à chaque mouture).
Après avoir terminé la lecture du livre de Médioni (Albert Cohen, Folio Biographie 2007), feuilletant Le livre de ma mère, je repense à celui que Romain Gary consacre à la sienne (La promesse de l'aube). L'un comme l'autre sont des Juifs exilés, fils uniques. Cohen connait son père mais il a un rôle secondaire dans sa vie, il le méprise, lui en veut de maltraiter sa mère. Le père et la mère de Gary se séparent quand il n'a pas dix ans. Cohen comme Gary ont affaire à des mères (juives) en totale dévotion. Ils puisent aux ressources de ces puits d'amour avec l'inconscience et l'égoïsme de petits potentats. Ils aiment leur mère mais elle leur fait un peu honte, elles détonnent au sein des univers qu'ils essaient de conquérir dans leur soif de reconnaissance et leur terrible besoin de séduire. Et puis un jour, elles meurent. Seules, terriblement seules et ce désastre que les fils n'avaient jamais vraiment envisagé est irréparable. Ce qui n'a pas été dit quand elle était vivante ne pourra jamais la rejoindre comme ultime consolation. "Elle est sous terre, une inaction, une langueur, une prostration. Dieu que tout cela est absurde. Cohen écrit pour que les fils dont la mère est vivante les aiment mieux. mais il sait que "aucun fils ne sait vraiment que sa mère mourra et tous les fils se fâchent et s'impatientent contre leurs mères, les fous si tôt punis."

Cohen comme Gary sont des tyrans domestiques. Cohen avoue un goût (souligné par Médioni) pour les scènes. Quand il reçoit il refuse que sa femme et sa fille soient présentes. Il impose une stricte observance de ses manies et de l'isolement social dans lequel il se complait, enclin à la dépression. En revanche elles sont enrôlées pour écrire sous sa dictée, reprendre inlassablement la frappe après chaque correction. Une de ses femmes (Marianne) se révoltera et ils divorceront. Pas assez soumise. Les autres accompliront ce pour quoi elles sont aimées.

Je me disais que derrière la plupart des créateurs, il y a une femme (mère, épouse, fille, voire servante, la Céleste de Marcel) qui seconde, déleste le grand homme de l'intendance afin qu'il puisse se consacrer exclusivement à son art, ce n'est pas le moindre, mais également l'encourage, le corrige, le réconforte, le stimule et l'apaise.

A contrario, les femmes créent en dépit des obstacles qui ne sont levés par personne, voire sont placés en chicane par l'homme jaloux du talent de sa compagne. Quelles exceptions confirment la règle ? On a dit par exemple que le mari d'Alexandra David Neel finançait généreusement les voyages de sa femme. En réalité elle possédait une fortune personnelle et fut soutenue par le truchement d'ambassades et de ministères.

Les couples où la femme parvient à se faire un nom ? Par le passé, la grande George Sand, phénoménale, mais Musset et Chopin néanmoins plus en postérité; Colette pillée par Willy avant de seule trouver son chemin. Sartre et Beauvoir ? Cixous /Derrida ?(Derrida a déclaré qu'Hélène était le plus grand écrivain français vivant mais lui est mort désormais). Actuellement Tzevan Todorov /Nancy Huston, Paul Auster/Siri Husdvest, et quelques autres. Si peu.
Peut-être désormais existe-t-il des couples où l'homme se dédie à l'oeuvre de sa femme pour qu'elle puisse se consacrer exclusivement à déployer son génie. Des noms !

dimanche 12 avril 2009

Le vent des blogs 8


Hugo Hachebuisson en hommage à Hugo Hackenbush, personnage de Groucho Marx dans Un jour aux courses, Bison Ravi, Agénor Bouillon, S. Culape, Adolphe Schmürz, Boriso Viana, Gédéon Molle*, nul doute que Boris Vian aurait sévi sur le Net avec des pseudos tous plus hilarants les uns que les autres.
Chez Clopine, une petite histoire autour des pseudos , l'a engagée sur une autre histoire de pseudos, nous contant à sa manière où se mêlent délicatesse et gouaille, observations fines et anecdotes brut de béton, les débuts des radios libres.
Il est vrai que l'usage de contrefaçons identitaires est l'un des charmes de cet étrange salon où l'on écrit, la blogosphère où chacun est une petite étoile qui babille dans l'infini silence des galaxies.
Au nombre de pseudos utilisés sur la RDL s'ajoutent les pseudos circonstanciels inventés pour coller au commentaire. J'avais ainsi commis un "la glaneuse des glandeurs", tant il est vrai que sur le blog de Passouline, en passant et repassant, on rencontre quelques piliers inamovibles qu'on imagine se consacrant pour tout ou partie du jour à l'exercice du commentaire.
Un évènement vécu en direct sur la RDL (République des Livres), l'accident cardiaque de Montaigne à cheval, (MàC pour les intimes) créateur par ailleurs de la RDL (République des Libres), une faction séditieuse semblerait-il, qui draine une bonne partie des abonnés d'Assouline.
On y joue à l'énigme du samedi soir, textes proposés dont il s'agit de deviner l'auteur. Ce samedi, en commentaire, nous avons eu droit en direct, après résurrection de MàC, à une Petite chronique d'Hostoland où il nous dépeint avec truculence, les péripéties d'une admission en urgence et le personnel attentionné qui "vous met une liquette réglementaire, à boutons dans le dos, comme les Saint-Simoniens de jadis... qui pensaient, ces fromages, qu'en se forçant à demander l'aide d'un autre pour se boutonner, naîtrait la fraternité..."
On retrouve couramment les mêmes et quelques autres chez Paul Edel érudit amoureux des textes, intervenaute de qualité, révéré par une cour (dont je suis), mais truffant ses textes de coquilles qui leur donnent parfois des tournures proprement hilarantes. On lui pardonne grâce au plaisir de lecture qu'il nous offre.
Au nombre des blogs dédiés à la littérature découverts ces derniers jours, celui de Sapience Malivole dont la Physionomie de ci-boire m'a inspiré ma carte postale de Samos, le Cabinet des curiosités d'Eric Poindron et entre autres ses singulières MISCELLANÉES & SPICILÈGES.

Du côté des internautes préoccupés d'actualité, carton rouge de Kamizole pour Lellouche et Lefevre, l'un regrette le temps où on pouvait régler les différends à coup de pistolet au petit matin avec deux témoins, l'ennemi ce jour là étant Mélenchon et l'autre pour son niveau élevé de productions de çonneries notamment sur le contrôle d'Internet qui lui vaut un Big Brother Award.
La loi Hadopi retoquée faute de combattants. Dans une arène désertée, envahie au dernier moment par les socialistes planqués, qui n'ont pas joué le jeu du banc vide selon Copé, la loi est renvoyée dans les cordes. Notons l'invention d'un intervenaute, le Nanocrate à l'intention du dit Copé qui prétend que les coups de pied au cul ça aide à avancer. On ne lui fait pas dire et de multiples prétendants à l'ouvrage se sont fait entendre.
Autre sujet récurrent de nos blogs favoris, la littérature est-elle oui ou non menacée. Didier Jacob propose un entretien avec Danielle Sallenave (qui vient de publier Nous, on aime pas lire, chez Gallimard, chronique de son passage dans un collège Ambition réussite à Toulon). Je conseille le commentaire fort pertinent d'un internaute dénommé Louis Steffen à qui je décerne ici-même un Big Bisou fraternel.
Concluons par une note de frivolité que me procure régulièrement Madame de K.(Qu'elle en soit ici remerciée). Cette fois elle nous fait part d'une délivrance. Enfin décomplexée de n'avoir pas lu tous les incontournables de la Litttérrrature et pourtant elle respire et pense. Immoral !

*Lire avril 2009
Photo Play it again Samos ZL

samedi 11 avril 2009

Je vous écris d'un pays lointain.


"Vous n'imaginez pas tout ce qu'il y a dans le ciel. il faut l'avoir vu pour le croire. Ainsi, tenez. les ... mais je ne vais pas vous dire leur nom tout de suite."
Malgré des airs de peser très lourd et d'occuper presque tout le ciel. ils ne pèsentpas, tout grands qu'ils sont, autant qu'un enfant nouveau-né.
Nous les appelons des nuages.
Il est vrai qu'il en sort de l'eau, mais pas en les comprimant, ni en les triturant. Ce serait inutile, tant ils en ont peu.
Mais, à condition d'occuper ,des longueurs et des longueurs, des largeurs et des largeurs, des profondeurs et des profondeurs aussi at de faire les enflés, ils arrivent à la longue à laisser tomber quelques gouttelettes d'eau, oui, d'eau. Et on est bel et bien mouillé. On s'enfuit, furieuses d'avoir été attrapées; car personne ne sait le moment où ils vont lâcher leurs gouttes; parfois ils restent des jours sans les lâcher. Et on resterait en vain chez soi à attendre."

Henri Michaux Je vous écris d'un pays lointain

Photo ZL

jeudi 9 avril 2009

Le découragement de Sisyphe

Je vous préviens, je suis d'une humeur de chien.
Lui, je l'ai rencontré ce matin, enfin pas lui mais son frère. Je circule beaucoup en voiture et le nombre de cadavres d'animaux qui jonche la chaussée est hallucinant. Comme j'ai horreur de repasser sur le monceau de boyaux éclatés, je vise savamment pour que mes roues n'en remettent pas une couche, si on peut dire. Les chiens écrasés, c'est la rubrique ou on placardise les journaleux, faute de mieux. Ca devient furieusement tendance.
Les publicistes utilisent l'image d'animaux écrasés pour vendre les véhicules de clients qui assument du coup que leurs engins ont une vocation meurtrière. Un Vespa plus rapide qu'un léopard, la preuve la bête gît avec la marque de la roue bien en travers;


le 4X4 est waterproof puisqu'il peut écrabouiller un mérou


Il y a pire les Anglais ne sont jamais en reste pour utiliser le gore

Paul Personne avait écrit un adieu aux P'tites bestioles. "La gachette frivole du nouveau roi des cons", c'est pas vendeur de 4X4.
Mes deux chiens sont morts sous les roues de sales bagnoles, dont l'une conduite par une femme complètement abrutie de tranquilisants.

De mauvaise humeur aussi parce que j'ai vu "La journée de la jupe" et que je me sens dans le plus grand des malaises.


Des Sonia (formidable Adjani), j'en ai connu, j'en connais, je travaille avec elles (oui, je m'occupe de l'éducation des petits nenfants des cités pourries, entre autres). Le film est très efficace, plutôt crédible : une enseignante pète les plombs quand un des caïds qui l'emmerde en permanence et ruine la mission de transmission des mystères de la langue française, qu'elle prend très au sérieux et ce pour des gamins qui s'en battent les c...,(sic bien sûr ) se révèle en possesssion d'un calibre. Pour lui confisquer elle s'en empare, s'en sert pour se défendre et intimer l'ordre aux gamins de la fermer, puis de suivre d'un bout à l'autre son cours sur Molière. Naturellement ça se gâte, je n'en dirai pas davantage.
Le film contient tous les ingrédients d'un excellent thriller, d'une chronique sociale, d'un mélodrame de la plus pure école réaliste. On en sort la gorge serrée, les larmes aux yeux.
Et pourtant, je reste sur cette méchante humeur. D'abord parce que la réalité décrite est hélas de la pire des actualités et que l'entassement de populations toutes stigmatisées par leur appartenance à la France du très bas, voire pas même reconnues comme partie de la communauté a permis la prolifération d'une frange de petits machos qui ne rêvent que gloire vite acquise, belles bagnoles et meufs à gogo. La prof qui prie ses élèves de comprendre que seul le savoir peut les tirer du ghetto où ils se savent croupir, comme tous les adultes armés des meilleures intentions du monde, avec leur figure d'honnête homme tout droit descendu des humanités et de l'idéal des lumières ne peuvent rien contre ce qui est illustré dans ce qui précède, à savoir ce leit motiv obsédant en clair ou en filigrane des messages publicitaires : soit le plus fort, le plus malin, écrabouille s'il le faut, mais surtout, ne reste pas dans cette position lénifiante de victime qui est l'autre face de la médaille. Pour que certains soient au pinacle, il faut que beaucoup soient en esclavage.
Mon malaise à la suite du film, c'est qu'il dit peu de choses à cet égard. Il rabat le propos sur une éducation trop coranisée, les dérives de petits machos qui filment les viols collectifs, la mise au martyr de hussards de la république souvent issus de la génération précédente d'enfants d'immigrés, il dit la barbarie des forces de l'ordre quand il s'agit d'en finir, mais il ne dit rien de ces gens qui bon an mal an essaie malgré tout de vivre dignement même si leurs enfants leur échappent.
Peut-être que ce qui me gène le plus c'est que la caillera la pire, c'est encore un Noir (comme dans "Entre les murs" même s'il fait la paire avec un Roux, et que si les constats sur la pitoyable situation des collèges est énoncée, cela reste marginal. Toute l'intensité du film est dans le délire paroxistique de Sonia / Adjani, l'attitude compréhensive, humaine, trop humaine du flic médiateur joué par Denis Podalydès. Le film peut aussi bien au premier degré flatter les pires penchants réactionnaires et c'est sans doute ce qui me fout vraiment en rogne.

Les deux morceaux de ce billet sont donc moins hétérogènes qu'ils pourraient paraître. C'est le même irrespect du vivant qui ratatine la faune et les enfants du monde, c'est l'avidité promue au rang de vertu qui contamine à un degré ou un autre les membres de l'espèce. L'homme ne nait ni bon ni mauvais, mais si sa seule issue est la barbarie, on ne voit pas comment il y échapperait.

Et comme tous ceux qui se coltinent ces réalités, je suis submergée par le découragement, celui de Sisyphe, voyant sans cesse rouler à bas le rocher qu'il a eu tant de douleur à élever au dessus du monde.

Demain, je reprends mes belles couleurs riantes et pleines d'optimisme, c'est promis

mardi 7 avril 2009

Law, Madoff, quel rapport ?


1720, écroulement de la fiction monétaire de Law. Vous vous rappelez ce banquier véreux qui avait remplacé l'or et l'argent par la monnaie de papier durant la Régence. Le Duc d'Orléans a succédé au règne de Louis XIV en attendant que le petit Louis XV ait l'âge de monter sur le trône. Pris à la gorge par les dettes, désireux de marquer son passage par le faste et les libéralités, il a cédé aux discours de Law économiste écossais, bonimenteur sans vergogne, trader avant l'invention du métier.

Après quelques années de folle spéculation grâce à la Compagnie perpétuelle (ça ne s'invente pas) des Indes, l'économie réelle frappe à la porte et « le rêve américain s'envole ». c'est la banqueroute.

Pierre Lepape y consacre un chapître de son « Pays de la littérature » (277-291). En extrait ci-dessous quelques passages constitués de citations de grands témoins de l'époque.

« On ne donne plus d'argent nulle part. écrit Barbier, on ne veut plus de billets dans le commerce, en sorte que le bourgeois est obligé de perdre la moitié de ses biens et avec l'autre moitié d'acheter tout deux tiers au-dessus de sa valeur. »

(...)

« Buvat raconte que le curé de Saint Eustache, se rendant chez l'un de ses paroissiens qui avait besoin de secours n'obtient pas réponse lorsqu'il frappe à sa porte et fait appel à un commissaire: « Lorsqu'il fut entré dans la chambre, on fut bien étonné d'y trouver le mari pendu et sa femme et ses trois enfants égorgés. Dans la pièce on trouva six sols de monnaie et pour deux cent mille livres de billets de banque que l'on disait provenir du remboursement des rentes sur l' Hôtel de Ville. » Le mirifique enrichissement de quelques-uns a ruiné des milliers de petits rentiers. »

(...)

« Saint Simon a une lecture politique de cette fantasmagorie financière.

« Ce qui hâta la culbute de la Banque et du Système fut l'inconcevable prodigalité de M. le Duc d'Orléans, qui, sans bornes, et, plus s'il se peut, sans choix, ne pouvant résister à l'importunité, jusque de ceux qu'il savait à n'en pouvoir douter lui avoir toujours été et lui être encore des plus contraires, donnait à toutes mains, plus souvent se laissait arracher par des gens qui s'en moquaient, et n'en savaient gré qu'à leur effronterie » Sa conclusion « L'on a peine à croire ce qu' on a vu, et la postérité considérera comme une fable ce que nous-mêmes nous ne nous remettons que comme un songe. »


Montesquieu publie ses Lettres Persanes à Amsterdam, en 1721. « Elles ont été écrites pendant les quelques mois qui marquent l'apothéose et la banqueroute du système. »

Voici ce qu'il fait dire à Usbek, sensible au discrédit des symboles et des valeurs qu'ils représentent. « Quel plus grand crime que celui que commet un ministre, lorsqu'il corrompt les mœurs de toute une nation, dégrade les âmes les plus généreuses ternit l'éclat des dignités, obscurcit la vertu même, et confond la plus haute naissance dans le mépris universel? » (...) Que dira la postérité, lorsqu'il lui faudra rougir de la honte de ses pères? Que dira le peuple naissant, lorsqu'il comparera le fer de ses aïeux avec l' or de ceux à qui il doit immédiatement le jour ? Je ne doute pas que les nobles ne retranchent de leurs quartiers un indigne degré de noblesse qui les déshonore, et ne laissent la génération présente dans l'affreux néant où elle s'est mise. »

Pour conclure cette recension, -toute ressemblance avec la réalité actuelle n'étant que pure coincidence, nous ne vivons pas sous la Régence, n'est-ce pas ? -, cette définition de la liberté du « Président à mortier au parlement de Bordeaux » :

La liberté pure est plutôt un état philosophique qu'un état civil. Ce qui n'empêche pas qu' il n'y ait de très bons et très mauvais gouvernements.[... ] Pour moi, je comparerais les bonnes lois à ces grands filets dans lesquels les poissons sont pris mais se croient libres, et les mauvaises à ces filets dans lesquels ils sont si serrés que d'abord, ils se croient pris »

Vous connaissez un moyen de cisailler les mailles ?

Pierre Lepape. Le pays de la littérature. Des serments de Strasbourg à l'enterrement de Sartre. Seuil 2003

Photo Monnaie de Paris

dimanche 5 avril 2009

Vent des blogs 7. Tout à l'égo, Zoë fait son coming out

Cette semaine j'ai décidé de cesser les publicités gratuites pour tous ces talents perdus dans la blogogalaxie, la flemme d'aller récupérer les textes, les liens et tout et tout. Je crois que ce vent ne soufflera désormais que tous les quinze jours ou plus, selon mon humeur. Pour être au diapason de l'époque, je vais parler de mon moi, je n'ai pas dit mouah, ne me faites pas dire n'importe couac. C'est déjà assez délicat d'arracher les voiles, je n'ai pas dit le tchador, vous avez mauvais esprit savez-vous, non je parle de cette pellicule (cessez de plaisanter), ce léger vernis (c'est agaçant) qui nous sert à tous de carapace sous laquelle nous sommes de pauvres homards en cours de mue perpétuelle (je ferme cette laborieuse métaphore).
Or donc, je vais découvrir à vos yeux extasiés, éblouis, clignotants, certaines de mes beautés, jusqu'à ce jour soigneusement planquées dans le coffre fort de l'anonymat.
Commençons par la première (oui je sais, ça va de soi). Musique

Je remercie chaudement mon ami DH de m'avoir tiré le portrait avec une délicatesse qui n'appartient qu'à lui (notez l'allusion à la perle, hein c'est subtil). Et pour vous éviter des facilités, j'en suis d'accord, je suis belle comme un camion.


Là, c'est ma fille chérie qui a saisi toute la quintescence de ma féminitude et de mon art vestimentaire. Elle était encore jeune et naïve.
Je l'ai d'ailleurs immortalisée à cet âge tendre et lui ai demandé la permission de faire usage de ce cliché (elle se destine au théâtre, elle est déjà conditionnée par anticipation au déchainement médiatique). Je lui ai dit que seule une poignée de privilégiés triés sur le volet s'égarait de temps en temps ici même, dont elle n'avait rien à craindre sinon quelque trait soi-disant spirituel.

Bien sûr nous ne sommes pas en mesure d'atteindre l'art de la tribu des Omo, je ne résiste pas au plaisir de vous les faire connaitre, ils sont comme moi, en voie de disparition. Sauf que moi, comme on peut le constater ci-dessus, un petit bout de moi restera, eux c'est moins sûr. Et je ne vous parle que de ceux là, nous sommes d'accord, parce que sinon (Bushmen, Pygmées, Inuits, Aborigènes, Crees, Ojibways, Guaranis etc. on a honte de cet etc. Si vous voyez passer sur vos écrans La terre des hommes rouges, ne manquez pas).

Ce n'est qu'un seul exemple de leur art, ne manquez pas de les découvrir, je vous ai créé une passerelle ci-après.

Dans la famille, je demande le fils, il est ici.

Elle, c'est Huguette Dubois, femme au foyer, ma grande copine, nous nous réchauffons mutuellement. Je lui confie mes joies et mes peines, elle écoute avec une patience infinie.
Pour le contraste, je n'hésite pas à vous rafraichir la mémoire, alors que la canicule va bientôt nous faire suer sang et eau. Eh oui, c'était il y a quelques mois seulement.

Et enfin, celle que vous attendez avec impatience, qui se fait attendre comme une diva, on s'apprête à applaudir : j'ai nommé Zoë

Ah, dommage, elle vient juste de tourner les talons après avoir déposé la tarte. Ne sais quand reviendra.

Les décors sont du regretté Roger Harth
Toutes les photos sont de ZL, à l'exception du camion (Dominique Hasselmann) et de la tribu de l' Omo

vendredi 3 avril 2009

Cartes postales rétroactives (5) Samos, ciboire pythagoricien


A force d'entendre déplorer le silence de Sapience Malivole, je me suis décidée ce jour à lui rendre visite. Son blog est consacré à "la littérature et l'histoire, principalement hellénique". Or donc le dernier message s'intitule Physionomie de ci-boire et présente à l'image une poterie qui a déclenché en moi tout soudain un de ces accès de profonde nostalgie, alors que l'instant d'avant, j'étais dans l'ordinaire d'une fin de journée, pianotant sur le clavier, lecture et reponses au mails, visite en coup de vent sur la blogosphère avant d'attaquer la mise en route d'un repas, qu'est-ce que je pourrais bien faire de bon.
Cette poterie et le texte sur le vin, une promenade dans les messages antérieurs mais plus encore les commentaires et les réponses de Sapience m'ont brusquement replongée dans le monde hellénique, pas celui de l'Illiade et l'Odyssée, celui de mes séjours plus ou moins longs voire très longs, j'y ai vécu un an et demi d'affilée, après de multiples passages et avant d'autres encore. Il y a maintenant plus de dix ans entre moi et mes dernières ripailles arrosées de vin grec sous une tonnelle en bord de mer. Mon dernier séjour était à Samos. Une amie grecque, la douce Sissi (Vassilia), m'avait prêté un appartement donnant sur le port. Mon compagnon m'avait rejointe, nous avions loué un scooter et étions partis en baguenaude sur les routes en lacets à l'arrière de l'ile. Nous avions déniché une plage sublime et déserte, au bout d'un sentier abrupt, une de ces criques d'eau cristalline, de sable fin surmontée d'une falaise dont le creux nous donnait de l'ombre. Nous avions une telle impression de virginité des lieux, les dessins figurés dans la roche par le jeu des strates découpés dans les arrachements dont naissent les îles étaient si étranges, que nous avons eu envie de nous photographier nus conte la roche. Ces photos des jeux de lumières et d'ombres jouant sur nos peaux fragiles collées à la roche nous avaient absorbés un long moment. Puis nous nous étions baignés dans l'eau transparente, nous pouvions voir la côte turque, l'impression qu'on aurait pu la ralier à la nage. Nous avions regrimpé la falaise en écrasant sous nos sandales ces herbes odorantes, craquantes, piquantes qui bordent les sentiers caillouteux. Je m'étais arrêtée pour prendre en photo une épeire délicate et tigrée
En repartant, nous avions acheté dans une de ces poteries dont l'île est farcie une collection de ciboires pythagoriciens pour en offrir à des amis. Ils ont la particularité d'être fabriqués selon le modèle inventé par Pythagore lui-même pour inviter ses disciples à la tempérance, de telle sorte que si le liquide dépasse un certain niveau, il repart dans le pied et se vide intégralement. Lors de la distribution aux amis, un jeu de mise en batterie de plusieurs d'entre eux les uns dessous les autres, permettait de récupérer le champagne versé trop généreusement.

Ainsi, l'évocation de Sapience a-t-elle fait remonter un moi cepuissant désir d'une table au bord de l'eau le soir quand le soleil s'y noie, on déguste des mézés (tranches de concombre et de tomates dans l'huile d'olive, feuilles de vigne, pieuvre grillée) en buvant du Retsina et en écoutant du Rebetiko.
J'oubliais. Les photos d'Adam et Eve aux premiers jours du monde ont été lamentablement ratées. La pellicule n'a pas embrayé.

Photos ZL

mercredi 1 avril 2009

Imagine


Des milliers de policiers ont été acheminés de la province anglaise vers Londres pour prêter main forte à Scotland Yard lors de l'organisation du G20. Crédits photo : AFP

Imagine

Les participants du G 20 ont été invités à laisser leurs cravates au placard pour éviter d'être la cible du peuple de la rue qui proteste. Si vous souhaitez connaitre le point de vue des premiers sur les autres, je vous invite à lire les commentaires de l'article daté du 28 mars 2009, accompagnant l'image ci-dessus (ils sont gratinés) et pour l'inverse le flash où on apprend que des manifestants s'en sont pris à une succursale de la banque RBS. S'en prendre à une banque, quelle hérésie !
Cependant nous sommes en mesure de vous dévoiler les grandes lignes des décisions prises en ce jour hautement symbolique.
Il faut noter que l'autorisation de ne pas se ficeler le cou a eu des effets bénéfiques sur le fonctionnement du cerveau de ces dignes représentants leur procurant des visions jusqu'alors refoulées et les inclinant à des résolutions longuement remisées aux calendes grecques.
Voyons sans tarder lesquelles, je vous sens impatients, l'avenir du monde s'y joue et par contingence le vôtre celui de votre descendance, de votre voisinage, proche, lointain, à perte de vue.
Donc, la séance a débuté par une suggestion sans nuance à ceux qui souhaitaient partir, de le faire sans tarder et sinon de rester à leur place.
Ensuite on a examiné les questions à l'ordre du jour : paradis fiscaux, relance économique, nettoyage des junk funds, et tout un paquet de problèmes associés.
Joe Biden a pris la parole. Il a dit "Les gars (Boys), ça chauffe dehors et ça ne va pas s'arrêter de sitôt. Les peuples sont de plus en plus remontés. Moi, perso, j'aimerais rester dans le rôle du mec sympa de centre gauche qui va changer l'image de la méchante Amérique cause de tous les malheurs. Give us a chance, a-t-il dit aux manifestants, «Le statu quo n'est pas une option. Les choses vont changer, qu'on le veuille ou non»(sic).
L'assemblée a mis un doigt au col, n'y a rencontré rien qui l'étouffât et à partir de là, les propositions les plus folles ont fusé de toutes parts.
1. Moratoire absolu sur la fabrication, la vente et l'utilisation des armes, notamment nucléaires.
2. Reconversion des usines d'armements en laboratoires de recherche et de fabrication de prothèses pour les victimes de mines et autres outils de dislocation.
3. Gel des avoirs planqués dans les Paradis fiscaux et restitution des sommes après vérification de leur origine et prélèvement des arriérés fiscaux.
4. Contrôle des banques par les citoyens épargnants et remise à chacun d'un droit au crédit équivalent à l'ensemble des sommes ayant transité au cours de sa vie via le versement mensuel des salaires.
5. Instauration d'un Revenu Minimum de Survie sur toute la planète, assorti d'un Revenu Maximum Autorisé, la fourchette ne pouvant laisser accroire que la vie des uns vaut plus de dix vies des autres.
6. Redéfinition de l'utilité du travail et suppression des activités superflues et écologiquement insanes (publicité et toutes formes de propagande, rallyes automobiles), la liste a été ainsi ouverte sans être close.
7. Parité homme femme dans toutes les assemblées et abolition du dirigeant unique au profit d'un cénacle renouvelable par tiers.
8. Baisse généralisée de la production pour alléger l'empreinte écologique et réduire le temps de travail.
9. Contrôle de la gabegie, soit suppression d'intrants et de pesticides pour l'ensemble des productions agricoles, de produits artificiels pour les objets de consommation courante, de chimie abusive dans la médication, de l'obsolescence programmée.
10. Permis de séjour universel pour tous les humains valable dans n'importe quel endroit sur la planète.

On apprend que l'ensemble de ces mesures est adopté à l'unanimité sauf la 7 qui a donné lieu à des échanges très violents entre la poignée de représentantes et le pack des représentants. La mesure 7 a donc été suspendue. On craint pour cette raison que les 9 autres soient restées des voeux pieux.
Cependant on retiendra ce premier avril comme une date clé de l'uchronie. Si ça avait marché nous n'en serions pas à nettoyer cette foutue planète dont l'explosion a pollué le cosmos entier.

Photo Le Figaro international 28 03 09